Charlotte Gainsbourg, au plus près d’elle-même
Après s’être offert les services de Air pour 5.55 (2006), et de Beck pour IRM (2009) Charlotte Gainsbourg s’associe sur ce disque, avec le musicien électro SebastiAn. Sur Rest, elle chante aussi pour la première fois en français et signe tous ses textes. Charlotte lève enfin le voile…
Peu de disques firent couler autant d’encre, cette année, que le dernier-né de Charlotte Gainsbourg, Rest, entre chroniques dithyrambiques ("un disque somptueux, impudique, ample, gainsbourien", s’extasie Les Inrocks) et critiques virulentes ("ça coule comme du Mylène Farmer aphone sur fond d’électro soft", rétorque Télérama). Dans les pages des magazines, sur les ondes des radios, sur les plateaux télé, Charlotte se raconte jusqu’à l’overdose, livre ses doutes, murmure ses errances, chuchote sa quête du "rest", ce repos des âmes aimées, et sa traque d’elle-même : forcément touchante… parfois jusqu’à l’auto-parodie.
Contrastes émotionnels
Difficile, alors, de poser sur les pistes du disque, des oreilles et une émotion vierges. Pour la première fois, Charlotte, 46 ans, écrit ses propres textes, s’aventure vers le français, osant l’approche timide des mythique terres paternelles. Dans ses mots parfois crus, dans son verbe entre violence et tendresse, elle s’offre impudique, chante son père dans son cercueil (Lying with you), la disparition de sa sœur (Kate), l’amour fou pour ses enfants (Dans vos airs), ou cette balade au cimetière du Montparnasse, demeure de ses chers disparus (Oxalys).
Autour de ses douleurs, de sa voix fragile, ténue, de ce souffle qu’éclaire ce filet solaire d’éternelle jeunesse, s’érige, telle une cathédrale pop baroque, la musique électro de SebastiAn, jeune poulain fétiche du label Ed Banger. Autour de la voix de Charlotte, sa création possède cet esprit orchestral, symphonique, cinématographique ; les mélodies s’avancent telles des rêveries chatoyantes ; et dans ce tourbillon grandiose, les mots se fondent… Là, réside le charme de ce disque : dans ces contrastes émotionnels, dans cette confrontation entre mots noirs et sons disco-pop… Les fragilités se dansent, les rythmes groovent sur les failles, et les chagrins de l’âme s’enroulent de couleurs fluo. Au détour de chansons, apparaît parfois, aussi, l’ombre du père, et les accents pop, les contrepoints d’une Melody Nelson.
Un album comme une promesse
Avec un titre composé par Paul McCartney (Songbird in a cage), et la chanson éponyme par Guy-Manuel de Homem-Chrusto (Daft Punk), Rest s’impose comme un disque réussi, aux belles fulgurances. Ni chef d’œuvre absolu, ni ratage donc, il marque assurément un pas supplémentaire dans l’œuvre de Charlotte chanteuse : l’ouverture de nouveaux horizons, et l’annonce de promesses, de belles routes à venir.
Charlotte Gainsbourg Rest (Because) 2017
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