3 JOURS AU MIX MOVE

Le Mix Move cuvée 99 fut globalement un bon cru. Malgré une accumulation de décibels parfois envahissants, l'événement a permis de faire le point sur une flopée de nouveaux talents et d'innovations techniques. La quatrième édition du salon international du mix est surtout ce moment fort de l'année où les peuplades techno et hip hop apprennent à cohabiter en bonne intelligence.

Le marché aux puces

Le Mix Move cuvée 99 fut globalement un bon cru. Malgré une accumulation de décibels parfois envahissants, l'événement a permis de faire le point sur une flopée de nouveaux talents et d'innovations techniques. La quatrième édition du salon international du mix est surtout ce moment fort de l'année où les peuplades techno et hip hop apprennent à cohabiter en bonne intelligence.

En marge des stands à vocation ouvertement commerciale, certains activistes défendent des projets généreux et ambitieux. C'est le cas de l'association Techno Plus qui milite depuis 1995 pour la réduction des risques liés à l'absorption de psychotropes. En partenariat avec le magazine CODA, Techno Plus continue également de se mobiliser pour la création d'un Laboratoire Culturel Techno à Paris. Autre témoignage de l'émergence d'une culture, le magnifique ouvrage Global Tekno vient d'être publié aux éditions du Camion Blanc. On pouvait consulter et acheter sur place ce précieux recueil de témoignages et de photos consacrés à la scène électronique à travers le monde.

Parallèlement au Mix Move, le Batofar, salle parisienne accueillait quelques surdoués de la nouvelle vague electro. Samedi soir, on a ainsi pu découvrir le trip-hop/breakbeat de Mr Neveux dans une nouvelle formule live en trio plus que convaincante. Tandis que celui-ci et DJ Bertrand s'agitaient comme des pois sauteurs derrière leurs machines, la fille de la bande, Big Ben posait un chant impressionniste et sensuel. C'est sans doute la première fois qu'une voix française s'accouple aussi bien avec les machines. Un nouvel album est prévu en février. On en reparlera.

Le dimanche soir, rendez-vous était pris encore une fois au Batofar pour une soirée Rephlex des plus attendues. Ce label est en effet un des viviers de talents les plus fertiles de la scène electronica britannique. Les deux jumeaux qui forment le groupe D'Archangelo sont pourtant italiens. N'empêche, leur performance évoqua surtout les climats perturbés et crissants chers à Aphex Twin, le barbu dynamiteur de la techno (et fondateur du label). Très mentale et introspective, leur musique n'était cependant peut-être pas le meilleur raccourci pour mettre le feu à la piste de danse.
C'est le Lapon Ovuca qui s'en chargea brillamment. Ce jeune chien fou a administré pendant plus d'une heure de violentes saccades de rythmes saturés et déstructurés sur lesquelles venaient se greffer, de loin en loin, des mélodies simples et aériennes. Plus allumé que ses collègues Squarepusher et Alec Empire, il fallait tout de même oser. Ovuca, 23 ans à l'état civil, l'a fait.

Dans l'enceinte même du Salon, c'est la dimension sonore qui a bien évidemment dominé ces trois journées de rencontres. Techno, house, drum & bass, hip hop, dub : chaque style était illustré par d'éminents représentants français. Une foule éclectique et passionnée piétinait sur la piste de danse de la grande scène lors de la performance jungle de DJ Ben. Pendant ce temps, les connections s'établissaient près des stands. On s'échangeait des coordonnées, des adresses email, des disques, des revues. Tout ce beau monde vibrait, sans retenue, d'excitation digitale.

Quelques images fortes viendront ponctuer l'errance du flâneur entre les travées des exposants : un jeune singe costumé tenu en laisse, le show techno-kitch des Français iconoclastes Golor, une virulente démonstration de scratchs par un DJ d'une dizaine d'années nommé Belleck...on en oublie.

Le (trop) court concert des rappeurs Saïan Supa Crew restera par contre dans les mémoires d'un public littéralement chauffé à blanc par leur concours de boîtes à rythmes humaines. Après une telle frénésie vocale, ces messieurs des stands de matériel Roland, Technics et consorts pouvaient remballer leur camelote.

C'est ce qu'ils finirent d'ailleurs par faire lundi soir, tandis que sur le stand de la Sacem, on sabrait discrètement le champagne. Electronique ou non, la musique fait toujours des heureux...

Nicolas Mollé