Manu Chao
Six ans après Proxima Estacion : Esperanza, Manu Chao sort un nouvel album, très attendu : La Radiolina. Varié, dense, et musclé, il devrait ravir ses fans comme ceux de la Mano Negra. Un régal.
La Radiolina
Six ans après Proxima Estacion : Esperanza, Manu Chao sort un nouvel album, très attendu : La Radiolina. Varié, dense, et musclé, il devrait ravir ses fans comme ceux de la Mano Negra. Un régal.
On se souvient de Clandestino, et de Proxima Estacion : Esperanza parus respectivement en 1998 et 2001: deux albums monochromes aux accents mélancoliques, deux jolies plantes poussées à l’ombre laineuse d’un bonnet péruvien. Un peu plus tôt dans la carrière de Manu, on se souvient aussi des bombes musicales de la Mano Negra, de celles qui explosent, assaillent l’esprit sans crier gare. Le corps et le cœur fourmillaient à nouveau d’une fièvre rock mâtinée de son latino, épidémie ravageuse propagée sur l’Hexagone au début des années 90.
La Radiolina, nouvel opus du globe-trotter, star "alter" devenue planétaire, réveille ces deux mémoires. Dans l’intimité du studio, s’invite l’énergie musclée du live. Et voilà : La Radiolina impose son univers haut en couleur, gorgé de soleil et de promesses ; un paysage beau comme les dessins bigarrés qui ornent son livret. Surtout, Manu Chao s’amuse, envoie des cartes postales de ses stations aux quatre coins du monde, en trois langues, français, anglais, espagnol. Une envolée à dos de country (13 dias), des pogos et du gros son à gogo (El Kitapena) mais aussi d’époustouflantes ballades, rumbas catalanes au lyrisme amoureux (Otro Mundo, Mala Fama, A Cosa). L’éclectisme de l’œuvre, pourfendeur de l’ennui, se révèle grâce au style Chao, si reconnaissable. Avec une mention spéciale pour la pépite Me llaman calle.
Si l’artiste réfute l’adjectif "engagé" qu’on persiste à lui coller, il lance pourtant des brûlots, dans la veine de The Clash : contre l’Amérique (Rainin In Paradise), contre la politique (Politik Kills).Un combat sincère ? Peu importe ! Le message, empreint d’une naïveté et de clichés que l’on ne peut qu’aimer, laisse croire, encore, à l’utopie, et en l’émergence d’un monde meilleur.
Pour Manu Chao, La Radiolina serait le dernier CD, l’ultime support de ses chansons avant d’imaginer un nouveau mode de diffusion, comme une "petite radio", susceptible d’accueillir ses créations directement en ligne. Le site de l’artiste accueille déjà la "tévélina" au contenu évolutif, qui diffuse le clip Rainin In Paradise, chevauchée autocaresque révolutionnaire, réalisée par Kusturica.
La Radiolina, opus passionnant, affirme donc ses arborescences, avec, au centre, cette question posée par l’insaisissable Manu : "Y ahora qué ?" ("Et maintenant quoi ?"). On pourrait, pour rire, lui renvoyer la question. On préfère se contenter de ses réponses, le suivre au gré de ses périples : un voyage en train, un western, la tournée des bars barcelonais. Et regarder au travers des fenêtres, un monde qui parle d’amour, de révolte, et de football. De la vie, bien sûr. Cette aventure.
Manu Chao La Radiolina (Because Music/Wagram) 2007