Tahiti 80, les retrouvailles pop

Stars de la pop au Japon, le groupe Tahiti 80 publie son quatrième album, Activity Center, après les aventures solitaires de plusieurs de ses quatre membres. Rencontre.

RFI Musique : Fosbury, votre précédent album, révélait vos influences soul. Ici, avec Activity Center, il s’agit d’un retour aux fondamentaux de la pop ?
Xavier :
Nous étions allés un peu loin avec Fosbury dans la production et dans le mélange de genres musicaux. Nous avons conçu ce disque de A à Z, contrairement au précédent, qui avait été mixé par des collaborateurs de N.E.R.D. Ce disque est plus recentré sur nous-mêmes, sur les bases du songwriting : écrire et enregistrer à l’ancienne, en allant à l’encontre de notre tendance à polir le son.
Médéric : Les gens étaient souvent étonnés de la différence entre nos concerts et nos albums. Cet album réconcilie le groupe de scène et le groupe de studio. Les arrangements sont un peu simplifiés, c’est plus brut et plus direct.

Xavier a fait un album solo sous le nom d’Axe Riverboy. Comment a été vécue cette parenthèse ?
Xavier : Après Fosbury, nous ne savions pas trop dans quelle direction aller. J’avais envie de voir de quoi j’étais capable tout seul. Cela fait longtemps qu’on se connaît, on a appris à jouer ensemble, nous faisons partie de Tahiti 80 depuis plus de 15 ans… On voulait savoir si nous pouvions exister sans les autres. Cet éloignement m’a aussi permis de lancer des pistes que l’on a utilisées sur Activity Center.
Médéric : Le projet solo de Xavier a permis à tout le monde de se lancer dans d’autres aventures. Car dans un groupe, chacun a une facette musicale un peu différente, qui ne peut pas pleinement s’exprimer.
Xavier : Pedro s’est lancé dans son projet electro-dub avec MaRadioStar, Médéric dans des expérimentations electro lo fi avec Rainbow Dogs…

Que pensez-vous de la pop française ? Sébastien Tellier, Air ou Phoenix…
Xavier : Nous nous sentons surtout proches d’artistes que nous avons enregistrés dans notre studio, le Tahitilab, comme Fugu, qui vient de Nancy, et Calc, originaire de Bordeaux. Nous avons les mêmes exigences en termes d’écriture de chanson. Nous n’avons pas grand chose en commun avec Sébastien Tellier par exemple. Il a un côté musique de films des années 70 et 80, il joue un peu le dandy français façon Gainsbourg… Je ne suis pas sûr que nous fassions la même musique.
Médéric : Quand j’écoute Tellier ou Air, puis des rééditions de disques de Gainsbourg ou de musiques de films, les références sont très visibles, ils reprennent beaucoup de thèmes ou d’idées d’orchestration de cette époque. Je pense qu’il y a beaucoup d’affinités entre Phoenix et Tahiti 80, mais on ne les a jamais rencontrés.

 

Comment s’explique votre étonnant succès au Japon ?
Xavier :
Nous avons eu la chance d’être adoubés par Cornelius, la grande star indé japonaise, qui avait placé un de nos titres sur sa compilation, peu de temps avant la sortie de notre premier album Puzzle, en 1999. Au moment de sa commercialisation, nous nous étions rendu compte que nous vendions plus de disques à l’export au Japon qu’en France ! La chanteuse Kahimi Karie nous a demandé de produire des chansons, puis notre titre Hard Beat a rencontré un vrai succès à la radio et dans les charts. Nous sommes passés à la télé, MTV ou NHK, et beaucoup de journaux rock crédibles nous ont interviewés.
Depuis, nous avons gardé notre base de fans et l’avons élargie : aujourd’hui, la presse généraliste ou des magazines de mode parlent de nous, et nous avons des chansons dans les karaokés.
Médéric : Nous avons essayé de comprendre ce succès, en vain… Peut-être que notre premier album est arrivé au bon moment, quand la pop anglaise était un peu dans le creux de la vague alors que la French touch attirait les regards sur la musique française.

Quel est le sens du titre de votre album, Activity Center ?
Xavier : Cela vient du nom d’un jouet Fisher-Price ! Une tablette tout en un, avec des cadrans et plein de jeux. Notre studio est un peu à cette image, nous y avons amassé plein d’instruments de musique. On peut s’y enregistrer comme on veut. Le titre collait bien à la réalisation de ce disque en huis-clos.

Pourquoi ne chantez-vous que l’amour et les filles ?
Xavier : Parce qu’il n’y a que cela de vrai ! (rires) On avait un peu envie de se souvenir de notre vie d’avant Tahiti 80, de l’adolescence, avec nostalgie. Il y a aussi des chansons qui parlent un peu de la réalité du groupe, de l’éloignement, comme Whistle, ce sentiment dont parlait Voltaire : aller chercher quelque chose au bout du monde alors que l’on est très bien chez soi…

Tahiti 80 Activity Center (Barclay/Universal) 2008
Le 7 octobre à la Maroquinerie à Paris et en tournée en France