Doc Gynéco
C’est le grand retour d’un des rares artistes rap connu par le grand public : populaire au-delà du cercle des fans de hip hop, Bruno Beausir, alias Doc Gynéco, a en effet vendu un million de sa Première consultation, et a maintenu en parallèle de sa carrière d’artiste une présence médiatique soutenue (talk shows, télé réalité). Après son départ de chez Virgin pour un label plus modeste, voilà le grand retour du praticien lover en deux volumes : un album classique et un autre plus roots, enregistré "au quartier" près de la Porte de la Chapelle où il habitait quand il était plus jeune. Rencontre avec un rappeur loin des clichés et de la langue de bois.
L’homme nature fait bien les choses
C’est le grand retour d’un des rares artistes rap connu par le grand public : populaire au-delà du cercle des fans de hip hop, Bruno Beausir, alias Doc Gynéco, a en effet vendu un million de sa Première consultation, et a maintenu en parallèle de sa carrière d’artiste une présence médiatique soutenue (talk shows, télé réalité). Après son départ de chez Virgin pour un label plus modeste, voilà le grand retour du praticien lover en deux volumes : un album classique et un autre plus roots, enregistré "au quartier" près de la Porte de la Chapelle où il habitait quand il était plus jeune. Rencontre avec un rappeur loin des clichés et de la langue de bois.
RFI Musique : Ton ancien label a sorti un best of qui n’a pas marché. Est-ce la raison de ton divorce avec Virgin ?Doc Gyneco : Oui et non. En ce moment, les maisons de disques ont de plus grosses menaces que perdre leurs artistes ou réussir à vendre des disques. Il paraît qu’ils vont mettre la clef sous la porte… Ça va faire mal. Virgin n’a pas été assez intelligent avec les artistes et avec les pirates. Les maisons de disques, c’est un peu l’usine : quand tu fais partir une chanson dans les réseaux, elle se retrouve sur 10.000 supports différents. Les majors, elles appuient sur 3 boutons, la chanson est partie et c’est fini.
Tu es toujours en guerre contre les maisons de disques ?
Regarde ce qui se passe, on avait raison de se méfier ! Ils sont menacés par les pirates, qui ont été plus malins. Je ne comprends pas qu’ils n’aient pas pensé à ça. C’est eux qui auraient dû créer Napster au lieu d’essayer de le racheter une fois que c’était fait. Il faut assumer ses erreurs, savoir que la cassette allait s’arrêter et que le CD s’arrêterait un jour.
Tu sors en même temps deux albums, Un homme nature et Doc Gynéco enregistre au quartier. Pourquoi ?
C’est une autre façon de bosser. On a un album avec le son d’un studio où on entend les bruits de la rue, et un autre professionnel au Palais des Congrès. Ça n’a strictement rien à voir. C’est comme si tu bois de l’eau du robinet ou de l’Evian : on a un album Evian et un album eau du robinet. L’album au quartier, c’est un son que les jeunes aiment bien.
Tu sors 30 morceaux d’un coup. Tout a été écrit récemment ?
J’avais déjà des vieux morceaux. Sur l’album au Palais je n’ai pas vraiment travaillé, je leur ai donné des bandes qui étaient déjà enregistrées, j’ai dû faire 5 titres en plus. On a recomposé des morceaux qu’on avait déjà en bouche et en tête. On avait la moitié de l’album maquetté. L’homme pressé, je le reprends dans la logique du lièvre et de la tortue. C’est un morceau qui va vite et je suis lent.
Tu chantes de plus en plus, et tu rappes de moins en moins…
Je suis un chanteur, j’écoute la musique quand je lis mon texte, et j’essaie d’être en place sur les temps. Les rappeurs ils n’en ont rien à foutre, tu n’en as pas un qui rappe en place. Il y a la musique d’un côté et le rap de l’autre. Moi, je suis dans la musique. C’est pour faire évoluer en bien le rap, que ça devienne une musique adulte, pas une musique qu’on écoute quand on est jeune et rebelle.
Tu fais carrément une reprise de Tout va très bien madame la marquise…
C’est une mélodie que j’avais dans la tête. On cherchait un refrain en studio, les musiciens me parlaient du dernier R. Kelly et moi je me mets à chantonner "tout va très bien…", et tout le monde a entendu ça étant petit.
As-tu parfois peur de ne plus être à la mode, de ne plus intéresser les jeunes, les noirs, les banlieusards ?
Je ne peux pas ne plus intéresser tous ces gens, vu que je suis le seul qui leur parle et qui s’intéresse à eux. Je leur parle directement, sans avoir un discours comme Dieudonné. Comme je parle aux gens qu’on dénigre généralement, ils s’en rendent compte. Tant qu’il y aura des pauvres, je peux continuer. J’ai vendu un million d’exemplaires de mon premier album, mais ça n’arrive qu’une fois. Je préfère construire une carrière plutôt que de faire Rambo 1, 2, 3. J’aurais fait trois Première consultation, je serais malheureux. Je suis content d’avoir changé d’univers, d’être rentré dans des vibes différentes.
Ton nouveau single s'intitule La Party. C’est bien parti ?
On ne sait jamais, ça peut toujours ne pas marcher. On ne sait plus ce qui va marcher ou pas, c’est devenu bizarre.
Certains disent que tu as été surexposé médiatiquement…
On a trop aimé me dire qu’on m’avait trop vu. Je préfère qu’on me dise qu’on m’a trop vu plutôt qu’on me dise qu’on ne me voit pas assez. C’est mieux, au moins les gens savent qui je suis. Et ceux du hip hop que ça dérange, au fond d’eux ils savent que Gynéco contribue à faire quelque chose de bien pour le rap.
Doc Gyneco Un homme nature et Doc Gynéco enregistre au quartier (Exclaim/Archambault) 2006.