Musique et Festival mondial des arts nègres
Pendant trois semaines, la crème des artistes africains, brésiliens et de la diaspora est concentrée à Dakar et à Saint-Louis pour célébrer les arts nègres. L’Haïtien Wyclef Jean, l’Américain Marcus Miller, le Camerounais Richard Bona… En tout, 250 groupes de 50 pays se produisent sur trois scènes : la place de l’Obélisque, la biscuiterie de Médina et le Monument de la renaissance africaine. Aziz Dieng, le commissaire de la Commission Musique, explique le choix d’une telle sélection.
Interview d'Aziz Dieng
Pendant trois semaines, la crème des artistes africains, brésiliens et de la diaspora est concentrée à Dakar et à Saint-Louis pour célébrer les arts nègres. L’Haïtien Wyclef Jean, l’Américain Marcus Miller, le Camerounais Richard Bona… En tout, 250 groupes de 50 pays se produisent sur trois scènes : la place de l’Obélisque, la biscuiterie de Médina et le Monument de la renaissance africaine. Aziz Dieng, le commissaire de la Commission Musique, explique le choix d’une telle sélection.
RFI Musique : le Festival mondial des arts nègre se veut très ambitieux en ce qui concerne la programmation musicale. On y retrouve par exemple le saxophoniste camerounais Manu Dibango, le groupe guinéen Bembeya Jazz, ou encore la chanteuse béninoise Angélique Kidjo. Qu’est-ce-qui a guidé ce choix ?
Aziz Dieng :
Comment s’est opérée la sélection ?
Nous avons tenu à représenter les grandes influences qui ont marqué les esthétiques musicales contemporaines sur le continent. C’est le cas de la musique sud-africaine, camerounaise, de la rumba congolaise, de la musique capverdienne, de la pop musique sénégalaise, du raï et de la musique de la vallée du Nil… Ensuite s’est ajoutée la programmation de chaque pays hôte.
Avec l’esclavage, les musiques d’Afrique ont noué des mariages d’amour avec d’autres idiomes musicaux. De ces rencontres là sont nées de nouvelles musiques qui à leur tour ont influencé d’autres musiques d’Afrique. C’est le cas du jazz, du blues et de ses dérivés, du zouk, de la musique brésilienne. Il fallait rendre compte de toute cette vitalité, pour montrer la contribution du monde noir au patrimoine musical universel.
Vous faites aussi la part belle aux artistes américains. Est-ce que cela signifie que vous les assimilez au concept d’ « arts nègres » ?
Oui. Ces musiques sont nées de rencontres. Prenons l’exemple du jazz. Ce courant est issu d’une rencontre entre l’Afrique et l’Occident. Si le jazz a emprunté à l’Europe ses harmonies, l’apport essentiel –l’improvisation, les rythmes- viennent d’Afrique.
Mais lorsqu’on interroge les rappeurs africains, on constate que leur source d’inspiration vient plutôt du continent américain...
Oui. Quand on évoque le monde noir, on ne peut pas oublier les populations des Etats-Unis. Les grands rappeurs américains se réfèrent toujours à la tradition antérieure, au jazz, au gospel, au r'n'b. C’est vrai que le fil qui lie toutes les musiques n’est pas toujours visible. Mais en y regardant de près, on se rend compte que tous les courants ont un lien avec le continent africain. Lors du festival, les rappeurs américains ne cessent d’évoquer leurs "sources", leurs "origines".
Ce festival présente aussi un musée, le Centre des musiques noires. Comment est né ce projet ?
Ce projet a été conçu par Mondomix, un magazine français multimédia traitant de la musique. Il y a aussi eu une collaboration avec une équipe brésilienne, puisque le premier projet s’inspire du Centre des musiques noires de Salvador de Bahia. Le but était de montrer l’apport des Noirs à la civilisation universelle. C’est un musée multimédia sans objets palpables qui retrace toute l’évolution du patrimoine musical noir. Il s’agit d’un parcours à travers des pièces qui présentent chacune un aspect de la musique noire à travers la vidéo et le son.
Inviter près de 250 groupes n’est pas chose aisée. Plusieurs artistes se plaignent de désagréments, de manifestations déprogrammées, de cachets qui auraient été signé ou négociés tardivement…
Ce sont les problèmes d’un succès et non d’un échec. Après plusieurs reports, le festival mondial des arts nègres avait fait naître un scepticisme. Au début, ce programme ambitieux n’a pas attiré beaucoup de monde. C’est seulement deux semaines avant le festival que les gens se sont rendu compte que le festival aurait effectivement lieu. Les artistes se sont précipités en n’avertissant pas à temps. Nous avons alors réalisé la dimension extraordinaire que le festival allait prendre. Le début du festival a été difficile. Mais pour l’essentiel, les scènes et les rencontres prévues ont eu lieu.