Higelin tourne en Amérique

La première fois que j'ai rencontré Jacques Higelin remonte à… 20 ans ! A l'époque, on ne posait déjà plus de questions à Maître Jacques tant il a ce génie méticuleux planté en lui de ne pas y répondre. Alors après une bonne vingtaine d'années d'observation plus ou moins forcée, je me dis que finalement, à bien y réfléchir, la longueur de ces concerts et l'énergie qui les enveloppe m'ont offert aujourd'hui bien plus que toutes les pseudos réponses qu'il aurait pu apporter à des questions, n'ayons pas peur de le dire, dont tout le monde ou presque se moque. En clair, Higelin, ce n'est pas un artiste, c'est une oeuvre d'art. Des questions?

New York boogie blues

La première fois que j'ai rencontré Jacques Higelin remonte à… 20 ans ! A l'époque, on ne posait déjà plus de questions à Maître Jacques tant il a ce génie méticuleux planté en lui de ne pas y répondre. Alors après une bonne vingtaine d'années d'observation plus ou moins forcée, je me dis que finalement, à bien y réfléchir, la longueur de ces concerts et l'énergie qui les enveloppe m'ont offert aujourd'hui bien plus que toutes les pseudos réponses qu'il aurait pu apporter à des questions, n'ayons pas peur de le dire, dont tout le monde ou presque se moque. En clair, Higelin, ce n'est pas un artiste, c'est une oeuvre d'art. Des questions?

"Je ne suis pas Maurice Chevalier, ni Brigitte Bardot et encore moins Gérard "Depardiou", I am Jacques Higelin from Paris, France !" Avec une demi-heure de retard sur le programme, (ben quoi si c'était en France il serait en avance sur son retard…) en ce soir de 17 avril, à l'Alliance Française de la Grosse Pomme, Jacquot nous la joue tombé du ciel ! A20h30 pétante, Captain Dodécaphonic dada donne le ton. L'irremplaçable Docteur Mahut l'accompagne aux percussions. On commence par un rapide topo sur sa première après-midi new-yorkaise passée au milieu des buildings. Buildings, notons-le, tellement hauts, mais tellement hauts, qu'ils ont bien sûr, été posés là, simplement pour "trouer le c... de la lune et jouer avec les anneaux de Saturne" ! Silence… américain.


On continue avec une minute sentiment sur le coup de fil passé à Izia pour lui dire que son papa l'aime. Et ça se voit, et voilà l'ami Jacques qui démarre sur les chapeaux de roues, Mahut le suit. Deux ou trois "putain, fait chier !" à droite pour agrémenter la sauce et bien sûr, New York oblige, les mêmes à gauche version "ricaine". Nouveau silence, accompagné de quelques gloussements qui me paraissent vaguement français. Je scrute la salle presque pleine… Ouf ! Personne n'a bougé, j'attends la prochaine rafale. En Amérique, pays de toutes les perversions mais néanmoins puritain, on ne plaisante ni avec le sexe, ni avec la religion. Mais je ne vous apprends rien, n'est-ce pas ? C'est pourtant avec un plaisir immense que je constate à quel point les interdits amusent notre ami. Son imitation "papale" est digne d'un Fellini et les gestes qui l'accompagnent en font un succès authentique. Mahut en signe la cadence. Jacques, le signe de croix pas si bas enfin !

Heureux ! Higelin est heureux. Il sautille, tourbillonne, virevolte. Comme d'hab' sauf qu'on est à New York et que ça, pour le père Higelin, c'est le tampon d'une tournée que les "toquards" de flics de JFK ne lui avaient encore pas apposé sur son passeport. Alors il crache sa joie, revendique ses racines et hurle à qui veut bien l'entendre, "Je suis French from France, je ne me suis jamais senti autant français que depuis que je suis là !" Ta pa boum. Mahut ferme les parenthèses. Un ballon de rouge peut-être bien californien sur le piano et la bouteille qui va avec, planquée derrière le rideau, Mona Lisa Klaxon n'a jamais été aussi désirable. Subitement, le blues se fait sentir Jacques carrosse sa guitare et c'est la salle entière qui tombe "amoureuse de sa cigarette".

Le temps d'un trip sur La butte Montmartre pour saluer ses amants, voilà qu'il est déjà l'heure du Champagne et de son Paradis Païen. Je le pressens, je refuse de le voir arriver, mais le voilà le moment déchirant. "Partir, et surtout ne jamais se retourner…" Dans le noir, ma double montre "Paris-New-York New-York-Paris" me ment. Non il ne peut pas être 23h30, si, ça fait seulement trois heures. Le bonheur finalement, ça tient à rien : un mec heureux moi, ça me convient. Au revoir Mahut !
La loge est pleine. Tiens, c'est qui la jolie Black au fond, à côté de Jacques. Tu sais, ce sentiment de déjà vu ! "I really enjoyed the show" lui dit-elle ! "You know, I am not a very good musician but I like to play… Ça me fait plaisir que you came tonight", lui dit Jacques pieds nus. Gaelle ? Non c'est pas ça. Gail Ann Dorsey. Ça y est, j'ai trouvé. Dis donc Jacques, David (Bowie) sait que sa bassiste est dans ta loge ? Et, mais le type avec elle, c'est Sterling Campbell, le batteur… de Bowie, aussi ?

Bon c'est l'heure. La vie d'artiste, moi, ça me dépasse. Merci Jacques, salut Mahut, je vous laisse avec vos potes. Tu sais, la France ne me manque pas, mais de l'avoir retrouvée à ta façon, ça m'a fait du bien. Fait pas cette tête-là, dis-le que ça te dérange qu'il y ait trop de monde dans ta loge. Après tout, t'as le droit de les virer ceux qui n'ont rien d'autre à te dire que des banalités. Je te souhaite pleins d'Américains à tes concerts et encore une fois, merci l'ami de m'avoir si bien reçue.