Françoise Hardy

Un vingt-sixième album de Françoise Hardy, La pluie sans parapluie, est forcément un événement : elle seule sait perpétuer son univers fragile avec des collaborateurs compositeurs de la nouvelle génération, qui se mettent au service de sa voix unique.

La pluie sans parapluie

Un vingt-sixième album de Françoise Hardy, La pluie sans parapluie, est forcément un événement : elle seule sait perpétuer son univers fragile avec des collaborateurs compositeurs de la nouvelle génération, qui se mettent au service de sa voix unique.

Dans les années 80, elle avouait que Décalages serait son dernier album, et le point final d’une carrière qui lui pesait. Quelques années et albums plus tard, La pluie sans parapluie est son vingt-sixième disque studio, et la grande Françoise, adoubée comme modèle par la génération des Daho, persiste avec bonheur dans la chanson.

La signature de Calogero sur le premier titre, Noir sur blanc fait naître un frisson, tant on ne s’attend pas à retrouver le chanteur de variétés consensuel dans l’univers ouaté de Françoise Hardy. Mais on est vite rassuré par cette mélodie au service de sa voix de brume, et cette ambiance surannée où l’interprète "vouvoie" l’objet de son sentiment (Je ne vous aime pas,  est de la même écriture à l’ancienne).

C’est avec son complice de quelques années, Alain Lubrano, qu’elle écrit pourtant l’essentiel de ce disque. Avec quelques escapades, du côté de La Grande Sophie, qui lui signe un Mister à la mélodie sans risque, et d’Arthur H qui offre Les Mots s’envolent. Mais aussi de Ben Christopher, autre ancien complice, pour le très lent Esquives, et encore Jean-Louis Murat pour Memory Divine, comme son nom l’indique chanté en anglais dans le texte, de façon scolaire mais touchante.

On notera enfin Thierry Stremler et Pascale Daniel, pour une paire de chansons, l'un et l’autre étaient déjà sur Tant de belles choses. Réalisé avec Edith Fambuena et Dominique Blanc-Francart, La Pluie sans parapluie est un nouveau chapitre de cette déjà longue histoire. On n’y sursaute pas devant la nouveauté, la matière est boisée, acoustique, et tout entière au service des mots et de la voix de la Grande.

Quelques accords de rock s’invitent à la réception (Les Pas), mais ils lui vont aussi bien au teint. Depuis Tant de belles choses, en 2006, on sait que le public qui achète encore des disques passe volontiers à la caisse, pour montrer sa fidélité, ou simplement son envie de vibrer avec cette voix unique et si familière, avec laquelle elle semble d’ailleurs plus en confiance que jamais.

Elle module, appuie, interprète, joue avec souplesse de son phrasé (Je ne vous aime pas), alors que les aficionados se contenteraient juste de ce grain unique et révéré. C’est un album pour ceux qui ont le temps, qui ne consomment pas la musique en tant qu’application sonore de la vie actuelle. Il faut se retrancher pour en saisir la saveur et la goûter. Un disque comme autrefois, avec un son soigné et de l’émotion. Mais surtout une élégance comme on n’en fait plus.

Françoise Hardy La pluie sans parapluie (EMI) 2010.