Julien Clerc

Sortie de Double enfance, vingtième album de Julien Clerc qui, pour une fois, a demandé à ses auteurs (Maxime Le Forestier, Carla Bruni, Etienne Roda-Gil, Jean-Loup Dabadie) de traiter certains sujets.

Double Enfance

Sortie de Double enfance, vingtième album de Julien Clerc qui, pour une fois, a demandé à ses auteurs (Maxime Le Forestier, Carla Bruni, Etienne Roda-Gil, Jean-Loup Dabadie) de traiter certains sujets.

 

 "Je suis arrivé à ce que je voulais, comme si – en gros – c’est moi qui avait écrit les textes, alors que depuis le début j’ai fait exactement le contraire. Avec Etienne

(Roda-Gil : ndlr) , je n’avais pas mon mot à dire et que ça m’avait donné l’habitude – assez heureuse, d’ailleurs – d’attendre et de voir ce que les auteurs allaient m’apporter, de ne pas guider leur plume."

Cette fois-ci, pour Double enfance, il a passé commande, il a demandé à ses auteurs de parler de lui, de ses obsessions, de sa vie – "Il y avait la volonté absolue de guider leur plume."

Chanteur populaire, il se questionne forcément sur ce que deviendront ses chansons, alors Carla Bruni a écrit : "Qu’est-ce qu’on pourra bien dire de moi/Quand j’m’en irai les pieds devant (...) On dira peut-être du mal/On dira peut-être du bien/Le pire serait que l’on ne dise rien/Comme si de rien n’était et puis voilà/Comme deux trois petits tours et puis s’en va ". Enfant de divorcés, sa "double enfance" entre deux maisons a marqué sa vie. Alors, Maxime Le Forestier a écrit : "Elle est pas donnée à tout l’monde/La chance de s’aimer pour la vie/Dix ans, dix mois, dix secondes/Et nous voici/A plonger dans les eaux troubles/De mes souvenirs lointains/Si quelquefois je vois double/C’est que l’enfance me revient". Julien Clerc est ambassadeur de bonne volonté du Haut-commissariat des Nations unies aux réfugiés, et il a demandé à Etienne Roda-Gil d’écrire : "Avoir des droits, avoir un toit/Essayons un jour l’amour/Le jour où chez nous, tu seras chez toi/Réfugié, réfugié/Nous sommes tous, tous, tous/Des réfugiés".

 

    Heureux de ce que lui ont donné ses auteurs, il a – pourrait-on dire – échangé la position d’un Johnny Hallyday, interprète qui a chanté tout et son contraire, pour peu que sa voix et son attitude puisse se couler dans la chanson de l’instant, contre la posture d’un Serge Reggiani, qui n’a jamais voulu écrire ses chansons mais les suscitait volontiers – Sergio, L’Italien, Un enfant de mon âge ... Julien Clerc le dit ouvertement : "Je ne peux pas écrire de chansons." Mais pourrait-il écrire autre chose, à la manière d’un Nicola Sirkis d’Indochine, d’un Mathias Malzieu de Dionysos ou même d’un Adamo, nouvellistes ou romanciers ? "Ça serait presque plus facile pour moi et ça m’intéresserait plus d’écrire comme cela que d’écrire des chansons. Mais je ne vois pas ce que ce que je pourrais écrire d’intéressant sinon moi-même. Or il y a des choses que je n’ai pas envie de raconter, et qui sont certainement celles que les gens ont le plus envie de savoir. Donc je n’arriverais pas à me raconter moi-même."Première collaboration avec Erick Benzi

Pour ce nouveau disque – le vingtième depuis ses débuts, en 1968 –, Julien Clerc a confié la maîtrise d’oeuvre à un nouveau producteur-réalisateur, Erick Benzi, qui lui a été recommandé par Goldman : "Jean-Jacques m’avait dit :  tu verras, c’est le mec le plus gentil du monde. Et il avait raison, ce qui est bien agréable dans un monde où la gentillesse ne court pas les rues. Il avait ajouté deux choses :  Avec lui, ta maquette est toujours sublimée. Et puis il n’est pas chiant, il n’a pas trop besoin de travailler, je l’ai intéressé à tous mes disques – ça c’est bien Jean-Jacques. Il avait raison : j’ai trouvé un type profondément musicien, profondément généreux, qui sert la musique sans ego, qui est très subtil et, en même temps, sait ce que sont les chansons commerciales parce qu’il a fait plein de tubes avec plein de gens. D’emblée, quand il a écouté mes maquettes, il m’a dit : Il n’y a pas de besoin de formatage, on va pouvoir faire de la musique. "

 

 Et, de fait, Erick Benzi a mis en scène Julien Clerc avec sobriété et efficacité, posant la voix au premier plan, demandant au chanteur de se remettre au piano sur quatre chansons (il ne l’avait guère fait depuis longtemps), dénudant les instrumentations et faisant appel à quelques instrumentistes émérites, ici particulièrement attentifs (Loïc Pontieux à la batterie, Hervé Brault et Gildas Arzel aux guitares, mandolines et instruments voisins, Renaud Garcia-Fons à la contrebasse). Le travail sonore a été sans exclusive, multipliant matières et textures : ici une nappe de claviers, là un accordéon, ici des couleurs reggae, là un rire de femme heureuse ... Dans ces climats divers, c’est partout la voix et la mélodie qui dominent, qui portent l’émotion et élargissent toujours le paysage (par exemple dans Place Clichy, très cinématographique panoramique sur un paysage parisien du quotidien). Julien Clerc fait l'artiste

Il retrouvera la scène dans quelques mois, dans les premiers jours de 2006, pour plusieurs mois de tournée intensive dont une douzaine de concerts à l’Olympia. A quelques jours du lancement de son nouvel album, il avoue ne pas trop avoir regardé son programme de concerts. "Il faut dire que cela fait partie des questions que je ne pose pas – depuis trente ans, pas de question sur les ventes, sur le nombre de concerts, sur les recettes. Je demande seulement quelques petites choses, comme de ne pas faire plus de cinq concerts par semaine. Pour le reste, je m’entoure du mieux que je peux parce que je suis quelqu’un d’inquiet et de très sérieux. Mais il y a des choses dont je ne me préoccupe pas, que je découvre au dernier moment. Finalement, je crois que je me suis organisé depuis toujours pour faire l’artiste. Et ça ne m’a pas mal réussi. "

Julien Clerc, Double enfance, CD Virgin-EMI.
Tournée à partir du 4 janvier 2006 (Saint-Germain-en-Laye) avec Olympia du 24 janvier au 4 février.