Jam’ Sahel 2009

Dans le cadre de la Journée mondiale de lutte contre la désertification, le Malien Cheick Tidiane Seck a réuni mercredi 17 juin, dans un parc parisien, quelques dizaines de musiciens dont Amadou & Mariam ou encore So Kalmery pour prendre part à la 6e édition de la Jam’ Sahel, un concert gratuit à l’initiative de l’organisation non gouvernementale SOS Sahel.

Les artistes réunis pour une noble cause

Dans le cadre de la Journée mondiale de lutte contre la désertification, le Malien Cheick Tidiane Seck a réuni mercredi 17 juin, dans un parc parisien, quelques dizaines de musiciens dont Amadou & Mariam ou encore So Kalmery pour prendre part à la 6e édition de la Jam’ Sahel, un concert gratuit à l’initiative de l’organisation non gouvernementale SOS Sahel.

En appuyant sur le bouton de l’ascenseur qui monte au studio de répétition, Cheick Tidiane Seck prévient : le concert prévu le lendemain va se faire "à l’arrache". Mais les yeux rieurs du vétéran malien laissent deviner que travailler presque sans filet est une situation qui ne l’inquiète aucunement. Et quand il constate quelques instants plus tard qu’il est, avec le percussionniste Madou Koné, le premier arrivé sur place alors qu’il a lui-même plus d’une demi-heure de retard, cela ne le perturbe pas davantage.

Il en profite pour essayer les claviers installés dans la pièce, attendant patiemment ceux qu’il a sollicités pour ce rendez-vous destiné à préparer leur prestation commune sur scène. "Ça m’aide à avoir une ébauche de conducteur, pour être plus à l’aise, même si je crée la synergie sur place le jour", explique celui qui fait office de maître de cérémonie de la Jam’ Sahel depuis la première édition. Pour lier les univers musicaux variés de tous ses invités, il a sa méthode : "Avec une certaine section rythmique, je mets en place des tourneries qui correspondent à plein de grooves du monde entier. Si les musiciens savent s’écouter, la magie est possible."

Une action de sensibilisation

Cette fois encore, ils sont nombreux à avoir répondu à son appel pour apporter leur contribution à l’action de sensibilisation menée par SOS Sahel qui agit dans six pays d’Afrique. Dans le Parc de Choisy situé au cœur du quartier chinois de Paris, le coup d’envoi du concert est donné comme d’habitude par l’Angolais Lulendo avec son likembé, piano à pouces qui étonne les enfants massés devant lui aux premiers rangs. Assis devant ses deux claviers, Cheick Tidiane Seck dirige les opérations, fait tourner les effectifs : son vieux complice Amadou Bagayoko prend sa guitare tandis que le Camerounais Brice Wassy se met à batterie et que Jean-Philippe Rykiel s’installe avec son synthé pour un hommage à Fela.

Puis c’est au chanteur guitariste congolais So Kalmery de venir enrichir ce collectif de circonstance qui a su instantanément trouvé un terrain d’entente. Par le regard, parfois par les gestes, le chef d’orchestre fait passer ses consignes aux musiciens. Rejoint par Mariam, Amadou interprète avec son épouse le titre Africa qui figure sur leur dernier album, avant d’enchaîner pour le plus grand plaisir du public par Dimanche à Bamako, dans une version afro-groove aussi improvisée que séduisante.

Blick Bassy, Queen Etémé, Mokhtar Samba, le reggaeman nigérien Salim Jah Peter et bien d’autres feront tour à tour leur apparition. Pendant plus de quatre heures, tous se mettent au service de cette communion pour le Sahel, ponctuée par les interventions du poète conteur Amadoun Tandina. Ils sont par moments jusqu’à dix-sept à jouer ensemble !

A 22 heures, le batteur algérien Maamoun Dehane donne ce qui devait être le dernier coup de baguette au final étourdissant emmené par Mohamed Diaby, candidat de la première édition de l’émission malienne Case Sanga, dont la voix est tout simplement impressionnante. Mais personne ne semble pressé de partir, et comme Baba Sissoko vient tout juste d’arriver, Cheick Tidiane Seck propose à son compatriote de conclure la soirée avec un solo de n’tama, le petit tambour d’aisselles. Petit à petit, les autres percussionnistes s’installent derrière, et les voilà à nouveau dix sur scène ! On n’arrête pas aussi facilement une Jam’ Sahel…

Deux questions à Cheick Tidiane Seck

Chef d’orchestre et véritable colonne vertébrale de la Jam’Sahel, ce pilier de la scène musicale africaine n’hésite pas à défendre les causes qui lui tiennent à cœur.

RFI Musique : La désertification, concrètement, qu’est-ce que ça évoque pour vous ?
Cheick Tidiane Seck : Quand je suis né en 1953, mon pays était vert. J’ai vu ensuite l’arrivée de la sécheresse, de 1968 à 83, et j’ai vu les mêmes paysages mourir à petit feu, le fleuve Niger se dessécher d’année en année. Donc, je suis extrêmement sensible à cette cause, et je sais ce que ça signifie comme précarité pour les gens qui ont besoin d’eau. On parle d’écologie, d’effet de serre, de défense de la nature, mais on doit commencer par ne plus continuer à faire les fous. Parce qu’il y a des gens qui meurent.

Faire passer un message en musique, est-ce votre conception du rôle que les artistes doivent jouer ?
On ne peut pas se substituer aux ONG, ce n’est pas notre devoir. Notre vocation est d’attirer l’attention sur l’urgence de cette situation. C’est pour ça que, chaque année, je bloque la date du 17 juin sur mon agenda et je ne prends aucun autre engagement. C’est une cause noble qui métrite d’être défendue. Je me suis impliqué de la même façon que lorsque j’étais aux premières loges pour soutenir les sans-papiers il y a quinze ans. Et dans un futur très proche, ce sera pour venir en aide aux enfants des rues en Afrique. Il est temps de penser à tout cela de façon très concrète, pas seulement dans un souci de marketing mais pour se dire : qu’est-ce qu’on fait ? Ça doit être le quotidien de tous les humains. J’ai envie de fédérer les énergies autour de ces causes-là, à travers l’outil que le bon dieu m’a donné : la musique.