Jacques Dutronc, retour sur scène
Dix-sept ans après ses derniers concerts, Jacques Dutronc retrouve la scène, affichant toujours le même laisser-aller désinvolte. Rien de nouveau, mais un répertoire fabuleux – ancien mais fabuleux.
Rien de neuf
Dix-sept ans après ses derniers concerts, Jacques Dutronc retrouve la scène, affichant toujours le même laisser-aller désinvolte. Rien de nouveau, mais un répertoire fabuleux – ancien mais fabuleux.
Le cas de figure est rare. Même Charles Trenet, lorsqu’il fit ses derniers concerts à la Salle Pleyel, en 1999, avait un album récent – dont d’ailleurs il ne chanta rien. Même Henri Salvador, même Charles Aznavour, même Juliette Gréco ont des chansons nouvelles après quatre-vingt ans. Jacques Dutronc, à soixante six ans, remonte sur scène dix-sept ans après ses derniers concerts sans rien de neuf à défendre.
Cela fait de son nouveau concert un spectacle savoureux mais frustrant, roboratif mais curieusement incomplet. Mercredi 13 janvier, pour son deuxième concert au Zénith de Paris, les surprises étaient seulement dans les à-côtés : une danseuse naine tout en rouge, Vincent Lindon en guest star sur Tous les goûts sont dans ma nature, un rappeur assez moyen sur Fais pas ci fais pas ça… Et seulement la chanson-titre de son dernier album, Madame l’Existence, dont le texte amer ("Je voudrais m’acheter une démocratie (…) Vous vous trompez de boutique/Ici c’est pas la République") prend une portée peut-être encore plus forte qu’à sa sortie en 2003.
Pour le reste, le best of est présenté méthodiquement et sans omission notable : Et moi et moi et moi en ouverture du concert et aux rappels, Les Playboys, Il est cinq heures Paris s’éveille, Les Cactus, Gentleman cambrioleur, On nous cache tout on nous dit rien, L’Opportuniste, L’Hymne à l’amour (moi l’nœud), La Fille du Père Noël… Peu de variantes, sauf Catherine Langeais qui a disparu d’Et moi et moi et moi au profit de William Leymergie.
Peu de surprises dans les arrangements, une fois que l’on a compris que l’heure est plutôt rock, avec notamment le guitariste Fred Chapellier et le bassiste Jannick Top – des monuments historiques – invités par Dutronc à ne pas lésiner sur l’électricité. L’affreux son du violon sur J’aime les filles ou le timbre criard du piano synthétique ne parviennent pas à raboter le charme de chansons au génie solidement établi depuis parfois plus de quarante ans.
La voix ne trahit pas le chanteur. Il est vrai que Dutronc a toujours composé en tenant compte de son ambitus étroit dans une tessiture médium-grave qui, en général, résiste bien au temps. Alors les chansons sont bien semblables à tout ce qu’on sait d’elles depuis une éternité. Et même son attitude est conforme à sa légende et conforme aux attentes, avec cette nuance qu’il ne lésine guère. Le chanteur surjoue le grand désinvolte et finit par se faire plus affable que cynique, plus aimable que sarcastique. Au bout du compte, on a l’impression d’être allé vérifier que Dutronc a un des plus beaux répertoires de la chanson française. On peut s’en contenter.
Tournée : le 21 à Albi, le 23 à Pau, le 28 à Lanester, le 29 à Nantes (complet), le 30 à Brest, le 3 février à Strasbourg, le 9 à Saint-Etienne, le 10 à Grenoble.