Aston Villa se remet à raisonner

Aston Villa se remet à raisonner
Aston Villa © V. Dayan

On n'attendait plus grand-chose d'Aston Villa, groupe qui s'était mis en mode veille après la sortie d'un album live en 2008. Le combo rock, régénéré et à nouveau remanié dans son effectif, revient en trio pour ses 20 ans avec le probant Joy Machine. Interview de Fred Franchitti, chanteur qui lui n'a jamais quitté le navire.

RFI Musique : Pourquoi cette si longue absence ?
Fred Franchitti : Après quinze ans de tournées presque non-stop, la lassitude et la fatigue physique sont venues pointer leur nez. Il nous fallait faire un break, vivre d'autres choses. Lors des derniers concerts, il y avait moins de désir. Le public commençait à le voir et cela ne servait à rien d'insister ou de se forcer.

Qu'avez-vous fait pendant cette pause Aston Villa ?
J'ai développé vers Marseille - où j'habite – de l'accompagnement d'artistes et du coaching. Je suis devenu le manager du groupe Dissonant Nation en 2011. C'est une belle aventure aussi quand on passe de l'autre côté de la barrière. Il y a un côté transmission qui est très agréable. Et je continue d'être à leurs côtés parallèlement à Aston Villa parce que ça me donne autant de plaisir.

L'envie est-elle revenue grâce à cette expérience ?
Je n'ai pas suffisamment de recul là-dessus. Ce que j'ai appris auprès de ce jeune groupe, c'est cette espèce d'énergie spontanée, cette immédiateté. Et je voulais que ça transparaisse à l'écoute de Joy Machine. Donc, on s'est mis dans ces conditions-là pour nos retrouvailles. Une fois finie Roule vite, la première chanson, on s'est dit que si le niveau minimum était de cet acabit, il fallait y aller.

Avez-vous craint d'être oublié ?
On ne s'est pas posé des questions de cet ordre-là. Par contre, on avait la volonté de faire quelque chose de nouveau, de ne pas utiliser les guitares et le gros son des années 90 qui ont fait la signature d'Aston Villa. On a instauré un cahier des charges avec notamment la voix en avant. Au niveau du son, on s'est mis aussi pas mal d'objectifs. Enfin on a monté notre propre label (Twicky Records) dans le prolongement du management. Pendant ces cinq ans, je suis allé sur le terrain, dans les tremplins, les petites salles... Dans le Sud, j'ai senti qu'une nouvelle scène se créait et s'éloignait du ragga-hip hop. Je me suis senti conspirateur artistique et culturel. J'ai fait de belles rencontres dans tous les styles musicaux.

Estimez-vous qu'il s'agisse de votre album le plus éclaté musicalement ?
Absolument. Cela rejoint la notion de liberté. Dès l'instant où pendant 15 ans tu t'es créé une personnalité, tu as le loisir de faire ce que tu veux. On a pris les chansons comme elles venaient. Elles sont arrivées très rapidement. Il y a eu un gros travail d'écriture des textes au préalable. Avant on procédait différemment : on faisait la musique, des yaourts et enfin les textes. Là, ces derniers étaient prêts à 80% donc c'était moins laborieux.

Jean Fauque a coécrit le texte de Manhattan. Un clin d’œil à votre passion pour Alain Bashung ?
Il avait déjà signé pour nous le texte de Prière en 2002. La période Jean Fauque, c'est ce que j'aime le plus chez Bashung. Jean est un ami qui a toujours gardé le sens de la formule et une approche poétique. Il m'a dit que par la voix, j'étais une sorte de prolongement de Bashung. Le compliment m'a touché droit au cœur.

Aston Villa, c'est un groupe qui n'en finit pas de se recomposer ?
Disons que ça n'a jamais été un long fleuve tranquille (rires). Ici, il y a Greg (batterie) qui est présent depuis 12 ans et Toni (guitare/basse) qui était le backliner d'Aston Villa depuis 2001, mais qui venait faire sur scène la guitare acoustique pour le titre Raisonne. Le même Tonio est devenu réalisateur au studio Davout, là où on a enregistré notre album. Donc, on avait l'équipe pour réaliser nous-mêmes ce disque. Encore quelque chose de nouveau chez Aston Villa.

Comment expliquez-vous néanmoins tous ces changements ?
Il n'y a pas à comprendre. Je suis plutôt dans l'action. Un groupe, c'est comme dans un couple : il y a des cycles. En amour, on dit que c'est sept ans. En ce qui nous concerne, c'est tous les huit ans. Si vous regardez bien, il y a peu de groupes qui ont vingt ans de carrière en France et qui ont la même équipe qu'au départ.

Pourquoi avez-vous conservé le nom du groupe ?
Parce que c'est une marque. Des chansons comme Cortex ou Waiting existent depuis cinq ans. Et j'avais une envie de faire un album solo, mais finalement ça n'a pas pris. Je m'étais mis au travail tout l'été 2009.

Êtes-vous surpris d'être encore là ?
Bien sûr. Avec tous ces hauts et tous ces bas, ce n'était pas gagné. Je trouve que le groupe a bien évolué artistiquement. Et humainement, cela n'a jamais été aussi cool. Dans les albums précédents, c'était assez torturé et écorché. On a mis du temps pour être davantage apaisés. J'ai l'impression qu'on arrive avec un album ambitieux. Il y en aura d'autres après celui-ci.

Aston Villa Joy Machine (Twicky records/Sony Music France) 2014
Site officiel d'Aston Villa
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A écouter : Aston Villa en session live dans La Bande Passante (24/06/2014)