De Zap Mama à Sally Nyolo
Elles sont nées en Afrique mais ont grandi en Europe. Elles se sont toutes deux faites remarquer en donnant à leurs voix les rôles principaux. Liées aussi par quelques années passées ensemble sur scène, Zap Mama et Sally Nyolo reviennent dans l’actualité avec leurs albums respectivement intitulés Supermoon et Mémoire du monde.
Nouveaux albums pour les deux chanteuses
Elles sont nées en Afrique mais ont grandi en Europe. Elles se sont toutes deux faites remarquer en donnant à leurs voix les rôles principaux. Liées aussi par quelques années passées ensemble sur scène, Zap Mama et Sally Nyolo reviennent dans l’actualité avec leurs albums respectivement intitulés Supermoon et Mémoire du monde.
Apparaître, puis disparaître. Comme la lune. Dans le cycle de cet astre qu’elle aime à regarder, Marie Daulne voit les étapes successives que traverse l’être humain en général, l’artiste en particulier. L’inspiration va et vient. “On a besoin par moment d’être dans l’ombre, de se cacher, puis de réapparaître. J’ai remarqué que ma carrière fonctionnait sur ce mode”, observe la chanteuse de Zap Mama, le groupe auquel elle a donné vie il y a dix-sept ans.
L’expérience américaine, ces trois années passées aux Etats-Unis qui avaient débouché sur Ancestry in Progress en 2004, l’ont amené à un constat : “Après avoir fréquenté beaucoup de célébrités, je me suis dit que je n’étais pas une superstar”, affirme-t-elle. Elle préfère se voir en "supermoon", une super lune. La nuance ? “Ne pas être esclave d’un système où il faut répondre à une demande, se trahir pour pouvoir vendre ou être dans le coup. Etre vraie.” De ce néologisme, elle a fait le nom de son sixième album.
Pour la première fois, elle en a trouvé le titre avant même d’avoir le contenu. L’idée de départ lui a servi de philosophie tout au long des deux années de travail qu’a nécessitées Supermoon, enregistré pour l’essentiel outre-Atlantique, entre New York et San Francisco. Alors que son précédent disque était marqué par la soul et le rap, cette fois Marie Daulne semble se situer à équidistance des points cardinaux qu’indique sa boussole musicale : ses racines africaines, son goût pour la musique noire américaine mais aussi ses attaches européennes.
Si Affection évolue sur un territoire déjà exploré sur Bandy Bandy en duo avec Erykah Badu, Kwenda est une des chansons congolaises que lui a apprises sa maman, celle qui a entretenu le lien avec le continent qui l’a vue naître. La Belgique, le pays où elle a grandi, est présente avec le chanteur Arno, venu apporter sa touche facilement identifiable sur Toma Taboo. “Ça peut surprendre”, concède Marie. “On ne nous avait jamais associé mais on est de grands potes.” Autre invitée prestigieuse, Meshell Ndegeocello vient jouer de la basse sur ce même morceau inspirée de la guitare entendue sur Pay Back de James Brown, l’une des idoles de la Zap en chef.
Zap Mama est un nom qui résonne encore avec une sonorité particulière aux oreilles de Sally Nyolo. De la fin de l’année 1992 à Noël 1996, la chanteuse camerounaise a fait partie de la bande de filles emmenée par Marie Daulne dans une aventure a cappella dont le succès fut considérable. Leurs routes se sont séparées mais, une décennie plus tard, les relations entre elles existent toujours. “Quand je vais à Bruxelles et que j’ai un moment, je vais boire le thé chez l’une ou chez l’autre. Même contractuellement, nous sommes encore liées, si Marie veut faire de l’a cappella”, sourit Sally, qui rappelle aussi que Sylvie Nawasadio, une autre ex-Zap, participe à chacun de ses disques. “Elle y tient et moi aussi.” .
Sally Nyollo rêve en français
Mémoire du monde, le nouvel album de la lauréate du prix RFI Musiques du monde en 1997, ne déroge pas à la règle. Son complice Sylvin Marc, à ses côtés dès ses débuts en solo, est bien sûr de la partie. “C’est un musicien qui m’a beaucoup apporté dans le regard que je devais avoir sur ma musique, à accepter mon côté simple, ludique”, reconnaît-elle. Sideman réputé de la scène jazz world depuis une trentaine d’années, le bassiste et guitariste malgache a trouvé dans le bikutsi camerounais un cousin du salegy de la Grande Île. Sally en est persuadé : “Son background l’a toujours aidé à me servir dans ma musique. C’est le même rythme 6/8, décliné à peine différemment.”
Pour son cinquième album en son nom, la chanteuse s’est rendue dans son pays natal, une fois ses chansons écrites. Un rêve qu’elle caressait depuis longtemps et qui était devenu réalisable depuis qu’elle a ouvert en 2005 son propre studio, installé sur les hauteurs de Yaoundé, avec l’intention d’en faire une passerelle pour favoriser les échanges entre instrumentistes du Cameroun et du monde occidental.
Après y avoir enregistré Studio Cameroon, une compilation d’artistes locaux sortie l’an dernier, elle est revenue pour “capter sur place ces essences qui n’ont plus le même son quand elles voyagent” : des balafons, des guitares, des percussions. Sur ces fondations bikutsi d’appellation contrôlée, elle a placé des textes qui font une place de plus en plus grande au français, autre évolution majeure de Mémoire du monde. “J’aurais pu les traduire en eton et les chanter avec les mêmes orchestrations”, explique-t-elle. “Mais j’ai voulu les faire sonner dans cette langue que j’adore : depuis très longtemps, je rêve en français.” Difficile de lutter contre son subconscient.
Zap Mama Supermoon (Heads Up/Universal jazz) 2007
Sally Nyolo Mémoire du monde (Cantos/Pias) 2007