Jean-Jacques Goldman

Qu’il y ait un "cas" Goldman, nul n’en doute. Avec un succès ininterrompu depuis le début des années quatre-vingt, à la fois comme interprète ou compositeur pour d’autres (Khaled, Kaas, Pagny, Hallyday…), une fortune enviable et enviée (il serait le seul chanteur français milliardaire) et sa discrétion atypique, Jean-Jacques Goldman est un phénomène. Alors que sort son album Chansons pour les pieds, penchons-nous sur ce qu'en dit la presse française. Savoureux.

Le "cas" Goldman

Qu’il y ait un "cas" Goldman, nul n’en doute. Avec un succès ininterrompu depuis le début des années quatre-vingt, à la fois comme interprète ou compositeur pour d’autres (Khaled, Kaas, Pagny, Hallyday…), une fortune enviable et enviée (il serait le seul chanteur français milliardaire) et sa discrétion atypique, Jean-Jacques Goldman est un phénomène. Alors que sort son album Chansons pour les pieds, penchons-nous sur ce qu'en dit la presse française. Savoureux.

En titrant "Le Cas Goldman" en Une de son édition du 20 novembre dernier, Le Parisien sortait de la chronique louangeuse qui accompagne habituellement la sortie d’un album de star et entendait se porter sur le terrain polémique. Le fait est assez rare pour être remarqué. Sous-titre de l’article : «Chansons pour les pieds ; tel est l’étrange titre de l’album de Jean-Jacques Goldman qui sort aujourd’hui. Le chanteur n’en est d’ailleurs pas à une bizarrerie près si l’on se réfère aux curieuses conditions et exigences dont il a souhaité entourer l’événement. De l’art du faire du marketing en donnant l’impression du contraire…»

Bigre ! De quoi s’agit-il donc ? En page 3, on en apprend plus : «Pour les journalistes désireux de rencontrer l’artiste à l’occasion de la sortie de Chansons pour les pieds, (…) les conditions sont claires : il faut d’abord envoyer une «lettre de motivation» que lui transmettra sa maison de disques (…) puis attendre, patiemment, la réponse. Ensuite, fournir une lettre de la direction de la publication concernée promettant que, le jour de la parution de l’interview, ni le nom ni la photo de Jean-Jacques Goldman n’apparaîtront à la une ou en couverture du journal ou du magazine qui aura recueilli ses propos.»

Saluons ce coup de gueule inattendu de la profession. Nous avons ici même suffisamment fustigé la complaisance de la presse à l’égard de toutes les «promotions» pour abonder dans le sens du Parisien. Reste que le procédé n’est pas nouveau, que Goldman est loin d’être le seul à y avoir recours, et que, comme le dit le quotidien, «trois publications se sont pliées à ces desiderata». Le problème est bien là et on ne voit pas pourquoi les maisons de disques se gêneraient si d’importants médias confondent sans états d’âme leurs pages rédactionnelles et leurs pages de pub.

Pour le biographe Didier Varrod, que cite Libération (23/11/01), il y a bien un problème entre Goldman et la presse : «Dès le début, il y a non communication avec la presse généraliste» dit-il. «Elle voyait en lui un chanteur à minettes, avec des textes à deux balles. Pour moi, c’est un vrai auteur.» Un journaliste anonyme ajoute : «Sa relation aux médias relève d’une déception amoureuse. Comme beaucoup d’artistes de gauche, Goldman pensait que les journaux de même sensibilité politique le soutiendraient ; ça n’a pas été le cas. Au contraire, ces médias l’ont vu se fourvoyer dans la démagogie.» Et Libé de rappeler comment, suite à un article de L’Evénement du Jeudi, en 1985 («Jean-Jacques Goldman est vraiment nul»), l'artiste avait rassemblé toutes ces mauvaises critiques dans une page de presse où il concluait, en s’adressant à son public : «Merci d’avoir jugé par vous-même.»

Et la musique, dans tout ça ? On en apprend plus en lisant Le Figaro (20/11/01) où Bertrand Dicale, avec sa rigueur habituelle, dissèque l’album pour finalement nous laisser entendre que ce ne sera peut-être pas le meilleur de Jiji : « Goldman ne parvient pas toujours ni à s’arracher à lui-même ni à s’attacher à un nouveau territoire, comme lorsque Je voudrais vous revoir (texte émouvant, pourtant) annoncé comme un « zouk lent », n’est sauvé de l’impasse stylistique que par l’intervention musclée du Bagad de Kemperlé, bombardes et cornemuses en tête. » Et Dicale de conclure que, malgré tout, cet album « devrait lui ouvrir une fois de plus la route sereine du disque de diamant, décerné pour un million d’exemplaires vendus. » Marketing, marketing, on n’en sort pas !

Jean-Jacques GoldmanChansons pour les pieds (Sony/Columbia) 2001