La Phaze en version originale
Après un tournant punk-rock contestataire, La Phaze revient aux machines et transforme son image avec Psalms and Revolution. Moins frontal, le groupe angevin laisse de côté le discours revendicatif, mais que les fans se rassurent : l’énergie débridée est toujours là, de même que leur fusion si singulière entre jungle, rock et surf music. Entretien.
5ème album du trio pungle
Après un tournant punk-rock contestataire, La Phaze revient aux machines et transforme son image avec Psalms and Revolution. Moins frontal, le groupe angevin laisse de côté le discours revendicatif, mais que les fans se rassurent : l’énergie débridée est toujours là, de même que leur fusion si singulière entre jungle, rock et surf music. Entretien.
Douze ans après ses débuts, la Phaze continue de surprendre son auditoire. Avec Miracle, leur précédent album, on croyait Damny et ses comparses prêts à raviver la flamme d’un rock français engagé, si longtemps mis sous l’éteignoir. Mais, après deux ans de tournée et l’escapade en solo de son leader, le groupe a décidé de changer de cap. "On sortait d’une période un peu difficile, concède Damny. L’enchaînement des concerts, la pression sur nos épaules après Miracle nous a un peu épuisés. On a alors pris quinze jours dans un gîte en hiver, en plein milieu de notre tournée, pour bricoler des sons, maquetter tous azimuts et retrouver cet esprit ludique qui nous avait un peu échappé."
Repartis de zéro, les trois musiciens ont peu à peu ébauché leur futur album sur leurs ordinateurs, à partir de samples, de bouts de voix ou d’idées de mélodies. "Là où Miracle a été conçu dans l’urgence, en live, Psalms and Revolution s’est construit dans la durée, un processus de plus d’un an, à huis-clos", explique Arnaud, guitariste. Le résultat ressemble à un retour aux sources avec la réapparition des boucles drum and bass, genre électronique passé de mode, redevenu un ingrédient essentiel de la musique de La Phaze. "La drum and bass est revenue dans l’underground, explique Damny. C’est aussi un style de plus en plus affilié à d’autres musiques, comme le rock. C’est exactement notre démarche : aller vers la fusion des genres, se libérer des archétypes."
Moins de discours, plus de musique
On retrouve donc les "classiques" du groupe, comme ces très belles guitares surf sixties distillées tout au long de ce nouveau disque. Mais il y a aussi de vrais effets de surprise. Les mélodies pop remplacent les harangues hip hop et la contestation politique a quasiment disparu au profit de textes plus vagues, majoritairement en anglais. Une façon de remettre la musique au premier plan ? "Certainement, répond Damny. Cette image de groupe représentatif de l’extrême-gauche a fini pour nous peser. Notre musique n’intéressait plus trop les médias. Ce qui comptait pour eux, c’était notre avis sur Sarkozy, que l’on a déjà donné cent fois ! Mais cela ne change pas mes convictions, et je ne me cache pas derrière l’anglais, il y en a d’ailleurs toujours eu dans La Phaze, ajoute le chanteur. Simplement, je n’ai plus envie de faire d’explications de textes, ou d’être affilié "rock français" à vie. Notre public étranger ne comprend pas le Français."
On aura donc peine à trouver un équivalent à des chansons coup de poing comme La Cause ou Miracle. Le fan notoire y croisera même les thématiques les plus inattendues : Temps de chien, le texte le plus marquant de l’album, traite du déni de grossesse. "C’était l’époque de l’affaire Courjault, se souvient Damny. J’ai toujours été intrigué par ces gens qui ont une surface sociale, mais gardent en eux un secret terrible, toute la souffrance que cela implique de le cacher à soi-même et aux autres. Comme beaucoup de gens, cela m’interpelle." En résumé, les images ont remplacé les slogans, et c’est bien cela que suggère l’artwork symboliste de la pochette, signé d’un jeune graphiste photographe, Hamzat.
Lassés des étiquettes
La Phaze cherche à se renouveler, mais l’étiquette "alternatif" leur colle à la peau, et le terme serait devenu péjoratif dans les médias français. "Dans ce pays, tu reçois une étiquette, tu la gardes à vie ! Mais on revendique d’où on vient. Aujourd’hui, je sens une certaine hostilité envers l’alternatif, ça n’est plus "fashion", observe Damny. C’est peut-être la couleur politique qui veut ça. Reste que la mise en pause de Noir Désir a un peu enterré le mouvement, l’a ramené dans l’underground."
Même son de cloche sur l’engagement altermondialiste : les trois musiciens assument le leur (on se souvient de l’opération Colère Noire en faveur des victimes du naufrage du pétrolier l’Erika sur la côte bretonne en 1999), mais refusent la catégorisation facile. "Pour moi, le terme "altermondialiste" ne veut rien dire, conteste Arnaud. On nous a collé cette étiquette à cause de notre participation au festival du plateau du Larzac (un grand rassemblement altermondialiste initié en 2003 par la Confédération paysanne de José Bové, ndlr). Et puis nous croyons davantage aujourd’hui aux petites initiatives locales. S’engager avec Greenpeace nous intéresse moins qu’avant." Loin des grands discours, La Phaze redevient donc une implacable machine à danser : à juger sur pièce lors de la prochaine tournée !
La Phaze Psalms and Revolution (Couvre Feu/Because) 2011
En tournée en France à partir du 1er juin