Bernard Lavilliers

Trois escales de plus dans la carrière d'un marin sans navire, Bernard Lavilliers, toujours parti dans le but de revenir, autant d'occasions pour mieux découvrir les multiples facettes d'un artiste pas comme les autres. Il se conjugue aujourd'hui au pluriel dans une actualité à retrouver en audio, en vidéo et en littérature.

Escales

Trois escales de plus dans la carrière d'un marin sans navire, Bernard Lavilliers, toujours parti dans le but de revenir, autant d'occasions pour mieux découvrir les multiples facettes d'un artiste pas comme les autres. Il se conjugue aujourd'hui au pluriel dans une actualité à retrouver en audio, en vidéo et en littérature.

Escale au Grand Rex

 

 Son concert commence par ces quelques mots, comme une confession faite du bout des lèvres par le plus baroudeur des artistes de la chanson française, "Pas moi qu'ai fait les voyages, c'est les voyages qui m'ont fait, entre passeur et passage, c'est le métier qui me plait". Bernard Lavilliers se livre d'entrée de scène, sans retenue ni fioriture, avec ce Voyageur en ouverture, comme une ellipse hommage à près de 35 ans de carrière.

Escale au Grand Rex est un spectacle enregistré lors de son passage à Paris en mars 2005 qui montre et démontre que l'esthète n'a rien perdu de sa superbe. Dans une forme toujours aussi enviable, Bernard Lavilliers, jeune homme de 59 ans, épaule large et gueule de rocker, y enchaîne les titres avec facilité. Les derniers succès de son Carnet de Bord témoignent : comme tout grand de ce monde, le garçon sait s'entourer. Sur son dernier album studio, il croisait le fer de son micro avec Cesaria Evora, l'attachante Capverdienne, Tiken Jah Fakoly, le héros du reggae ivoirien et les Femmouzes T, troupe de troubadours au féminin. Sur scène, ils sont tous là pour réinterpréter ces titres phares, Elle chante, Question de peau et Marin. Au moment de jouer les morceaux qui ont fait son histoire, Bernard Lavilliers n'a besoin de personne.

Ses hymnes qu'on a tous surpris au moins une fois virevoltants dans un coin de notre tête, ses chansons à la musicalité venue d'ailleurs, Noir et blanc, Traffic, O Gringo, la Salsa, Stand the Ghetto, Bernard Lavilliers les affronte seul avec son groupe. Un mariage de raison, un mariage de passion, entre un artiste et son oeuvre. Quelques surprises viennent agrémenter ce concert, Bernard Lavilliers accueillant sur scène le guitariste de Mano Solo, Balbino Medellin, pour une version vibrante de ses fameuses Mains d'or, ou ce trio improbable entre Bernard Lavilliers, Tiken Jah Fakoly et Magyd Cherfi interprétant Tonton d'America, un texte écrit par l'échappé de Zebda sur une musique du reggaeman ivoirien. Toutes ces chansons, 22 titres au total, ont été réunies dans un double CD et pour la première fois dans sa longue carrière, Bernard Lavilliers se décline aussi en DVD.

Sur la pellicule, on le découvre lumineux dans son costume noir, polo manche longue et pantalon de cuir, son éternel débardeur remisé au placard. Cette vidéo-concert pêche parfois par un excès de réalisation (plans de coupe incessants et multiplication des effets de caméra) mais l'essentiel est préservé, mettre des images en mouvement sur ses mots. En bonus, La musique de l'intérieur, un documentaire de 26 minutes qui vaut presque à lui seul le détour, sensation grisante d'être une petite souris infiltrée dans les cales des répétitions du spectacle. A noter aussi, dans l'édition double DVD, la présence d'un film / documentaire de 52 minutes enregistré lors de la tournée Americas, cette aventure qui avait conduit Bernard Lavilliers à la rencontre de ces pays qu'il apprécie tant. Pèlerinage musical de plusieurs milliers de kilomètres, entre la chaleur des Caraïbes et les grands froids du Canada où l'on découvre le quotidien d'un chanteur en tournée, partagé entre l'instant présent de ses concerts et les souvenirs de ses histoires passées.

Escales en librairie

 

    L'actualité de Bernard Lavilliers se prolonge sur fond de confidences jusque sur les rayons des libraires. Concocté par Gert-Peter Bruch, photo journaliste érudit lancé sur les traces du chanteur depuis 1988, accompagné dans sa démarche par les clichés de voyages de Thierry Nectoux, ce livre d'art est un mélange fourni de récits, d'interviews et de témoignages exclusifs entrecoupés de photographies de scène et d'images de vie inédites. Une préface en forme de portrait chinois signée de la main même de Juliette Gréco donne le ton, "Si Bernard Lavilliers était une pierre précieuse, il serait une perle de sueur".

Ce très bel ouvrage sobrement intitulé Escales conte et raconte, à la façon d'une biographie romancée, la légende Bernard Lavilliers à travers trente de ses succès. Détaillant les éléments de son inspiration, replaçant ses propos dans leur contexte, ces deux cents pages sont autant d'éclairages originaux sur les visions du monde d'un des grands chercheurs de mots de la chanson française, une mine de renseignements à ciel ouvert qui permet de mieux appréhender entre textes et images tout ce qui fait l'histoire de Bernard Lavilliers.

 

CD : Escale au Grand Rex (Barclay) 2005
DVD : Escale au Grand Rex (Barclay) 2005
Livre : Escales (Flammarion) 2005