Waga Hip Hop à Paris
Après dix années d’activisme au Burkina Faso, le festival Waga hip hop a invité pour une soirée parisienne le 17 décembre, Movaizhaleine, Djanta Kan, Lassy King Massassy ou Negrissim à célébrer une victoire commune : la place désormais incontournable du hip hop d’Afrique.
Les festival a 10 ans
Après dix années d’activisme au Burkina Faso, le festival Waga hip hop a invité pour une soirée parisienne le 17 décembre, Movaizhaleine, Djanta Kan, Lassy King Massassy ou Negrissim à célébrer une victoire commune : la place désormais incontournable du hip hop d’Afrique.
Le contraste est total : au festival Waga Hip Hop à Ouagadougou, le thermomètre flirte souvent avec les 40°, mais ce vendredi 17 décembre, à Paris, il neige dru. Le froid polaire n’empêche heureusement pas les retrouvailles : les rappeurs du Mali, du Cameroun, du Togo ou du Gabon sont tous passés sur la scène du Waga Hip Hop, s’y sont croisés, découverts, ont freestylé ensemble. Dans les loges, Ali Diallo le directeur du festival, salue chacun chaleureusement. Ce soir, pour fêter ses 10 ans, le festival s’offre une soirée exceptionnelle à Paris, avec à l’affiche un échantillon de la première génération du hip hop francophone d’Afrique.
Plateforme
Le centre Fleury-Barbara accueille un plateau d’artistes tous familiers du festival :D’de Kabal et Franco Manara (France), les Djanta Kan (Togo), Lassy King Massassy (Mali), Les Negrissim (Cameroun) et Movaizhaleine (Gabon). En dix ans, le Festival Waga Hip Hop a servi de trait d’union entre les rappeurs d’Afrique de l’Ouest et centrale et a accompagné la montée en puissance des cultures urbaines dans la société.
Lassy King Massassy, du Mali explique : "Ce festival est une plateforme pour nous. Tous les rappeurs se le sont appropriés. Le hip hop est né à la fin des années 80 en Afrique et nous sommes ceux qui l’avons mis au monde. Il est passé par différentes cérémonies d’initiation de l’âge enfant, jeune, à aujourd’hui où le hip hop est adulte. Nous les anciens du hip hop, on peut tout dire. On nous écoute vraiment désormais."
Les Djanta Kan du Togo ont bénéficié d’ateliers de formations autour du son, qui ont accéléré leur professionnalisation. Au début des années 2000, les Negrissim ont fait une halte de plusieurs mois à Ouaga dans leur longue route de Yaoundé à Dakar – en bus, taxis brousse, mobylette. Au festival Waga Hip Hop, ils ont trouvé une scène ouverte, preuve que la famille hip hop savait reconnaître les siens.
Groove
Pour Ali Diallo, le directeur du festival, "cette soirée à Paris est une vitrine des rappeurs talentueux qu’il y a en Afrique et qui sont peu connus en Europe". Dans le public, on rencontre beaucoup de jeunes du quartier, venus pour "l’open mic" de milieu de soirée, mais aussi des aficionados de hip hop, attirés par cette affiche peu courante dans les salles parisiennes.
Malgré vingt courtes minutes de scène par groupe, chacun imprime sa marque de fabrique. D’ de Kabal prend de court les jeunes avec ses raps politiques et ses beats instantanés, Djanta Kan fait monter la température en puisant son inspiration dans les rythmes traditionnels du Togo. Avec son flow de mitraillette, Lassy King Massasy impressionne sur un beat jungle, tandis que les Negrissim, en pleine forme, s’éclatent sur scène et font groover la salle.
Avec leur célèbre morceau Nous, -un équivalent africain du Demain, c’est loin d’IAM- les Gabonais de Movaizhaleine, prouvent également que le hip hop d’Afrique sait prendre la parole pour toute une génération de jeunes désœuvrés, au Gabon, et plus largement partout en Afrique.
Negrissim sur la scène du centre Barbara-Fleury
Les rappeurs Camerounais ont donné en vingt minutes un aperçu de leur talent : bon son, énergie décapante, un groove unique.
Negrissim est l’un des secrets les mieux gardés du rap d’Afrique. Connus et attendus par le public camerounais, dakarois, ou ouagalais, les Negrissim sont pourtant assez peu connus du grand public français… Le groupe né au Cameroun à la fin des années 1990, a publié deux albums : Appelle ta grand-mère, en 2000, et La Vallée des Rois en 2009, où il chronique avec humour et poésie l’Afrique urbaine, rurale et sont les dignes fils de leur époque.
Comme des millions de Camerounais, ils ont grandi dans l’atmosphère plombée du "parti unique" : avec humour, les Negrissim se proclament alors "rappeurs uniques" ! D’Afrique, ils regardent aussi la mondialisation, les paradoxes et l’absurdité de notre temps, etc. A rebours de tous les clichés – même ceux du hip hop- les rappeurs de Negrissim chantent en souriant, avec comme objectif d’amener la joie dans les cœurs…
Volontaires, déterminés et un peu fous, Sadrak, Evindi, Sundjah et Boudor -qui ne fait plus partie du groupe – ont pris la route en 2001, de Yaoundé direction Dakar : la capitale du hip hop d’Afrique francophone. Dans ce voyage, ils découvrent leur Afrique et une matière inépuisable pour leurs morceaux : les kilomètres de poussière offre des rimes sublimes. En panne sèche de moyens, ils échouent à Ouaga, et trouvent la scène du Waga Hip Hop ouverte, tissent des connections… Après deux ans de voyage, ils arrivent enfin au but : Dakar. Ils y rencontrent DJ Max, un Français, avec qui ils façonnent des beats sur mesure. Ils samplent Ali Farka Touré, Boubacar Traoré, Alpha Blondy ou des chœurs pygmées… Depuis un an, les Negrissim voguent entre l’Europe et le Cameroun, et préparent un nouvel abum pour le printemps 2011.