Thierry Robin : le métissage pour destin
Le port d'attache, le refuge de Thierry Robin, c'est un bourg à quelques kilomètres d'Angers. Mais la musique qui lui vagabonde dans la tête, elle vient de bien plus loin. Elle s'inspire de celles d'autres contrées, elle se nourrit sous d'autres climats. Témoin «Un ciel de cuivre», son nouvel album.
Parfums nomades de bon goût
Le port d'attache, le refuge de Thierry Robin, c'est un bourg à quelques kilomètres d'Angers. Mais la musique qui lui vagabonde dans la tête, elle vient de bien plus loin. Elle s'inspire de celles d'autres contrées, elle se nourrit sous d'autres climats. Témoin «Un ciel de cuivre», son nouvel album.
Chaleureux et empreints d'une sensualité épanouie, les univers de Thierry Robin suggèrent des liens de connivence entre les Afriques, l'Andalousie et l'Orient. Dépaysante, sa musique reflète l'idée belle et généreuse d'un univers musical décloisonné. Depuis «Gitans», en 1993, Thierry Robin n'avait pas enregistré un album aussi abouti, aussi convaincant que peut l'être celui-ci.
On retrouve dans «Un ciel de cuivre», les mêmes sentiments de ferveur joyeuse, la même fraîcheur, la même force des images, de celles, qui, on l'aura compris, font voyager et valser les repères trop familiers. Enregistré avec des sœurs et des frères de cœur, c'est pour ce baladin nomade une autre histoire de sangs mêlés, de vols libres, de plaisir au long cours, un autre rêve réalisé. Il y a là autour de lui Roberto et Bruno Saadna, les «collègues gitans de Perpignan», comme il dit. Il y a aussi Gulabi Sapera, la troublante chanteuse et danseuse du Rajasthan, Hacer Toruk, d'origine turque, une autre voix, prometteuse, et puis les clarinettes et saxophones de Renaud Pion, l'accordéon fureteur de Francis Varis, la science du rythme de François Laizeau, Keyvan Chemirani, Abdellah Achbani, Mohamed Arab, Abdelkarim Sami "Diabolo" et puis d'autres encore... Une grande famille, ardente et soudée dans le désir de partager.
Chez tout esprit enclin aux a priori, Thierry Robin est un homme énigmatique, voire suspect. Né de parents français dans un village du Maine-et-Loire, outre la guitare, il joue du oud, du bouzouq et invente un langage musical à la croisée des cultures de plusieurs mondes. Faut-il déceler chez ce personnage hors-cadre un militant de plus pour le métissage? «Ceci n'est pas un concept, une valeur en soi pour moi, prévient-il. Le métissage c'est mon destin, j'y suis complétement immergé». La réponse est claire, sans déflorer le mystère. Et bien tant mieux! Au diable le rationnel, les réflexions trop corsetées.
Thierry Robin est de cette tribu d'aventuriers qui font des chemins buissonniers leur ordinaire. Loin des idées reçues, peu soucieux des codes, il aime frayer avec l'imprévisible, se laisser aller là où ses coups de cœur le mènent. Tout a commencé peut-être ce jour où il est tombé en arrêt devant les raffinements extrêmes du joueur de oud irakien Munir Bachir, ou bien cet autre jour où il a succombé au chant acéré du cantaor génial Camarón de la Isla. Il y eut aussi ce oud, rapporté de Tunisie par un copain, la découverte du chaâbi berbère avec des potes marocains à Angers... De belles rencontres, de grandes émotions, de celles qui font grandir un homme et donnent du sens à la vie d'un musicien.
Patrick Labesse.
ALBUM : Un ciel de cuivre (Naïve)
Thierry Robin en concert : le 9 mars à Angers, le 10 à Paris (La Cigale), le 11 à Poitiers, le 14 à Vanves, le 18 à Tremblay en France, le 24 à Troyes, le 25 à Paris (Zénith, avec Idir), les 28 et 29, le 1er avril (avec Erik Marchand) à Brest, le 27 juillet à Guérande.