Les Têtes raides s'amusent

Une marque de fabrique. Une voix sombre et rieuse, des textes au sens parfois incertains, Qu’est-ce qu’on se fait chier, est incontestablement le neuvième album des Têtes Raides. Et n’allez pas croire qu’après 19 ans d’union, ce soit la routine qui prime. La recette semble simple mais ce fourmillement d’instruments et de trouvailles sonores révèlent de nouvelles richesses à chaque écoute. Un disque jouissif, entêtant où les titres s’échappent du carcan chanson-rock-fanfare pour aller loin, loin, loin.

Qu’est-ce qu’on se fait chier, le nouvel album.

Une marque de fabrique. Une voix sombre et rieuse, des textes au sens parfois incertains, Qu’est-ce qu’on se fait chier, est incontestablement le neuvième album des Têtes Raides. Et n’allez pas croire qu’après 19 ans d’union, ce soit la routine qui prime. La recette semble simple mais ce fourmillement d’instruments et de trouvailles sonores révèlent de nouvelles richesses à chaque écoute. Un disque jouissif, entêtant où les titres s’échappent du carcan chanson-rock-fanfare pour aller loin, loin, loin.

Un an et cinq studios différents, ce nouvel album est un vrai périple ?
Sergio (guitare) : On a commencé là où on avait achever le mixage de Gratte poil, notre disque précédent, par l’Artistic Palace à Boulogne. Nous sommes ensuite allés à Pompignan, à Bruxelles et on a terminé dans deux studios à Paris.
Grégoire (saxo) : On ne voulait pas se mettre à huis clos pendant un mois et demi comme pour les enregistrements précédents. On s’est dit que les morceaux avaient besoin d’air et nous aussi pour les travailler. A force d’aller enregistrer tous les jours un morceau, tu n’essaies plus de sentir le mouvement. On s’est laissé la possibilité de l’amusement.
Edith (clavier et cuivre) : On alternait les séances de prises en studio avec les répétitions, la mise en place des morceaux. L’album s’est construit au fur et à mesure.
Grégoire : On est tous parti des morceaux au même point, comme on avait déjà commencé à le faire sur Gratte poil. Christian [le chanteur accordéoniste, ndlr] arrive avec le texte et des bouts de mélodie. Et puis nous, on travaille ensemble sur cette histoire-là. Chacun avec son envie, son univers, son humeur.

Vous avez vous-même produit cet album ?
Grégoire : Oui, toutes les décisions ont été prise en groupe : où enregistrer, avec qui travailler… Jusqu’au bout nous avons tenu ce projet ensemble.
Edith : Un réalisateur ne vient généralement que pour les prises en studio avec, en plus, une petite une idée du résultat final. Ted Man [Olivier Genty, le preneur de son, ndlr] avait juste une oreille pour voir ce qui était juste ou pas.
Sergio : Il venait aussi aux répétitions...
Grégoire : Il découvrait le morceaux en même temps que nous, au moment de les travailler. Il réagissait avec une oreille fraîche et une certaine objectivité. Et on voulait enregistrer tous ensemble au maximum. Avant on nous disait : "Non, ce serait mieux de faire comme ça".

Vous avez enregistré dans les conditions du direct ?
Grégoire : Toute la base, c’est du live. On a vraiment jouer le jeu a fond...
Sergio :
(une moue) Oui petit joueur quand même. On n'a pas pris beaucoup de risques.
Edith : Quand même plus que sur le précédent...
Grégoire : Sur quelques morceaux comme Qu’est-ce qu’on se fait chier, on a fait le choix d’enregistrer ensemble tous les instruments et de rajouter les voix après.
Sergio : Là, c’était plus des contraintes techniques. Comme par exemple si Christian avait une partie d’accordéon un peu dure à faire... Et puis l’accordéon et la voix...
Grégoire : ça "repisse". [le micro de la voix prend un peu d’accordéon et inversement ndlr] Si tu fais un gros pain à l’accordéon mais que la voix est bonne, c’est quand même bon à jeter !
Sergio : Mais on a quand même essayer de faire le plus live possible.

Faut-il prendre le titre de l’album Qu’est-ce qu’on se fait chier  au sens littéral ?
Grégoire : Non ! C’est plutôt une manière de dire le plaisir que l’on a envie de continuer à jouer ensemble. Moi quand je dis : "Qu’est ce qu’on se fait chier", c’est que je me poile à bloque.
Edith : Je pense que c’est un peu plus large aussi. Les textes des Têtes Raides ne sont pas toujours explicables. Chacun prend ce qu’il veut. Mais il y a aussi une ironie. Ça relativise les soucis de certains.
Grégoire : On a tous travaillé un peu à l’usine. On sait aujourd’hui la chance que l’on a d’être libre de nos gestes.


Certains titres comme Pitance ou Soupault se démarquent de vos chansons habituelles ?
Grégoire : Pour moi, il y a seulement trois chansons qui ressemblent à ce qu’on faisait avant.
Edith : Au départ, on ne cadre pas. Pour cet album, le sens dramatique, dans le sens de l’expression d’une idée, prend parfois le pas sur la musique. On part vers des choses plus abstraites.


Ça va se traduire comment sur scène ?
Collégial : Ah mystère !!!
Grégoire : A une semaine du premier concert aux Bouffes du nord, on ne sait pas encore ce qu’il va y avoir sur scène. Loin s’en faut ! On connaissait cette salle avec un spectacle, là c’est un nouveau spectacle, c’est une autre salle. Ce qui s’est passé physiquement quand j’y suis venu la semaine dernière n’a rien à voir avec ce que j’avais ressenti la fois d’avant.


Dans chacun de vos albums, il y a des instruments particuliers. Vous avez utilisé une scie musicale sur Aïe ?
Collégial : Aaahh !
Grégoire : C’est l’univers cosmique...
Edith : Ce sont des ondes Martenots, un des premiers instruments électroniques. On a rencontré une fille au cours de nos pérégrinations, qui en jouait.
Sergio : C’est une corde qui vibre et t’as un clavier pour moduler. C’est hyper sensible, tu peux faire des sons doux et des montées violentes.
Grégoire : Brel s’en servait beaucoup.


Le texte du titre Vaille que vaille se résume à ces trois mots. C’est une panne d’inspiration ?
Christian : Dans une chanson, c’est bien aussi qu’il n’y ait que Vaille que vaille. Au début j’avais des bouts de textes, et au final je trouve que l’on peut dire plein de choses avec ses trois mots. Ça peut aussi bien être une chanson internationale. Dans le marché de l’art, ça vaut cher !
Grégoire : Et en grande chanson française, aussi !


Vous avez vendu 200.000 exemplaires de Gratte-Poil, vous avez un objectif pour le petit dernier ?
Grégoire : Non, mais il faut l’acheter ! En plus, c’est un véritable objet avec un livret cartonné réalisé par les Chats Pelés. On a aussi prévu de tirer deux mille exemplaires en vinyle.

Têtes Raides Qu’est-ce qu’on se fait chier (Tôt ou tard, 2003)