Kaya
Neuf ans après la disparition de Kaya, l’album Mo enkor la… (Je suis encore là, en créole) rappelle que l’ombre de la star du seggae n’a jamais cessé de planer au-dessus de la musique mauricienne. Sur ce disque en forme d’hommage, toutes les parties musicales ont été entièrement rejouées autour des voix originales, accentuant le caractère intemporel des douze chansons.
Mo enkor la…
Neuf ans après la disparition de Kaya, l’album Mo enkor la… (Je suis encore là, en créole) rappelle que l’ombre de la star du seggae n’a jamais cessé de planer au-dessus de la musique mauricienne. Sur ce disque en forme d’hommage, toutes les parties musicales ont été entièrement rejouées autour des voix originales, accentuant le caractère intemporel des douze chansons.
Le 21 février 1999, alors qu’il est sur le point d’être libéré, Kaya est étrangement retrouvé sans vie dans la prison de Port-Louis où il a été incarcéré 72 heures plus tôt pour avoir osé fumer de la marijuana en public lors d’un meeting politique. La triste nouvelle et les soupçons envers les autorités pénitentiaires suscitent un sentiment de colère au sein de la population. En quelques heures, ce petit paradis touristique de l’océan Indien devient un champ de bataille. Jamais le pays n’a connu de telles émeutes depuis son indépendance : trois morts, des dizaines de blessés.
A 38 ans, Kaya n’était plus seulement un artiste mais aussi un symbole. Avec le seggae, croisement du reggae jamaïcain et du séga des Mascareignes, il avait créé le support idéal pour véhiculer un message inspiré directement par les chansons de Bob Marley. Transcendant le communautarisme qui structure la société mauricienne jusque dans son système électoral, ce créole au look rasta était devenu le chantre d’un "mauricianisme" rassembleur. Sa musique et ses idées ont nourri toute une génération qui s’est fait un devoir de prendre le relais et occupe depuis plusieurs années le premier plan sur la scène locale. Aujourd’hui, le nom de Kaya continue d’être fréquemment cité, ses chansons sont souvent reprises dans les concerts… Une présence indéniable, en filigrane, que l’album Mo enkor là… met davantage en évidence.
Sous l’apparence trompeuse d’un best of, ce projet mené à bien par les musiciens mauriciens du groupe Cool Is I est en réalité construit sur un modèle qui rappelle Chant Down Babylon de Bob Marley, paru dix-huit années après la mort du roi du reggae. Des morceaux enregistrés par Kaya, seules les voix ont été conservées. Le reste a été entièrement refait, avec de nouveaux arrangements parfois sensiblement différents mais qui – et c’est là la clé de la réussite artistique – restent tout à fait fidèles à l’esprit original de chaque chanson.
L’entreprise de rénovation, qui a nécessité de longs mois de travail, garde à la fois le côté roots du seggae avec ce qu’il faut de percussions tout en ayant la consistance musicale et le son d’une production de qualité. Ce savant dosage empreinte autant à Seggae Nu la Misik, le premier album de Kaya réalisé en trois nuits dans les studios de Radio Korail à La Réunion en 1989, qu’à Seggae Experience, sorti neuf ans plus tard. Racin Pe Brilé, Fam Dan Zil, Lampir Universel, Mo La Mizik… : les titres sélectionnés sur Mo Enkor Là… sont aussi parmi les plus représentatifs de l’œuvre du chanteur, lequel ne s’est jamais gêné pour recycler et renommer bon nombre de ses compositions qui existent donc déjà dans plusieurs versions !
Certaines remontent au tout début de sa carrière, comme Ras Kouyon, une irrésistible mélopée à travers laquelle perce les influences indiennes de la culture mauricienne. Sur cette chanson qui a presque valeur d’hymne, les toasters d’Otenttik Street Brothers ont été invités pour un duo virtuel avec le créateur du seggae. Si les quatre garçons sont les leaders actuels de la scène mauricienne, ce sont également les gardiens les plus actifs de la mémoire de Kaya.
Ecoutez un extrait de
Kaya Mo Enkor Là… (Harbour Music Shop) 2008