Fenêtre sur la cour de Renan Luce
Parti sur les routes de France à la faveur de ses deux tubes Les Voisines et La Lettre, Renan Luce a ravi en une année des milliers de demoiselles à travers le pays. Le chanteur breton, auteur d'un premier album intitulé Repenti, aura encore un agenda chargé d'ici la fin de l'année avec près de quarante concerts à donner.
L'univers du chanteur breton
Parti sur les routes de France à la faveur de ses deux tubes Les Voisines et La Lettre, Renan Luce a ravi en une année des milliers de demoiselles à travers le pays. Le chanteur breton, auteur d'un premier album intitulé Repenti, aura encore un agenda chargé d'ici la fin de l'année avec près de quarante concerts à donner.
Le succès est venu assez rapidement pour l'artiste finistérien au style sobre et rassurant. Avec son grain de voix sucré, ses textes soignés posés sur des mélodies bonne pâte, il mélange les ambiances pop, jazzy-cabaret et chanson pour raconter de simples histoires de vie romancées, servies par un ton faussement naïf.
C’est la régularité de ses prestations les dimanches soirs au théâtre Le Mery, à Paris, qui a attiré les directeurs artistiques des maisons de disques. La boule de neige a grossi et fait fondre les premiers modèles d'orchestration des chansons. “Je me suis attaché à améliorer les arrangements en compagnie d’Olivier Lefebvre.” Ce travail effectué en amont de l'enregistrement d'un album donne aujourd'hui cette sensation de travail abouti.
En effet, sur l'album Repenti, les treize chansons résistent à l'épreuve du temps autant qu'à l'effet contreproductif que génère parfois la rotation intense d'un titre sur les ondes des radios. La réalisation aussi léchée que légère, sobre, est l’œuvre d’un des musiciens de l’album, l’ex-Valentin, Jean-Louis Piérot.
Amateur de métaphores
Dans les carnets de notes de Renan Luce, les jeux de mots et jeux d'ambiances foisonnent. On l'imagine ayant vécu une enfance en haut des charts du concours de rédaction. L’image y est omniprésente, la métaphore doucement récurrente dans les paroles : “Cherche regard neuf sur les choses / Cherche iris qui n’a pas vu la rose” dans la chanson L'Iris et la Rose. Les scènes de vie sortiraient d'une sorte de rêve en forme de road movie, quelque part entre Rennes, Nantes et Saint-Jean-de-Luz.
Le rêve, c'est justement au Pays basque qu'il s’est réalisé dans une pièce du studio du Manoir près de Biarritz. Après avoir travaillé seul, Renan s'est retrouvé avec une poignée de musiciens – dont trois membres des Jazzbastards qui accompagnent Oxmo Puccino – venus l'aider à finaliser l'album en prenant le temps nécessaire.
Pour sa longue tournée qui a débuté en mars et se poursuit à un rythme intense, il s'est entouré d'autres instrumentistes mais la partition n'a pas fondamentalement changé. “C'est la façon de jouer qui a évolué car j’avais aussi envie de ne pas trop respecter les arrangements. On est donc plus dynamique.” Peut-être un peu plus rock'n'roll dans l'attitude quand Renan s'arme d'une guitare électrique rouge style Rickenbacker, un soir de concert à Paris. Il ne faudrait pas pour autant se méprendre, car si la tournerie sautillante de La Lettre est notable, le tempo est bien souvent lent sur l'album.
Question de rangement
Tout est toujours dans la nuance. La guitare folk est caressée puis martelée sur les couplets de fin du Lacrymal circus. Ailleurs, de petites touches rock alternent avec des sonorités plus anciennes vernies à la réverb’. Il aime Johnny Cash, Eliott Smith, les guitaristes mélodistes qui vont de la country bluegrass à l'indie pop-folk. Les influences quotidiennes du Renan Luce Circus ne se limitent pas aux Etats-Unis. “On a tous des iPods où la pop des Beatles figure en bonne place”, précise-t-il.
Chez Renan, tout serait donc une question de rangement dans des cases, carrées et ouvertes. Comme chez ce personnage autrefois sulfureux, aujourd'hui à l'abri des coups tordus qu'il fait parler dans la chanson Repenti, tout en colorant son texte par des touches de mandoline italienne : “Des spaghettis, d'la sauce tomate / Dans la banlieue nord de Dijon / J’ai choisi la voie diplomate / Qui m’a évité la prison / Ça fait vingt ans que je me cache / Et je pensais vivre bien moins / Le FBI remplit sa tâche / La protection d’un témoin / Repenti, j’ai trahi / J’aurais bien pu casser des pierres / Au pénitencier du Texas / Je me finis à la bière / Dans un PMU bien moins classe.” Et Luce de glisser sur les mots tout en épuisant les champs lexicaux, en se référant inconsciemment à la beauté elliptique des textes de Raymond Carver et aux descriptions dépressives de Marcel Proust. Si on danse au 22 Bar de Dominique A, au Lacrymal Circus de Renan “on y voit c'qu'on veut y voir” et surtout, on se relaxe. Chaque morceau de Repenti propose un beau dépaysement, lent et subtile, une merveille de chanson imagée qu'on rêve injectée de travellings circulaires.
Reprise de la tournée en octobre.
A l'Olympia le 8 décembre 2007
Renan Luce Repenti (Barclay/Universal) 2006