Manou Gallo au féminin pluriel

Ivoirienne installée de longue date à Bruxelles, Manou Gallo a choisi de s’exprimer sous une forme musicale qu’on ne lui connaissait guère pour son troisième album intitulé Lowlin : l’ancienne bassiste de Zap Mama qui prenait plaisir à martyriser son instrument passe ici en mode acoustique, accompagnée pour l’occasion par un groupe presque exclusivement féminin.

Album acoustique et nouvelle équipe

Ivoirienne installée de longue date à Bruxelles, Manou Gallo a choisi de s’exprimer sous une forme musicale qu’on ne lui connaissait guère pour son troisième album intitulé Lowlin : l’ancienne bassiste de Zap Mama qui prenait plaisir à martyriser son instrument passe ici en mode acoustique, accompagnée pour l’occasion par un groupe presque exclusivement féminin.


RFI Musique : Votre nouvel album, Lowlin, vous a-t-il autant surpris qu’il peut surprendre ceux qui vous connaissaient dans un registre très vitaminé ?
Manou Gallo : (rires) Non, pas du tout. Au contraire : ça fait quatre ans que je travaille sur cet album acoustique et tout ce qui est dessus a été réfléchi, mûri. Dans ma vie, il y a des cycles. Avec Dida, le premier album, je voulais montrer mes attachements, mes racines. Ensuite, sur le second, je voulais qu’on voie cette musicienne engagée, enragée. Pendant longtemps, mon souhait était de très bien jouer de la basse, d’être reconnue pour cela. J’avais besoin de passer par le côté rythmique parce que je suis une femme de rythmes. Aujourd’hui, je ne suis plus dans cet état d’esprit. J’avais envie de faire un voyage à travers le monde, découvrir, écouter, sentir les saveurs, discuter. Lowlin est un album assez posé, calme. Un album tout simplement plus féminin.

Ce côté féminin, est-ce une réminiscence de vos années passées au sein de Zap Mama ?
Oui, sûrement. Zap Mama fait partie de ma vie. Je suis restée six ans dans ce groupe vocal. Ça reste une famille pour moi. D’ailleurs, Marie Daulne, la leader de Zap Mama, est venue chanter sur mon album. Comme Sabine Kabongo, une ex-membre du groupe. C’est vrai qu’il y a beaucoup de voix sur mon disque. Et les voix sont plus féminines alors que le rythme, que j’avais souvent voulu accentuer jusqu’à présent dans ma musique, est plutôt masculin.

Comment s’est constituée l’équipe de musiciennes avec laquelle vous avez menée à bien ce projet ?
Le principal est de trouver les bonnes personnes afin qu’on puisse parler le même langage. Je suis donc allée un peu partout en Europe pour faire des auditions : à Paris, c’était Virna Nova, la guitariste française. A Bruxelles, j’avais travaillé avec Anja Naucler, la violoncelliste suédoise. Lene Noorgaad, la Danoise, c’est carrément ma sœur, elle a travaillé avec moi sur mes trois albums. Ça va faire trois ans que je suis avec ces filles-là sur ce projet. Ça veut dire qu’on a pris le temps de se connaître, de faire des petits concerts, jusqu’à effectuer une tournée d’un mois au Canada. Maintenant, nous sommes rodées.

Sur une même chanson, les textes sont parfois chantés dans de nombreuses langues. Combien y a-t-il de langues différentes au total sur l’album ?
Je ne me suis jamais posé la question mais en fait il y en a vraiment beaucoup ! Français, anglais, swahili, lingala, baoulé, arabe, danois, dioula, dida….Quand je compose, c’est avec ma basse ou ma guitare, et quand je fais appel à un musicien ou un chanteur, il vient avec sa langue, tout ton talent. Je préfère que ça fonctionne comme ça, que chacun puisse se retrouver dans ce qu’il dit. Je ne le fais pas en pensant que ça va être super parce qu’il y aura trois ou quatre langues. Ce qui m’importe le plus, c’est la musicalité, l’émotion. Savoir si cela transcrit bien l’idée que j’avais en tête.

Pour vous, Lowlin est-il un album plus éloigné que les précédents de vos racines ivoiriennes ou y est-il rattaché d’une façon différente ?
Je crois qu’en fait, j’y suis de plus en plus rattachée. Nanan, l’intro de cet album, c’est la première mélodie de basse que j’ai composée dans ma vie, ma toute première composition. Donc c’est complètement lié à mon histoire. Je trouve qu’il y a beaucoup plus de rythmes afros dans cet album, j’ai même un peu fait de rumba congolaise… Mais que je fasse de l’afrobeat, du funk ou du reggae, il y a un coté Manou Gallo qui ressort de manière spontanée, parce que j’ai une manière de fonctionner qui est toujours la même : tu sens la basse et la base rythmique qui est un peu complexe. La colonne vertébrale est toujours là, qui garde aussi un côté mélancolique.

Est-ce là, les fondements de votre identité musicale ?
Quand tu écoutes fort mes chansons, tu entends la tristesse qu’il y a dedans. Peu de gens le comprennent et du coup, par moment, c’est difficile de continuer à travailler cette musique parce que je me sens découragée, je me dis que je me plante, que ce que je fais ne plaît pas… Mais je tiens à rester fidèle à moi-même. Le jour où j’arrêterai de faire des albums, je continuerai à jouer ma basse. Et je lui en mettrai plein la tronche !

Manou Gallo Lowlin (IglooMondo) 2009

En concert le 29/3 à Bruxelles, le 17/04 à Anvers (Belgique)