Le Montréalais Jimmy Hunt a mis de côté son projet rock Chocolat pour flirter avec la chanson moderne. Paru à l'automne 2010 au Québec, son disque éponyme est joliment folk et accrocheur. RFI Musique a rencontré cet artiste complet aux dernières Francofolies de Montréal, avant qu'il n'entame une mini-tournée française.
Jimmy Hunt a livré le 14 juin dernier aux Francos de Montréal un spectacle mariant musique et arts visuels qui a bien démontré son intention d’offrir de la chanson "à valeur ajoutée". S’inspirant d’une expérience au Musée d’art contemporain de Montréal en mars 2011, il a refait appel au dessinateur Mathieu Jacques pour accompagner sa performance. Les dessins réalisés en temps réel par l’artiste étaient projetés directement sur le chanteur et son groupe pendant qu’ils interprétaient la totalité de l’album Jimmy Hunt, paru au Québec en octobre dernier.
"C’est comme s’il dessinait sur nous avec de la lumière. Pour les Francos, on a voulu retravailler ce spectacle et exploiter cette idée, mais de manière un peu plus sobre. Pour donner une texture particulière au show", raconte avec enthousiasme l’amateur d’art sous toutes ses formes (il a récemment présenté ses propres croquis à Montréal lors d’une exposition organisée pour souligner les dix ans de son label).
Changement de cap
Musicalement, Jimmy Hunt le disque ne correspond qu’à une partie de Jimmy Hunt l’auteur-compositeur, guitariste, chanteur, harmoniciste. Sur la scène montréalaise, il s’est d’abord fait connaître au sein de Chocolat, un groupe explorant davantage les contrées du rock musclé que la chanson romantique un peu décalée. "Il y avait quand même dans Chocolat des éléments qui ressemblent un peu à ce que je fais maintenant. Au fond, il s’agit d’enlever la distorsion et la guitare électrique, de diminuer le tempo, et ça donne du Jimmy Hunt !", plaisante-t-il.
Avec une base guitare-voix enrobée d’arrangements soignés, les pièces de l’album homonyme traduisent une parenté avec la chanson française des années 1970. Parmi ses influences, Jimmy Hunt cite souvent Gainsbourg, qu’il admire beaucoup, mais aussi Sébastien Tellier et Katerine, dont il salue le minimalisme, l’humour et la capacité de livrer des chansons savamment construites. On décèle également dans Jimmy Hunt des touches de folk américain dans les compositions plus minimalistes où il joue de l’harmonica.
"Je pense que le moment où je suis le plus heureux est quand je compose, révèle le guitariste. Il y a une euphorie quand ça se met à fonctionner. C’est un peu comme de la drogue…" Des vingt compositions pour le CD, il en a finalement retenu treize, des ballades accrocheuses qui révèlent une facette plus douce de lui, avec une délicate instrumentale au milieu (Erzulie Freda).
Chanter au "je"
Ses textes à la première personne, qui parlent surtout de femmes et de relations amoureuses (heureuses ou désastreuses), sont souvent teintés de pointes d’humour, d’autodérision et d’images inusitées, comme c’est le cas du premier single Motocross, d’Annabelle ou de Ça va de soi. "Avant d’écrire, je sais surtout ce dont je n’ai pas envie de parler, comme la politique ou les idéaux. Parler d’un quotidien trop hermétique ou personnel ne m’intéresse pas non plus. Je préfère faire des textes plus universels, où tout le monde peut se retrouver."
C’est donc un mélange d’expériences personnelles et de fiction qui alimente ce "je" très présent dans le disque, mettant pour la première fois le chanteur à l’avant-plan. Une transition qui l’a fait hésiter au début : "Après avoir terminé l’album, je me suis demandé ce que j’avais fait, admet Hunt. J’ai eu l’impression d’avoir manqué de lucidité pendant un instant ! J’ai eu un petit 24 h d’angoisse pendant que le disque était en train d'être imprimé".
L’expérience live
D’octobre dernier à aujourd’hui, les chansons ont subi quelques transformations en live : certaines ont été épurées ou encore dynamisées pour un résultat plus rock. "Rendre sur scène juste des ballades, je trouve que c’est moins intéressant. Parfois, je me demande si c’est pour moi ou pour le public qu’on fait ça ! Je ne suis pas habitué à faire un show trop calme, alors on essaie de mettre un peu de piquant."
L’été réserve à Jimmy Hunt plusieurs participations à des festivals et une succession de show dans des salles de la région québécoise. Aux Francofolies de Montréal, il se produisait avec son groupe complet, mais son concert est aussi proposé en formule duo ou trio, comme ce fut le cas de la mini-tournée française en mai 2011, en première partie de Thomas Fersen.
À quand le prochain disque ? "J’ai assez de matériel pour faire un album, mais pas encore assez pour faire un "bon" album, dit-il à la blague. J’ai envie de m’éloigner un peu de la structure chanson. Ces temps-ci, j’ai tendance à travailler différemment : les textes sont plus courts, la musique prend plus de place. Je ne sais pas encore ce que ça va donner, mais c’est une façon de faire complètement différente…"
En concert à Paris le 26 juin 2011 à L'International et le 29 juin 2011 à La Maroquinerie.