Les mélodies nocturnes de Scratch Massive
Maud Geffray et Sébastien Chenut forment le duo Scratch Massive. Time est leur second album studio, aux tonalités sombres et aux mélodies new wave. Rencontre.
Deuxième album
Maud Geffray et Sébastien Chenut forment le duo Scratch Massive. Time est leur second album studio, aux tonalités sombres et aux mélodies new wave. Rencontre.
Pour ceux qui ne vous connaissent pas… votre nom de scène, Scratch Massive, évoque plutôt le hip hop ou la jungle…
Maud : À notre grand désarroi ! (rires) C’est parti d’une blague, de la légende d’une photo d’une foule en délire dans un magazine anglais : "What a scratch massive crowd!". Comme quoi les blagues les plus courtes sont souvent les meilleures… Certains festivals nous demandent parfois si nous scratchons sur vinyls ! (rires)
Comment vous êtes-vous rencontrés ?
Sébastien : En 1994, à la Baule (côte Atlantique, NDLR). J’étais DJ l’été à la discothèque Le Churchill, à une époque où les musiques électroniques étaient bannies des clubs. C’était le bastion electro.
Maud : J’allais dans ce club, pendant les vacances, pour danser et c’est là que j’ai rencontré Seb. Puis, j’ai appris à mixer chez moi en lui empruntant des vinyls. J’ai vraiment commencé en tant que DJ en soirées au Pulp en 2000.
Comment s’est passé le passage à la composition ?
Sébastien : Deux ans après notre rencontre, nous sommes montés sur Paris. À force de faire des soirées, on a eu envie de faire nos propres morceaux. Nous avons sorti nos premières compositions vers 1998-1999 sur Euterpe, le label d’Olivier le Castor. La seconde, Ice Breaker, a été remarquée en Europe, notamment par la presse anglaise. Au même moment, nous avons commencé à faire beaucoup de lives. Nous avons ensuite composé notre premier album, qui était prêt début 2002.
Mais il n’est sorti qu’un an plus tard chez une multinationale du disque…
Maud : Il s’est passé du temps entre la signature de notre contrat début 2002 et la commercialisation fin 2003, car la sortie a été reportée. Il fallait attendre que tout soit prêt à l’international, puis le dernier album de Madonna était prioritaire, etc. Au final, nous avons vendu 10000 albums, ce qui est beaucoup pour un label indépendant, mais insuffisant pour une major comme Warner. C’était la période où il y avait l’exemple du succès des Daft Punk. Les majors se disaient qu’il y avait quelque chose à tenter avec les musiques électroniques, mais elles ne savaient pas trop quoi…
Sébastien : C’est une attitude de joueur de Casino : "en misant sur untel, je toucherai peut-être le jackpot !"
Vous êtes notamment DJ au Pulp à Paris. C’est un club associé à la techno minimale.
Maud : Oui, nous sommes DJs résidents du Pulp à Paris un jeudi par mois depuis 2001. C’est un club lesbien, qui s’est ouvert le jeudi à tout le monde.
Sébastien : Dans l’histoire des musiques électroniques, il y a eu plusieurs chapitres. Le premier, c’était une réaction contre les chansons commerciales qui passaient à la radio. D’où une techno sans voix assez dure. Puis, les voix sont revenues dans l’electro, car la plupart de ses producteurs, comme les Daft Punk, ont un background rock. Vers 2001-2002, on en a eu marre d’écouter de la techno dans les clubs. L’intérêt du Pulp, avant qu’il ne tombe dans la techno minimale, c’est ce vrai mixage "2ManyDJesque" de la musique : on pouvait passer trois morceaux de techno, deux morceaux de rock et un titre très lent. Au bout d’un moment, on est reparti sur la techno d’avant, mais dans une nouvelle mouture, plus affinée, plus minimale. Comme si on arrivait à la substantifique moelle de la techno.
Le club, est-ce un laboratoire pour tester votre musique ?
Sébastien : Quand tu es DJ, tu reçois des disques. Du coup, tu analyses en direct les tendances musicales comme avec un thermomètre. Ces tendances, ajoutées aux évolutions des technologies que nous utilisons pour composer, orientent notre façon de créer de la musique. Donc, nous aussi, nous avons "minimalisé" notre musique, mais pas dans le sens de la techno minimale, plutôt dans le sens où les rythmiques sont davantage en retrait, avec notre background rock comme influence mélodique.
Votre second album est très sombre, est-ce votre état d’esprit ?
Maud : C’est cette musique là qui me fait vibrer, ce que j’écoutais dans mon adolescence, de Human League à The Cure. Ce n’est pas pour autant que nous sommes d’humeur sombre. Il y a une force dans la noirceur. Mais, le mot clé de notre musique c’est la mélodie, parce que l’on vient du rock.
Vous venez d’achever l’enregistrement de la musique du premier long-métrage de Zoe Cassavetes, Broken English…
Maud : Nous y avons travaillé de novembre à janvier 2007. La réalisatrice devait faire un clip pour nous, qui ne s’est pas fait, mais nous étions restés en contact. Nous avons créé la musique originale et nous avons également effectué la direction artistique pour trouver des titres préexistants.
Sébastien : C’est une musique qui nous ressemble, mais qui doit suivre l’histoire : elle est un nuage dans telle scène, ou bien un personnage qui n’est pas là dans une autre. Musicalement, nous avons pas mal utilisé de piano et de synthé. On n’a pas eu beaucoup de temps, peu de moyens, mais pas mal de liberté, et c’est ça le plus important.
Scratch Massive Time (Chateaurouge/Nocturne/Kompakt) 2007