NICE CÔTÉ WORLD
Nice, le 28 juillet 2002 – Alors que le Nice Jazz festival qui a débuté le 20 juillet s’est terminé hier soir, quelques artistes ‘world’ sont venus s’y produire. L’excellent accueil qu’ils ont reçu tend à démontrer que ce sont désormais les acteurs incontournables de la scène musicale estivale.
Le festival de jazz flirte avec les musiques du monde
Nice, le 28 juillet 2002 – Alors que le Nice Jazz festival qui a débuté le 20 juillet s’est terminé hier soir, quelques artistes ‘world’ sont venus s’y produire. L’excellent accueil qu’ils ont reçu tend à démontrer que ce sont désormais les acteurs incontournables de la scène musicale estivale.
La bande à Youssou N’Dour a débarqué mardi après midi dans les Jardins de Cimiez pour régler la balance avant le spectacle du soir. La star sénégalaise tourne actuellement avec une douzaine de musiciens et après un passage il y a quelques jours au festival de jazz de Montreux, le voilà à Nice pour un show très enlevé. « Je suis là pour présenter ma musique » lance t’il devant les journalistes venus l’interviewer. A la question concernant la place d’un artiste comme lui dans un festival de jazz, il rétorque : « la musique que je fais comme le jazz, se développe dans l’improvisation. De toute façon, la musique est une et toutes les musiques sont ‘world music’». Après vingt ans de carrière, le musicien considère sans doute que les frontières musicales n’existent que pour certains esprits étroits. L’album qu’il vient de finir d’enregistrer s’inscrira dans ce principe puisqu’il a collaboré avec Pascal Obispo. « c’est un des meilleurs compositeurs européens ». En même temps, «ce sera un retour à l’utilisation d’instruments plus traditionnels ». Youssou assume parfaitement ses choix artistiques. Ce nouvel opus sortira d’ailleurs sur son propre label, distribué à travers le monde par Warner. «Je veux être libre » dit-il avec conviction. Ses projets à venir sont aussi tournés vers la production d’autres artistes sénégalais. « Le but est de sortir tous les deux ans une compilation des artistes que je produirai ». Ses multiples activités, son talent et sa notoriété le placent incontestablement comme un véritable leader, conscient de ses responsabilités auprès des jeunes. « Les artistes en Afrique sont des artistes engagés, malgré eux. Ils ont un quotidien à gérer et pas vraiment l’occasion de faire de la poésie.» Très sérieux face aux journalistes, l’homme de spectacle resurgit quand il se retrouve sur scène. Devant le public, le chanteur sénégalais explose. L’ambiance est d’autant plus survoltée que quelques uns de ses compatriotes sont venus ce mardi soir, voir, écouter et chanter avec Youssou. Les maillots de l’équipe de foot sénégalaise étaient aussi de sortie, donnant sans conteste un air de fête aux Jardins de Cimiez.
Le 23 juillet était donc consacrée à la «World music, la musique dans tous ses états», titre donné par les organisateurs. On a pu applaudir le chanteur angolais Bonga, l’homme à la voix rauque, trente et un disques à son actif, 270 titres répertoriés à la Sacem qui ferait presque figure aujourd’hui de vétéran des musiques du monde puisqu’il débuta en 72 à Paris. Un peu plus jeune, le Congolais, Lokua Kanza s’est aussi produit pendant cette soirée. Fidèle à ses sonorités folk, le musicien a démontré une fois de plus la finesse de ses compositions. On a pu entendre aussi le percussionniste argentin Minino Garay, les Brésiliens du Trio Macoto, les Cubains de Vocal Sampling, etc. Une belle palette d’artistes pour une soirée qui aurait presque pu voler le titre de celle du 25 juillet : «Dance (Teuf)».
Deux jours plus tard, après un intermède ‘blues’, le Nice Jazz Festival s’est transformé en piste de danse géante. Au programme l’Ivoirien Tiken jah Fakoly, les farfelus de NoJazz, le Mario Canonge Big Band et même Yannick Noah ! Viviane Sicnasi, la programmatrice du festival fanfaronnait un peu lors de la conférence de presse : «Je suis celle qui ose programmer Yannick Noah dans le Nice Jazz Festival. Les étiquettes, j’m’en balance ». Même l’intéressé n’en revenait pas : «Je me demande ce que je fais là !». L’ancien champion de tennis a joué les modestes. «Je n’ai pas l’ambition de révolutionner la musique. Sur le précédent album, j’avais écrit les textes. On en a vendu six. Pour celui là, j’ai laissé à d’autres le soin de le faire et on a vendu un million. » On dit qu’il a travaillé sa voix. Il s’est entouré de bons musiciens, son charisme a sans doute fait le reste. Il pratique l’autodérision avec facilité, reste accessible malgré son statut de star et balance une musique sans prétention mais agréable. De sa double culture, il a retiré ce qui l’intéressait, profitant sans doute de la vague ‘world’ française pour surfer sur le succès. Le chanteur a semblé à cet égard très lucide : «pour les Africains, je fais de la musique de blancs et ici (en France, ndlr), c’est l’inverse ! ». Mais les étiquettes, le public niçois a eu l’air de « s’en balancer » pour reprendre les mots de la directrice du festival puisque les Jardins de Cimiez étaient littéralement envahis. Yannick Noah battait sans doute le record d’affluence de ce festival, rendant superflu tout commentaire sur l’opportunité ou non d’inviter un ancien joueur de tennis !
Les musiques du mondes ont été omniprésentes dans la programmation de ce festival puisque dans les jours qui ont suivi, on a pu applaudir Angélique Kidjo, Ismaël Lô, la fadiste Misia et d’autres encore. Apportant avec eux une diversité musicale que l’on a des difficultés à entendre sur les radios, ces artistes donnent aux festivals, une richesse culturelle que l’on souhaiterait retrouver plus souvent par ailleurs.
Texte et photos : Valérie Passelègue