La poésie de Ludéal
On dit de lui qu’il est le nouvel Alain Bashung de la chanson française. Trois mois après la sortie numérique de son premier album, le disque éponyme de Ludéal trouve enfin le chemin des magasins. Parallèlement à cette sortie, Ludéal s’apprête à défendre ses chansons le 13 février à la Boule Noire à Paris.
La musique qui lui ressemble
On dit de lui qu’il est le nouvel Alain Bashung de la chanson française. Trois mois après la sortie numérique de son premier album, le disque éponyme de Ludéal trouve enfin le chemin des magasins. Parallèlement à cette sortie, Ludéal s’apprête à défendre ses chansons le 13 février à la Boule Noire à Paris.
Ludéal revendique l’importance d’Alain Bashung dans sa musique. Pas forcément comme on serait en droit de l’imaginer. Alain Bashung a été pour lui un point de départ, un élément déclencheur et pas uniquement une simple source d’inspiration. Avec l’album Fantaisie Militaire, Ludéal a pris conscience qu’il était possible d’exprimer ses inspirations en français sous une forme poétique, mystérieuse et alambiquée, qu’il s’évertuait jusqu’à présent à chercher dans l’utilisation de l’anglais.
Son parcours personnel est mouvementé. Ludéal arrête très tôt les études, quitte aussi rapidement le domicile familial et tente l’aventure à l’étranger, lui qui se décrit volontiers aujourd’hui comme un sédentaire. Trois mois aux Etats-Unis et un an en Crète. Il revient en France et multiplie les petits boulots, sans succès. "Je n’avais pas une vision assez carriériste du travail, ça ne m’intéressait pas".
Depuis l’adolescence, Ludéal a découvert un exutoire pour exprimer ses ressentiments, "l’écriture et la guitare comme une nécessité". Dès 20 ans, il s’enferme régulièrement dans sa chambre pour composer des chansons. Avec le temps, il se crée son propre répertoire. Puis vient la révélation Alain Bashung, "je me suis dit que je voulais exister en tant que chanteur, et que si je devais exister, je devais le faire en français".
Les mots de Ludéal
Aujourd’hui, Ludéal a dépassé la trentaine. Il dort peu, se lève très tôt. C’est pendant ces premières heures du jour, entre 4h et 7h du matin qu’il travaille le mieux, la guitare sur les genoux. "Tout est vaporeux autour de moi, tout est calme, je ne me sens pas violenté", il trouve des mots.
Ludéal est devenu homme, avec une conception bien arrêtée de sa nouvelle vie de chanteur. "Le principal pour moi est de ne pas tricher, de faire de la musique qui me ressemble, de mon âge. Je cherche à sortir de l’ordinaire, j’ai envie de faire dans l’onirique, un onirique-poésie". Il aimerait chanter le pays des merveilles mais le monde qui l’entoure l’effraie.
De peur d’ennuyer son auditoire, il masque volontairement ses idées dans un voile d’opacité et tend à multiplier les thèmes. Il cite le travail des Rita Mitsouko, la carrière de Robert Wyatt. Le cinéma tient aussi une place particulière dans son univers, les images le transportent. Des superproductions aux films d’auteurs et leurs moments de silence, ces scènes qui se traînent en longueur et dans lesquels il a le temps de s’imaginer des histoires.
Mais le salut, son catalyseur d’inspirations, celui qui lui a permis de sortir de l’écueil de la chanson douloureuse, il le doit à la poésie. "Je suis régulièrement touché par des mots, des phrases, des associations d’idées qui me permettent ensuite de créer de nouvelles choses". Pour lui qui n’a jamais vraiment beaucoup lu, il était plus facile de s’intéresser à des formats courts. Là réside peut-être le secret du style Ludéal. Il avoue avoir en permanence à portée de mains des recueils de poésie, les surréalistes en particulier, Les fleurs du mal de Baudelaire pour les rimes, mais aussi quelques livres d’Hubert Shelby, de Céline ou de Robert Merle. "J’arrive aujourd’hui à exprimer ce que je ressens, je fais enfin ce que je veux des mots, c’est une certaine forme de revanche pour moi qui ne suis pas un lettré".
Cet attrait pour le format court, on le retrouve jusque dans la durée de son album. 10 titres et 31 minutes au total. C’est ce qu’il voulait, c’est comme ça qu’il compose. Ludéal a même dû se forcer pour rallonger ses chansons avant d’entrer en studio.
Besoin de lumière
Dans ce premier album, il aborde l’amour sous toutes ses formes, Roméo pour Juliette, Ovaire, mais aussi la nostalgie et la mélancolie Si t’es Pin-up, Costume de nonne, Les Lycéennes, et s’immisce dans l’avenir avec La fin du pétrole. Ses textes, il les a soigneusement projetés en musique, arrangements de cordes, rondeurs des rythmiques, oscillant entre chanson et rock, le tout fortement teinté par l’Amérique. "J’ai baigné dans cette culture pendant toute mon enfance. Je suis comme une éponge et ce quelque chose transpire naturellement. C’est le bon visage des Etats-Unis, les grands espaces, le côté mystérieux, la poussière, ce que l’on aime de ce pays avec des textes en français. C’était une autre époque, les Etats-Unis d’aujourd’hui sont différents, ce n’est pas ceux que je chante ".
En studio, il a collaboré avec quelques-unes des pointures de la production hexagonale, Renaud Létang (Alain Souchon, Manu Chao, Feist…), Jean-Louis Piérot (Les Valentins, Miossec, Bashung, Daho…) et Frédéric Lo (Daniel Darc, Stéphane Eicher…). "Ils m’ont apporté cette lumière dont j’avais besoin pour mes chansons. Ils faisaient leur travail, je faisais le mien, un peu comme des artistes qui se retrouvent pour une jam". Aucune pression de ce côté-là pendant l’enregistrement, "ce que j’ai trouvé difficile par contre, c’est ce besoin d’être décontracté pour bien chanter, décontracté alors que tu sais que tu es en train de graver quelque chose d’indélébile".
En éternel insatisfait, Ludéal attend avec impatience le moment de monter sur scène pour donner un nouveau corps à ses chansons. Les ventes de disques ne sont plus à ses yeux un critère suffisant pour juger de la notoriété ou du succès d’un artiste. "Je serai pleinement rassuré le jour où il y aura une poignée de gens qui aimeront ma musique et qui se déplaceront à mes concerts, le jour où je saurai qu’il y a un noyau dur qui est prêt à me suivre. Je suis très excité par ces concerts, j’attends ça avec impatience".
Ludéal (Jive/Sony Bmg) 2008
En concert le 13 février 2008, à la Boule Noire, Paris