Un Laurent Garnier multi-cartes

Des clubs britanniques aux festivals de jazz, de la techno au cinéma, la carrière du DJ Laurent Garnier est constellée de nombreuses rencontres et d’expériences multiples. Dernières en date : Bugge Wesseltoft, Philippe Nadaud et Benjamin Rippert, avec lesquels il a effectué une tournée, dont l’album electro-jazz Public Outburst est le témoin.

Le laboratoire du DJ

Des clubs britanniques aux festivals de jazz, de la techno au cinéma, la carrière du DJ Laurent Garnier est constellée de nombreuses rencontres et d’expériences multiples. Dernières en date : Bugge Wesseltoft, Philippe Nadaud et Benjamin Rippert, avec lesquels il a effectué une tournée, dont l’album electro-jazz Public Outburst est le témoin.

Il y a deux Laurent Garnier : le DJ et le musicien. Les fans du premier ne sont pas toujours fans du second. Le DJ fait danser la planète, le musicien tente des expériences et des rencontres iconoclastes. La production d’un disque tente un jour ou l’autre à peu près n’importe quel DJ, souvent frustré de passer les morceaux des autres. Pour Laurent Garnier, c’est un peu différent. Tel un Janus aux deux visages, il assume ses deux faces totalement opposées, quitte à dérouter un public ou l’autre. "Composer des morceaux est une suite logique au métier de DJ. J’ai voyagé après la sortie du titre Wake Up, cela a été ma carte de visite pour jouer dans les clubs du monde entier… J’ai commencé par faire des maxis pour faire danser les gens, mais j’ai continué à créer de la musique surtout pour concevoir des albums, un format qui n’a rien à voir avec cela", explique-t-il.

Le grand écart entre les clubs et la scène

Car Laurent Garnier veut concilier son activité derrière deux platines, caché dans une cabine de DJ, avec l’exhibition sur une scène de concert face au public.1998 est une année charnière. Grâce à sa Victoire de la Musique pour son album 30, il peut se produire dans la mythique salle de l’Olympia. Avec l’envie de changer les choses : "Si l’on veut séduire un nouveau public, on ne peut plus montrer sur scène un type tout seul derrière un ordinateur, que l’on dirait en train d’envoyer ses mails. Je n’y crois pas une seconde !" Il tente alors d’allier les arts du cirque aux musiques électroniques. Faisant appel à la compagnie des Nuits Blanches pour créer un spectacle sur scène un peu différent et visuellement plus riche.

Dix ans plus tard, Laurent Garnier fait toujours le grand écart entre les clubs et la scène. "J’ai 40 ans, je n’écoute pas de la musique à danser de 8 h du matin à 8 h du soir. Ma vie a changé, j’écoute d’autres choses. Pendant des années, j’ai entendu dire que les DJs n’étaient pas des musiciens, je me suis battu contre cela." Son dernier projet, mélange d’electro et de jazz, de bits et de sueur, l’a fait voyager sur les scènes des festivals et des salles de concert en compagnie de Bugge Wesseltoft, Benjamin Rippert (claviers) et Philippe Nadaud (cuivres). Il tente donc aussi le grand écart entre le public electro et les aficionados de jazz. Laurent, qui est encore monté sur scène cet été 2007, ne cache pas sa satisfaction : "Pari gagné aux Eurockéennes, on a retourné le public. Et 15 jours après, on a enflammé le festival de jazz de Montreux !"

Chef d'orchestre

Sur scène, c’est lui qui dirige l’osmose entre ses machines et les instruments, dans un mix de beats techno, de cuivres et de claviers puissants et hypnotiques. "Je suis devenu chef d’orchestre. Les musiciens ne connaissent que les thèmes, tout le reste n’est qu’improvisation. La plupart des gens qui appréciaient mes précédents albums n’aiment pas celui-ci et vice-versa. Je conçois que ce n’est pas un disque facile à écouter, il n’est pas fait pour les amateurs de techno, même si j’espère qu’il leur plaira !" Le disque, enregistré live sur différentes scènes, reprend quelques titres du précédent album de Laurent Garnier, The Cloud Making Machine et propose plusieurs inédits.

Toujours dans son rôle d’ambassadeur de l’electro, Laurent Garnier a également composé la bande son pour des ballets créés par Angelin Prejlocaj et Marie-Claude Pietragalla, et recréé les bandes originales de films. "Les gens du Louvre m’avaient fait rencontrer des gens du Musée Albert-Khan, pour que je crée la bande son d’un film d’archives. L’expérience se réitère cette année 2007 au festival de piano de la Roque d’Anthéron, avec un pianiste. J’ai créé des morceaux à partir de la musique des autres, soit un mix de près de 180 titres pour illustrer Finis Terrae d’Epstein. Composer des musiques originales pour le cinéma ne devrait pas tarder, il y a anguille sous roche dirons-nous…" Entre les festivals et les clubs, Laurent Garnier prépare également, côté cinéma, l’adaptation du livre Électrochoc, écrit avec le journaliste David Brun-Lambert en 2003. L’histoire d’un DJ qui ne dort jamais…

Laurent Garnier, Bugge Wesseltoft, Philippe Nadaud, Benjamin Rippert Public Outburst (F Com/Pias) 2007.