Ishtar, l’ode à la joie

Ishtar, l’ode à la joie
Ishtar © TF1 Musique

Après quelques années d’absence, durant lesquelles elle s’est consacrée à ses enfants, la chanteuse israélienne d’origine marocaine et égyptienne, Ishtar, revient en grande forme avec un nouveau disque, Baila.

Sur du flamenco, sur des musiques orientales ou des accents cubains, en français, en arabe, ou en espagnol, sur des reprises de Souchon, Piaf, Goldman ou Célia Cruz, la chanteuse sacralise Paris, l’amour et la vie. Un disque multivitaminé, multicolore et revigorant. Rencontre.

RFI Musique : Le titre inaugural de votre disque constitue une ode jouissive à Paris, un cri d’amour. Pourquoi ?
Ishtar :
Avant de débarquer à Paris, j’ai voyagé à travers le globe : Londres, l’Australie, etc. J’ai atterri ici, par hasard, pour visiter une amie australienne, sur le chemin du retour vers mon pays, l’Israël. Et là, le choc, le coup de foudre : si fort, que j’y habite désormais depuis 25 ans. De suite, je m’y suis sentie chez moi. Je pouvais rester des heures, assise sur un banc, sans destination précise dans le métro, à observer cette grande ville multicolore, multiculturelle, à m’abreuver, yeux grands ouverts, de son énergie, de ses odeurs, de ses sons, de ses passants. C’était comme si tout mon voyage initial n’avait qu’un but : arriver enfin à Paris, pour connaître cette renaissance, à 23 ans. Là, j’ai commencé à travailler, comme choriste, aux côtés de Julien Clerc notamment. J’y ai connu mon premier public, mes premières radios, premières télés. Pendant de longues années, je vivais la nuit, je sortais dans les clubs, au Quartier latin, rue de Lappe, je rencontrais des artistes… Rien n’avait de limites, et seule la musique nous liait. Paris était une fête : le point d’ancrage où le monde entier (le Brésil, l’Afrique, La Réunion...) se réunissait à travers la communion, les échanges, les sons.

Paris est-elle toujours une fête, selon vous ?
Depuis que je suis maman de deux jumeaux, j’ai franchi cette barrière que je jugeais indépassable : je fais désormais partie des "gens de la journée". J’ai changé de rythme. Le monde, aussi. De Paris à New York, aux terrasses des cafés, chacun fixe son smartphone : les réseaux sociaux amènent plus de contacts, mais au final, nous sommes moins directement ensemble. Dans les grandes villes, tout s’accélère, tout se zappe. Pourtant, j’aime toujours Paris sous la lumière du jour, son cosmopolitisme. Enfin, il y a eu ces drames, le 7 janvier, le 13 novembre. Régnait dans ses rues, une tristesse inhabituelle, une crainte… J’ai choisi de placer mon titre, A Paris, écrit en amont des événements, en ouverture du disque, pour contrer la fatalité. Face aux drames, je voulais un disque fort, joyeux.

Votre disque s’intitule justement Baila, "Danse" : toujours une manière de ramener du soleil, du bonheur ?
Oui ! La danse constitue un langage corporel, qui se déclenche dans un état de joie, de communion, une harmonie de l’esprit et du corps : elle permet de relâcher la pression, d’oublier ses tracas, d’exprimer ses émotions lorsque le langage ne suffit plus. Dans ce disque, je reprends aussi La vida es un carnaval de Célia Cruz. Dans le carnaval, j’aime le tourbillon de cultures, de couleurs, d’accents, la catharsis : toujours cette idée de combattre le malheur.

Des touches de salsa, de la rumba, des accents orientaux, flamenco, de l’espagnol, de l’arabe, du français : votre disque, composé d’une majorité de reprises, voyage sur une multitude de musiques et de langues. Un reflet de votre parcours ?
En effet. Ma mère vient d’Égypte ; mon père du Maroc. Mon grand-père écoutait du flamenco pur, et depuis, la guitare gitane se lie instantanément à son souvenir. En Israël, où j’ai grandi, j’avais une nounou polonaise, des voisins yéménites, d’autres originaires de Russie, de Pologne, d’Italie, de Grèce ! De cette joyeuse population, j’absorbais tous les accents : j’étais douée d’un talent de comédienne, d’imitatrice ! Aujourd’hui encore, je chante en russe, en bulgare, sans en comprendre un traître mot. En moi, s’imposent tous ces voyages, et ma source, bien sûr : les musiques arabes, andalouses, les chants des gitans, si proches des mélismes orientaux…
 
Dans Baila, vous reprenez aussi Édith Piaf (La Foule), Alain Souchon (Foule sentimentale), et Jean-Jacques Goldman (Petite Marie). Quelle est votre relation à la chanson française ?
J’en écoute depuis que je suis enfant : mon père, francophone, était fan de Brel, d’Aznavour, de Piaf… Puis j’ai adoré Véronique Sanson, chanté avec Julien Clerc… De la variété française, que je comprends chaque jour davantage, j’aime l’amour, le romantisme, l’élégance dans les paroles, le double sens, la richesse et le mélange, la force, la sensibilité et la fragilité. Et à l’inverse, la France aime les sonorités orientales, méditerranéennes, colorées…
 
Sur tous vos titres, vous rajoutez une production très moderne, électro-dance. Pourquoi ce parti-pris ?
J’adore ce mélange entre des instruments séculaires, tels le oud, et un son très actuel. J’aime m’amuser. Ce disque clame ma confiance en la vie, invite à la danse, procure du plaisir. Car, en tant qu’artiste, voici ma mission : transmettre du bonheur.
 

Ishtar Baila (Shilav Music/TF1 Musique) 2017
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