The Serge Gainsbourg Experience
Le bassiste Brad Scott se métamorphose en chanteur pour une promenade énergique et turbulente dans le songbook de Gainsbourg, sous la juste appellation de The Serge Gainsbourg Experience.
Entre Paris et la pop anglaise
Le bassiste Brad Scott se métamorphose en chanteur pour une promenade énergique et turbulente dans le songbook de Gainsbourg, sous la juste appellation de The Serge Gainsbourg Experience.
Comme beaucoup de musiciens, Brad Scott a un jour croisé Serge Gainsbourg. C’était sur un plateau de télévision et, puisque le temps est souvent long dans ce genre d’endroit, ils se sont mis à parler de musique – toutes les musiques.
Études de musique classique, fracas punk, années de contrebasse avec Arthur H, Alain Bashung ou Jacques Higelin, multiples aventures sporadiques : on a souvent qualifié Brad Scott de plus francophile des musiciens anglais, mais il est peut-être surtout le plus anglais des musiciens français.
Autrement dit, Brad Scott a comme un sens inné de l’électricité et de la nuit, en même temps que l’instinct de la splendeur insolente et du geste classieux. Et, s’il s’attaque au répertoire de Gainsbourg, c’est assez naturellement avec une pogne bien ferme et de belles poses de chanteur d’après minuit. Avec The Serge Gainsbourg Experience, Brad Scott s’est en effet installé dans la peau du frontman.
Chanteur fervent qui fait un peu penser aux grandes voix glam rock des années 70 (les aigus en moins), il s’est entouré d’un groupe efficace dominé par les guitares acérées de Gul (ci-devant leader de Guldeboa) et il a demandé à Boris Bergman (lui aussi anglophone de naissance et auteur, avant ses chansons pour Bashung et d’autres, du Rain and Tears d’Aphrodite Child) de traduire quelques chansons du beau Serge en anglais.
Il se trouve que, quand on l’aborde aujourd’hui, près de vingt ans après sa mort, une des plus fortes singularités de l’œuvre de Gainsbourg est sa diversité formelle, son extraordinaire foisonnement de genres et de couleurs qui résume plusieurs décennies de musique populaire en France, de la Rive gauche et du jazz jusqu’au funk et au rap, en passant par le yé-yé, la pop ou le reggae.
Mais Brad Scott emporte toutes ces nuances avec une solide fantaisie et une énergie de hussard. Contact, Comic Strip, Initials BB ou I Just Came to Tell You I’m Going (la version anglaise de Je suis venu te dire que je m’en vais) s’habillent de puissantes guitares, Ma Lou Marilou se ballade dans un magasin de jouets musicaux à la Thomas Fersen manipulés avec l’entrain de timbaliers de la garde à cheval (mais quel joli timbre, cette Celia Scott !), La Chanson de Prévert se transforme en chanson de bar avec un ukulélé furieux et un grand coup d’accordéon ivre de danse… Et le single Requiem pour un twister retrouve les fragrances canailles d’un jazz de bas-fond. Un disque musqué et ragaillardissant, à mille lieues des hommages en pantoufles qu’on entend trop souvent.
The Serge Gainsbourg Experience (La Lune Rousse-Socadisc) 2011