Une montagne suisse de talents

Bastian Baker
© E. Guillet

Les Suisses ont pénétré le marché français avec des artistes aux univers différents, de Stephan Eicher à Sophie Hunger pour les plus implantés aux petits nouveaux comme Célien Schneider et le très médiatisé Bastian Baker, l’éventail des genres est vaste. La suite promet d’être intéressante avec la sortie du premier album en distribution française du groupe de rock Mama Rosin, déjà accueilli en héros en Angleterre avec leur mélange cajun, garage rock, folk et pop en français.

"On a eu une année très riche avec des concerts en Angleterre devant plusieurs milliers de spectateurs". Robin et Cyril du groupe genevois Mama Rosin n’en reviennent toujours pas. Leur album Bye Bye Bayou a été produit à New York par le spécialiste du rock garage John Spencer et se retrouve vendu par paquets de cent exemplaires chaque soir au fil de leur tournée britannique. 

Celle-ci leur a permis de décharger leur musique explosive dans des salles inhabituellement grandes pour ces héros du "garage rock hevéto-cajun". Une tournée en première partie des très populaires Bellowhead. Le groupe va de surprise en surprise, "la BBC, Mojo et le NME parlent de nous. J’ai trouvé notre dernier album parmi quasiment tous les autres dans un bac du magasin HMV de Cardiff et ça m’a fait tout drôle. Donc je l’ai acheté. On lui a fait une déco spéciale" rigole Robin qui goûte aussi une reconnaissance française venue du groupe Moriarty.

 
Leur label Air Rythmo va accueillir la sortie française de Bye Bye Bayou, un disque étendard représentatif de la Suisse multiculturelle ouverte sur le monde et chantant en français (les Mamas s’inspirent du style cajun pour créer un parler-chanter distinctif où les r roulent et les licences poétiques s’entrechoquent). "Moriarty est venu vers nous lors d’un soir d’été à un festival de la région de Lausanne. Le courant est passé et grâce à eux, nous voilà prêts à tourner en France." Ce groupe a le potentiel pour devenir un phénomène à la Louise Attaque ou Lumineers/Mumford & Sons. Le fait de venir de Suisse les rend attentifs, patients et surtout très mobiles. Ils tourneront aux Etats-Unis mais quand le moment sera venu. "Le label de Louisiane Valcour, assez séduit par notre mélange garage rock et rock cajun, est intéressé." 
Le son très festif et original de ce trio qui branche le mélodéon dans un ampli de guitare contraste avec une artiste zurichoise qui ne cesse de surprendre. L’originalité du timbre de voix folk de Sophie Hunger, son intensité sur scène comme sur disque n’est plus à prouver. Après un voyage aux Etats-Unis (comme Mama Rosin), la chanteuse a publié chez Universal Jazz en France et son label suisse, Two Gentlemen, un très bel album jouissant d’une côte impressionnante The Danger of Light. Il a pris la deuxième place des classements de ventes dès sa sortie en Suisse. 
 
La contagion touche la France avec un album qui est entré dans le Top 60 et des concerts programmés dans une dizaine de villes françaises dont la Cigale et un soutien indéfectible de la presse musicale. Les chansons d’Hunger trouvent aussi un écho chez les Anglo-Saxons, preuve de la vivacité internationale des artistes suisses. 
Autre grosse surprise pour les Helvètes : la Lausannois Bastian Baker parti pour être l’une des plus grandes stars Made in Switzerland en France après Patrick Juvet et Stephan Eicher. Son album Tomorrow may not be better a été classé dans le top 100 à la faveur de quelques passages en télé importants comme dans les émissions Taratata ou Danse avec les stars. Son charisme sur scène comme sur les plateaux, mêlée à une plastique digne d’un James Dean du lac Léman et une voix efficace l’a très vite lancé. L’ex-hockeyeur a signé un contrat avec Belleville Music en France, Hallelujah son nouveau single a pris place sur les playlists de plusieurs radios en France. C’est une reprise qui à l’époque de Noël, fonctionne très bien. 
Bastian n’est plus seul à faire carrière en France. Autre signature française d’un artiste suisse qui n’avait pas trouvé preneur chez lui : Célien Schneider. Il a conquis le label Mercury qui l’a choisi pour figurer sur le catalogue Fontana aux côtés de Lulu Gainsbourg et Alain Chamfort.
 
Chanter en anglais, comme pour Bastian Baker, est une évidence dans l’univers pop efficace de Célien. Fontana y a vu un avantage mais le point fort du jeune valaisan est très certainement son univers piano-voix et ses pop songs très anglo-saxonnes, l’homme a adoré les Beatles et des songwriters américains comme Elliott Smith et ça se sent. Il est aussi joli garçon, ce qui ne peut pas faire de mal. La scène suisse a donc de beaux jours devant elle, portée par de nouvelles figures, qu'il faudra suivre longtemps. On l'espère.
Mama Rosin Bye Bye Bayou (Moi J’connais/Air Rytmo/L’Autre Distribution) 2012
Sophie Hunger The Danger of Light (Two Gentlemen/Universal Jazz) 2012
Bastian Baker Tomorrow may not be better (Belleville Music) 2012
Célien Schneider Come Rain or Shine (Fontana/Mercury)2012