CQMD: la bombe funk
Vingt-cinq ans après leurs débuts, la bande tonitruante de Ceux qui marchent debout revient avec un neuvième disque qui perpétue le secret de leur formule magique : funk, groove et bonne humeur ! Le fondateur et banjoïste Superclark revient sur cette sacrée aventure qui délie les hanches et ouvre les chakras.
Lorsqu’ils enflamment La Nouvelle-Orléans, leur Mecque musicale, les sept membres de Ceux qui marchent debout (CQMD) reçoivent parfois cette vanne, en forme de compliment, de la part de leurs amis musiciens américains : "Vous êtes tellement old school qu’en fait vous êtes en avance !". Une boutade paradoxale qui décrit plutôt bien ces dinosaures de la funk sauce française aux riffs contagieux, ces pionniers de la "fanfare moderne", ou "fanfare à écouter" – entendez ni "militaire", ni "scolaire", ni "ouvrière". Depuis un quart de siècle, leurs cuivres en folie, leurs caisses claires, et leur énergie embrasent les clubs, les bars, les rues, terrassent tout sur leur passage. Car voilà, depuis un quart de siècle, CQMD ne s’écarte pas d’un iota de leur route initiale, cet étroit fil conducteur strictement "groove".
Le même titre, en mieux
A l’orée de la sortie de leur neuvième disque, Don’t Be Shy, Superclark, maître ès banjo, fondateur du brass band au discours émaillé de références amoureuses à Duke Ellington et James Brown, le confirme : "Avec l’âge, on laisse tomber le côté bourrin, on s’affine : meilleures mélodies, meilleurs grooves. Mais, au final, on essaie de faire toujours mieux l’éternel même titre !". La formule de leur potion ? Il la récite d’une traite : "Funk de la Nouvelle-Orléans, funk-funk, soul, rock-steady, soupçons de reggae, d’afrobeat, d’influences caraïbo-cubaine. Bref, toute la grande musique afro-américaine du XXe siècle avant l’apparition du disco (1975, ndlr), qui a tristement remis le groove sur le temps, binarisé et simplifié le son".
Car CQMD aime la musique qui chaloupe, en équilibre ténu sur la pulsation, ces pieds de nez aux musiques qui marchent au pas, ces invitations à délier les hanches. Leur maître mot ? Le funk. Superclark le décrit ainsi : "C’est James Brown, qui l’a inventé avec Papa’s got a brand new bag. Après deux minutes trente de chanson, il reste sur le même accord pendant des plombes ! Oubliées la grille et les harmonies : le groove, seul, s’empare de tout, en une sorte de transe répétitive, exaltante. Même Miles Davis était jaloux ! Le funk, c’est atemporel, ça ne se décrit pas, c’est un état d’esprit, ça se choppe !".
Soyez pas timides !
Un état d’esprit, voici aussi ce qui guide CQMD. Le titre de leur dernier disque lance donc ce message : Don’t Be Shy, "Soyez pas timides". Ainsi, ceux qui avouent ne jamais répéter (ou presque) pour conserver l’énergie et la fraîcheur intactes, invitent-ils leur public à embrasser la musique de manière frontale : pleine face, sans "chichis". "Les bébés dansent le cul en arrière, dit Clark. Les Français se relèvent en grandissant, ils redoutent leur sensualité !".
Docte, il ajoute : "Ecouter de la musique, danser, remuer ses fesses, équivaut aux besoins primaux et physiologiques obligatoires, comme manger, boire, dormir !". Se grattant la tête, il ose enfin cette comparaison : "Avant le XIXe, la poésie était un art majeur, pratiqué et aimé par tous. Depuis Jules Ferry, son entrée à l’école, son étude, l’a éloignée des foules… L’art doit s’adresser au cœur et au corps".
Une bombe de bonne humeur
Un côté brut, des vibrations balancées pleine balle, Clark perçoit donc leur musique, la plupart du temps diffusée depuis la salle, au beau milieu de la foule, comme une bombe de bonne humeur, une attitude "politique" pour contrer la sinistrose ambiante. "Nous avons tourné dans plus d’une trentaine de pays, et nous pouvons affirmer que la France se porte bien ! Fils d’un Américain qui juge tout formidable et d’une Aveyronnaise hantée par le sens du drame, je vois, pour ma part, le verre à moitié plein : habité par un optimisme indéboulonnable !".
Lui et ses copains des CQMD ouvrent donc leur disque avec le titre Mojo : cette notion impalpable, ce charme, cette chance, ces coups du sort bénéfique, ce swing qui hantent ceux qui dansent sur la vie ! Pour le reste, CQMD nous fait passer par toutes les couleurs – reggae, soul, punk-funk. "Georges Clinton nous a bien dit qu’il ne fallait jamais faire l’amour sur le même tempo", rigole Clark.
Le banjoïste sent-il le poids des années, analyse-t-il ces 25 ans passés sur les scènes du monde entier, du Cambodge au Moyen-Orient, de Cuba à la Hollande en passant par toute l’Afrique ? Aujourd’hui, les membres disséminés en province, composent chacun deux titres dans leurs coins ; le fonctionnement du groupe oscille toujours entre la démocratie la plus extrême et des phases dictatoriales, mais au final sa réponse s’avance, claire : "On s’en fout ! Nous sommes dans le présent, l’ "ici et maintenant". Quand tu montes sur scène, c’est toujours nouveau, c’est toujours la première fois ! Dès que ça démarre, ça remonte : un coup de passion, des frissons…". Depuis 25 ans, CQMD propagent leur foi funk intacte : impossible de résister à leur contagion qui fait frémir les pieds… Let’s dance !
CQMD Don’t Be Shy ! (En même temps) 2016
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