Henri Dès, le grand môme
Depuis 25 ans, Henri Dès lutte d'arrache pied pour offrir un répertoire intelligent aux petites têtes blondes francophones. Face à Chantal Goya et Dorothée dans les années 80 et aux Lorie et Alizée aujourd'hui, le chanteur suisse réussit le pari de s'imposer et de durer. Au point qu'une vingtaine d'écoles primaires françaises portent déjà son nom !
Entrevue avec la star de la chanson pour enfants.
Depuis 25 ans, Henri Dès lutte d'arrache pied pour offrir un répertoire intelligent aux petites têtes blondes francophones. Face à Chantal Goya et Dorothée dans les années 80 et aux Lorie et Alizée aujourd'hui, le chanteur suisse réussit le pari de s'imposer et de durer. Au point qu'une vingtaine d'écoles primaires françaises portent déjà son nom !
Dans la lignée de la grande Anne Sylvestre, Henri Dès n'a jamais pris les enfants, ni pour des tiroirs caisse, ni pour des imbéciles. A travers une œuvre riche d'une vingtaine d'albums (chansons originales et traditionnelles, contes, comédies musicales), il leur livre des chansons simples mais pas simplettes, agrémentés de textes malins, teintés d’humour et de tolérance. Depuis 1986, pratiquement chaque année, il investit l’Olympia de Paris durant les deux semaines des fêtes de fin d'année. Rencontre avec cet artiste de 62 ans qui réconcilie parents et enfants, sans démagogie, à l’occasion de la sortie de son nouveau disque Comme des géants.
Comment se présente un spectacle d’Henri Dès ?
C’est une grande fête familiale et conviviale. Les parents et les enfants s’y retrouvent car dans mon écriture, j’essaie de trouver la frontière entre le monde de l’adulte qui essaie de retrouver une part d’enfance, et celui de l’enfant qui essaie de se hisser là-haut, vers le monde adulte. Les parents n’ont pas l’impression d’être mis à l’écart et les enfants comprennent tout. Je leur parle de leur quotidien, de leurs rigolades et de leurs angoisses. En principe, une grande partie du public connaît mes chansons. Les décibels ne viennent pas forcément de la scène...Je chante un tiers de titres extrait de Comme des géants, un tiers d’incontournables que le public réclame et le reste est composé de titres rares que je ne chante presque jamais. J’ai le choix parmi les 160 chansons de mes 14 albums !
Avez-vous le sentiment d'avoir un temps limité pour capter l’attention des enfants en concert ?
Non. Ils connaissent mes chansons, ils comprennent ce que je leur dis, ça leur parle. Je n’ai pas trop besoin d’user de stratagèmes pour qu’ils restent tranquilles. Ils chantent avec moi et ça marche très très fort.
Dans votre dernier album, vous abordez des thèmes rares dans des chansons pour enfants. Je pense à Où es-tu papa?, l’histoire d’un enfant qui perd ses parents dans la rue ?
Dans la vie, il y a du positif et du négatif. On ne va pas tout ramener aux bonbons roses chez les enfants. On a tendance à leur fabriquer des chansons où il y a un petit nez rouge et un nounours. Ce n’est pas que ça, la vie d’un enfant, c’est aussi des craintes et des petits soucis. Cette histoire de se perdre dans la rue, c’est une chose que beaucoup d’enfants ont connu Et de parents aussi, bien sûr.
Depuis vos débuts, il y a 25 ans, la vie des enfants a changé, comment avez-vous fait évoluer vos textes ?
En un quart de siècle, les choses ont bougé, quoique la vie à l’intérieur de la bulle familiale a moins bougé que la société elle-même. La famille est une petite société à part. Il y a toujours le papa, la maman, dans le meilleur des cas, la petite sœur, le chat, le poisson rouge. A côté de ça, il y a la télévision qui leur ouvre les yeux sur des choses qu’ils ne connaissaient pas il y a 25 ans. L’écologie, ça existait déjà mais maintenant les gamins savent qu’il faut trier. Si j’arrive à trouver l’angle ludique pour leur en parler, je le fais. Quant au vocabulaire, il n’a pas tellement changé. Le langage imagé des rappeurs ne touche pas encore les jeunes enfants.
Vous chantez aussi bien au Québec, en Suisse, en Belgique qu'en France. Ressentez-vous des différences dans les publics ?
Avant, quand je jouais dans des petites salles, oui. Je ressentais une différence entre les salles de campagne et les salles urbaines. Mais aujourd’hui, que je joue dans des grandes salles, non.
Et le média Internet, que change t'il ?
Ah, c’est très bien ! C’est une nouvelle approche pour moi. Une nouvelle façon de recevoir du courrier, j’en reçois beaucoup plus aujourd’hui via Internet que par courrier papier. Par exemple, j’organise un concours de dessin et le plus beau se retrouve sur le site. Les parents aussi me communiquent leurs impressions d’après concert ou ce que leurs gamins leur ont dit. C’est passionnant !
Comment jugez-vous l’évolution des artistes qui s’adressent aux gamins ?
C’est comme dans la musique pop. Il y en a qui écrivent sur un bout de table et qui pensent que cela suffit pour les enfants. Certains se servent d’émissions de télé pour vendre leur CD, ça dure peu généralement, et enfin d’autres tentent de produire des choses plus profondes et à long terme, je pense que c’est mon cas. Quant aux médias, ils nous ignorent complètement, sauf quand on sort un disque. Sinon, je n’ai aucun disque programmé en radio. Mais ça ne me gêne pas trop car j’ai un autre média, c’est le bouche à oreille !… Je pensais qu’en me produisant dans des plus grandes salles et en vendant plus de disques (chaque disque d’Henri Dès est certifié Disque d’or, ndlr), ça intéresserait plus les télés et les radios, mais non. Ceci dit, je ne me plains pas : la médiocrité ambiante des artistes pour gamin, ça me sert, ça me permet de sortir du lot…
A l'Olympia de Paris jusqu'au 31 décembre.