Taha "rocks the kremlin"
Première mondiale : Rachid Taha et Brian Eno ont joué ensemble pour la première fois, devant un public russe, à Saint Petersbourg le 24 mai et à Moscou le 25. Eno aux machines, Taha au chant, répertoire rock-électro-arabe... leurs concerts résonnent encore dans les nuits blanches de mai.
Rachid Taha et Brian Eno de concert en Russie
Première mondiale : Rachid Taha et Brian Eno ont joué ensemble pour la première fois, devant un public russe, à Saint Petersbourg le 24 mai et à Moscou le 25. Eno aux machines, Taha au chant, répertoire rock-électro-arabe... leurs concerts résonnent encore dans les nuits blanches de mai.
Brian Eno, véritable mythe pour les mélomanes russes, lui même très russophile - il a habité quelques mois à St Pétersbourg en 1997 et s'y rend encore régulièrement - ne s’était pourtant jamais produit en Russie. C’est avec Rachid Taha sur le devant de la scène qu’il a décidé d’organiser sa première rencontre avec le public russe. Vieux fan de musiques arabes, Brian Eno a découvert Rachid Taha par hasard, en tombant amoureux d’une de ses chansons, sans savoir qu’il en était l’auteur. Estimant que Rachid Taha est un des plus intéressants musiciens d'aujourd'hui, il décide alors de collaborer avec lui. Sur le nouvel album Tékitoi, d'abord (Dima!) puis en l'invitant pour ces deux concerts à Saint Pétersbourg et à Moscou.
A Moscou, le concert a eu lieu dans la Maison de la Culture Gorbunov, salle à l’architecture très soviétique. "La Gorbushka", comme l’appellent les moscovites. Malgré une gigantesque panne d’électricité qui a paralysé toute la partie sud de Moscou, bloquant notamment le trafic de plusieurs lignes de métro et créant l’inquiétude chez les organisateurs, plus de 1200 spectateurs ont pu se retrouver à la "Gorbushka". Le public, dans son immense majorité, était venu écouter Eno. "Brian est la locomotive de l’événement", nous expliquait pendant les préparatifs Alexander Cheparukhin, directeur de l’agence Greenwave, qui a produit ces concerts. "Je suis sûr que Rachid Taha peut trouver son public en Russie, Brian Eno va l’y aider ; et la prochaine fois, il reviendra seul ! "
Natacha, étudiante rencontrée en première partie de concert, nous explique : "Je suis venue voir Eno, que je connais depuis mon enfance, je ne voulais pas rater cette soirée ! Je n’avais pas entendu parler de Rachid Taha avant de voir l’annonce du concert, mais je me suis dit que ça serait forcément intéressant d’écouter le nouvel énergumène que nous a trouvé Eno, et je ne suis vraiment pas déçue ! ". Dina, web designer freelance, là avant tout pour Brian Eno, est déçue : "Eno est derrière tous les autres musiciens, il n’est pas assez présent, je ne retrouve pas sur scène ce à quoi je suis attachée depuis toujours chez Eno. Il vaut mieux écouter ses albums à la maison ! ". Fedor, jeune journaliste qui se dit "pas particulièrement francophile", fait partie des rares personnes interrogées venues pour écouter Rachid Taha. Mais, fan de chansons comme Douce France, Fedor s’attendait à un caractère oriental beaucoup plus présent, plus prononcé. "Taha devrait rester dans son univers arabe, sans chercher à le mélanger à ce point au rock et à l’électro. Ce soir, je trouve que sa musique est dénaturée".
Donner une couverture s'ils ont froid!
Après le concert, Rachid Taha réagit à ces propos : "Je ne revendique pas le fait de jouer de la musique arabe, ce n’est pas la principale caractéristique de ma musique. Et je ne suis surtout pas là pour faire du folklore ! Je suis français comme j’aurais pu être américain, anglais ou autre... Dans la musique, justement, ce qui est intéressant, ce sont les mélanges ; les frontières entre les genres n’existent pas pour moi". Interrogé sur les impressions qu’il a du public russe, Rachid Taha répond : "Ils ont été froids au début, à St Pétersbourg comme à Moscou. Mais en réalité, s'ils le sont, c’est que nous le sommes sur scène. S’ils ont froid, il faut leur donner une couverture ! C’est à nous de faire des efforts, les musiciens sont des forains qui doivent concquérir le public, lui donner de la chaleur, c’est notre travail". Sur la Russie, il conclue : "Dans les pays un peu durs comme la Russie, durs politiquement, les gens ne font qu’apprendre à se défendre, ils n’apprennent pas l’amour. Ici, on ressent parfois du racisme dans les regards dans la rue. Il y a tout un travail à faire, par rapport à des gens qui n’ont pas du tout la même vision que nous, qui sont ignorants, qui ont tout un chemin à faire. Mais ils sont en train de grandir. La musique, c’est un combat, c’est une bataille permanente, et la France aussi en a besoin de ce combat !".
Pour les dix dernières minutes du concert, Rachid Taha a invité les spectateurs à monter sur scène. Une trentaine de personnes sont venues danser autour des musiciens, embrasser Rachid Taha et admirer Brian Eno juché sur ses machines.