Raphael, tranquillement pop
Aujourd'hui, Raphael sort Je sais que la Terre est plate, son quatrième opus en studio. Le chanteur a lui-même réalisé le tiers de son album, en confiant le reste à Tony Visconti et Renaud Letang. Couleurs variées donc, des Antilles à l’Europe centrale, mais avec toujours la manière si singulière qu’a Raphael d’écrire des mélodies pop enlevées et sensibles à la fois. Rencontre avec un chanteur populaire passionné de Bowie, avec un Parisien voyageur, avec un artiste à succès angoissé…
Quatrième album en studio
Aujourd'hui, Raphael sort Je sais que la Terre est plate, son quatrième opus en studio. Le chanteur a lui-même réalisé le tiers de son album, en confiant le reste à Tony Visconti et Renaud Letang. Couleurs variées donc, des Antilles à l’Europe centrale, mais avec toujours la manière si singulière qu’a Raphael d’écrire des mélodies pop enlevées et sensibles à la fois. Rencontre avec un chanteur populaire passionné de Bowie, avec un Parisien voyageur, avec un artiste à succès angoissé…
RFI Musique : Vous avez travaillé pour trois chansons avec le producteur Tony Visconti. Encore une fois un familier de David Bowie… Il vous a raconté beaucoup de choses ?
Raphael : Il adore parler de ses disques avec Bowie, il a même écrit des bouquins là-dessus. J’avais déjà posé beaucoup de questions à Carlos Alomar (guitariste le plus fréquent des albums de Bowie depuis 1974) quand il était venu en 2004 sur Caravane. Et puis j’ai fait une tournée acoustique avec Mike Garson (pianiste de Bowie de 1972 à 1974) que j’avais aussi assommé de questions. Avec Visconti, j’étais un peu à court de questions, c’est lui qui a parlé le plus.
Et comme producteur ?
Un mec attachant, hyper gentil, très musicien. Il ne rentre dans rien de passionnel. Il reste très froid, très professionnel. C’est l’anti-Phil Spector. Visconti, c’est comme François Rauber, l’arrangeur de Brel, mais dans le rock : il peut écrire un truc pour quatuor à cordes en vingt minutes. Il a une approche musicale très technique, ce qui n’est pas du tout le cas des gens avec qui j’avais travaillé jusque là.
Et Renaud Letang, qui a réalisé trois chansons de l’album ?
Renaud est un peu plus un bidouilleur. Il est plus proche de ce que je peux faire chez moi – mais en beaucoup mieux.
A l’écoute, on vous sent plus sûr de vous dans vos choix musicaux, comme si vous affirmiez plus fermement vos options ?
Pourtant, c’est sur ce disque que j’ai le plus laissé la porte ouverte vers l’extérieur. Quand on travaille avec Visconti et Letang, on leur laisse faire leur boulot. J’ai réalisé tout seul cinq titres : quand les options qu’ils me proposaient ne me plaisaient pas, je réalisais moi-même. Mais j’étais très ouvert, avec l’envie qu’ils m’amènent autre chose que ce que je savais faire. Quand je tournais en rond dans mon petit système, j’avais besoin de travailler avec quelqu’un d’autre. Le problème avec moi en studio, c’est que je suis dans le doute en permanence, je ne vais pas à fond dans une idée, je suis tout le temps dans le repentir, je commence toujours une autre piste. Ça rend les gens dingues.
On dit que vous allez répéter vos premiers concerts à La Réunion ?
Je suis fasciné par cette île. J’ai découvert récemment le chanteur Alain Peters, cet Hendrix réunionnais. Quand on l’écoute, c’est une sorte de bayou au ralenti, on plonge dans la grande magie, dans l’espèce de chagrin mystérieux qui imprègne tout sur cette île. Effectivement, on va monter la tournée et faire les premiers concerts en octobre à la Réunion. Nous serons assez nombreux sur scène, avec des violons, des cuivres. Je voudrais que ce soit un cirque gitan, un peu bordélique, très vivant, avec des choses dans tous les sens.
Faites-vous vos chansons pour être sur scène ?
Je fais des chansons parce que j’aime faire des chansons. Mais je suis toujours dans la convoitise : quand je suis en studio, je veux être sur scène ; quand je suis en tournée, je me dis que j’entrerais bien en studio pour faire un autre disque. Un truc à la Woody Allen…
Justement, aimeriez-vous avoir la même productivité que Woody Allen ?
Un disque par an ? Je n’en suis pas capable. J’aimerais bien accélérer le rythme, être plus dans l’action et moins dans la contemplation. La manière qu’a Woody Allen de faire un ou deux films par an, c’est merveilleux. Mais le marché ne peut pas autant absorber. Un disque qui marche, c’est envahissant, cela s’exploite au moins sur deux ans. Woody Allen n’envahit pas les radios, on ne voit ses films que si on fait la démarche d’aller au cinéma ou de louer le DVD. Alors qu’un succès à la radio, on l’entend partout même quand on ne le veut pas. Il faut laisser aux gens un délai de viduité.
Avant la sortie du disque, l’accueil des médias vous angoisse-t-il ?
Plus que m’angoisser, ça m’intéresse. C’est comme quand je fais une séance de photos avec un mec comme Mondino* : voir comment il m’a vu, m’aide à comprendre des choses sur mon disque. Sans parler de l’angoisse de me faire dégommer, la presse m’aide à comprendre les choses.
Votre album et une de ses chansons s’intitulent Je sais que la Terre est plate. Et, dans la chanson Les Limites du monde, vous chantez : "Je sais que la Terre est ronde" …
Dans ce pays, on est toujours plus ou moins pris dans une logique cartésienne. J’aimais bien arriver avec cette idée que les choses ne sont pas ce qu’elles semblent être. Puis dire que la gravité gagne toujours.
* célèbre photographe français
Ecoutez un extrait de
Je sais que la Terre est plate (EMI) 2008
En tournée dès le mois de novembre 2008 et en concert le 12 décembre à Paris Bercy