Benoît Dorémus, la vie et tout le reste

Benoît Dorémus, la vie et tout le reste
Benoît Dorémus © L. Lebourg

Benoît Dorémus, fils naturel de Renaud et d’Eminem, a dû malgré tout son talent attendre cinq ans après 2020 pour nous livrer enfin sa quatrième réalisation, En Tachycardie. Élégant titre qui résume bien cet album autobiographique solaire, empli de guitares, de sourires et de soupirs. Revue de détail.

Inventer un rap qui parlerait de tous les états de la dépression nerveuse. Évoquer le Xanax. Effleurer la psychothérapie. Mais garder un sourire en coin, un flow singulier. Impossible ? Non : ce rap existe. Il s’intitule 20 milligrammes. Son auteur ? Benoît Dorémus, un jeune homme bien élevé qui a marché sur les traces de Renaud. Un jeune homme bien propre sur lui, qui se marre en proférant des gros mots. Un jeune homme sensible. Un beau gosse dont toutes les petites fiancées se sont écartées.

"Les antidépresseurs, sourit Benoît, c’est un thème pas très courant qui me tenait d’autant plus à cœur. Un jour, l’angoisse m’a rattrapé. Je voulais écrire une chanson qui en parle, et qui parle aussi de tous les gens qui vont voir un psy. Il fallait que cette chanson soit un exutoire." Avec sa rythmique heurtée et son trop-plein de mots, 20 milligrammes remplit parfaitement cette mission. Et ravit son public, tout comme l’album dont elle est issue : En Tachycardie. Le pays des cœurs qui battent trop vite et trop fort. Celui de Benoît Dorémus.
D’autres solides moments ponctuent cet album : d’abord Aïe ouille, impeccable mélodie, rythme nerveux et auto dérisoire authenticité qui parvient à faire oublier l’échec amoureux. Au bout de dix-sept secondes, écoutez bien le banjo qui arrive : c’est simplement celui de Francis Cabrel… Les grinçants couplets sur la vie d’artiste de Bêtes à chagrin résonnent en écho au roman de l'écrivaine Paule Constant. Ils rejoignent Brassens en pleine poire et La femme de ma vie, remake émouvant et souriant de La Fleur aux dents de Joe Dassin pour asséner que le manque n’épargne personne. Celui d’amour, bien sûr : "Je raconte dans cet album ces dernières années, marquées pour moi de hauts et de bas, de claques aussi, en souhaitant en faire sourire."

En témoigne le second rap enthousiasmant de En Tachycardie : Dernièrement, acte V des chroniques de la vie "dorémienne", commencées dès le second album en 2007. Cette emballante Tachycardie rebondit enfin sur Lire aux chiottes, joyeuse autobiographie d’un grand lecteur. "Je voulais faire un peu respirer l’album, précise Benoît. Le texte de Lire aux chiottes m’est venu très vite, et l’idée d’en confier la musique aux frères Boisnard, les deux rigolos d’Archimède, s’est tout de suite imposée. C’était aussi une occasion de faire un clin d’œil à ma famille."
Dorémus Benoît, quatrième d’une fratrie de cinq, naît le 20 mai 1980 à Besançon, la ville de Victor Hugo et de Tristan Bernard. "J’ai toujours eu, à la maison, une ambiance musicale et littéraire, confie Benoît. Ma mère, professeur de Lettres, est une énorme lectrice. Mon père, un homme extrêmement sensible, jouait Ferré et Brel à la guitare. Mes frères m’ont fait connaître Police, les Beatles et surtout Renaud : la grosse claque, dès mes cinq ans, avec Morgane de toi…" Renaud sera le premier parrain de Dorémus : "C’est mon sauveur, celui qui m’a mis le pied à l’étrier. Sans son adoubement, je ne sais pas ce qui se serait passé."

Benoît, jeune licencié en Arts du spectacle (cinéma), choisit la musique en 2003. Concerts dans les bars, premier album autoproduit, Pas en parler. Il rencontre Renaud fin 2005 par l’entremise du sarcastique Suisse Sarcloret. Il a sous le bras, son album. Renaud adopte Benoît, le fait signer chez EMI et produit en 2007 son second disque, Jeunesse se passe. Suivront cinq années de rêve : tournée, concerts, troisième album en 2010, prix Francis-Lemarque de la SACEM, tournée Seuls à trois avec ses potes Renan Luce et Alexis HK
Puis soudain, en 2012, le trou : le quatrième album, déjà rodé en tournée, ne trouve pas preneur. "La chanson n’est plus le premier souci de l’industrie du disque, se désole Benoît. L’attente était un supplice. Je n’avais pas le moral, je prenais mes 20 milligrammes, je voulais tout arrêter. Le lendemain, Francis Cabrel appelle mon éditeur pour lui dire qu’il voulait m’aider. Il m’invite une semaine chez lui. Un immense cadeau. Je revis."

Francis Cabrel avait rencontré Dorémus en mai 2014 grâce à ses Rencontres d’Astaffort et avait pu apprécier son talent d’auteur et d’interprète. "C’est mon second parrain, sourit Benoît. Les pistes attendaient depuis 2013. Il m’a aidé à finaliser."  Ne restait plus qu’à sortir le disque. Sans producteur, Dorémus, jeune homme moderne, fait appel au financement participatif : bingo !

Le résultat, nous l’avons aujourd’hui entre les oreilles. Charme, émotion, sensibilité, autodérision communicative : il est de toute première instance que nous adorions Benoît ! Benedictum adoremus !
 
Benoît Dorémus En Tachycardie (Déjà/ BMG) 2016
Site officiel de Benoît Dorémus
Page Facebook de Benoît Dorémus 

En concert les 23, 24, et 25 mars aux 3 Baudets