PIAS LABEL BELGE

Cannes, le 26 janvier 2000 - Ils sont plusieurs milliers de labels et de distributeurs indépendants qui sont venus cette année au Midem représentant en tout quelques 95 pays à travers le monde. Si en grande majorité, ils viennent des Etats-Unis et de Grande-Bretagne, certains ont fait le chemin jusqu'en France, de pays aussi reculés que la République d'Azerbaïdjan ou du Panama, ou plus simplement de Belgique !

Interview de Jean-Luc Marre, directeur de promotion

Cannes, le 26 janvier 2000 - Ils sont plusieurs milliers de labels et de distributeurs indépendants qui sont venus cette année au Midem représentant en tout quelques 95 pays à travers le monde. Si en grande majorité, ils viennent des Etats-Unis et de Grande-Bretagne, certains ont fait le chemin jusqu'en France, de pays aussi reculés que la République d'Azerbaïdjan ou du Panama, ou plus simplement de Belgique !

Pour aujourd'hui, un arrêt au stand de PIAS (Play It Again Sam) où l'on joue la sobriété façon capitonnée skaï, sans affiche ni présentoirs. Comme si chacun savait ce qu'était ce label belge qui depuis près de 15 ans affiche une indépendance d'esprit, un sens de la provoc bien dosé et une certaine morgue peu fréquente dans la profession.
Rencontre avec Jean-Luc Marre .

Créé par Kenny Gates et Michel Lambot, Pias est basé à Bruxelles. Ces deux fous de musique ont selon Jean-Luc Marre, "essayé de donner des moyens professionnels de diffusion à des musiques qui au départ, n'étaient pas des musiques grand public". Depuis la société s'est développé et ils ont ouvert des antennes en Angleterre, aux Pays-Bas, en Allemagne et en France. Il s'agissait au départ de négocier des accords avec des distributeurs dans ces pays, puis au fur et à mesure, Pias a créé son propre réseau de distribution. "On est passé d'une structure de production à une structure de distribution." En France, Pias distribue de nombreux petits labels comme Mange Tout, Alienor, Total Heaven, ou F. Communication. "On essaie d'apporter le savoir et la structure professionnelle à de petites structures. C'est une transnationale".

Dans ces conditions, il est difficile de donner la juste mesure de la spécificité de leur créneau musical. "Au départ, lorsqu'on démarre un nouveau label, on essaie de lui donner une identité forte en se positionnant sur un créneau musical. Les premiers artistes de Pias étaient Front 242, Young Gods, etc. qu'on a un peu assimilé à de "l'électronique body music". Nous avons élargi notre champ d'action. Aujourd'hui, on reste sur les musiques "indies" comme disent les Anglais. Le terme "indépendant" n'a pas le même sens en français. En France, Pias a des artistes comme Miossec qui est peut être un artiste "indie" dans sa démarche, dans la manière dont il travaille, dans sa musique. On a aussi Les Hurlements d'Léo. On travaille en fait sur des musiques émergentes."

Politiquement incorrect

Pas de barrière de style chez Pias. "Une de nos dernières signatures se nomme Ark qui est un jeune artiste français bourré de talent et qui fait de la musique électronique, le disque sortira dans tous les pays où Pias est présent." Voilà donc une bonne affaire pour ce nouveau venu puisqu'il pourra aussi bien être entendu en Allemagne qu'en France. La création artistique elle-même bénéficie de cette structure tentaculaire. "Il y a des interactions qui se font entre les différents artistes. Les Rythmes Digitales qui sont anglais ont travaillé avec les Belges de Soulwax parce qu'ils se sont retrouvés dans les bureaux de Pias. L'interactivité se passe à ce niveau-là et est très rapide car la structure Pias reste très légère."

Le Midem est avant tout un endroit où les labels et distributeurs sont là pour se faire connaître, reconnaître un peu plus et interpeller les participants présents. D'où pour cette année, une campagne de pub un peu agressive : "Je crois que le meilleur moyen de faire réagir les gens, c'est de les choquer. On a toujours eu des campagnes comme ça. Le grand slogan à une certaine époque a été "Indie or die" ou "Rock again recession" quand tout le monde parlait de la récession, etc. Cette année, nous sommes venus au Midem avec une série de campagne dont le slogan est "Music first". Elles sont accompagnées de visuels plutôt accrocheurs voire même racoleurs. Explication : "On essaie de travailler sur des musiques qui provoquent de fortes réactions mais pas des réactions à l'eau tiède. Si on prend le cas de Miossec, certains disent "Miossec c'est génial" et d'autres "Miossec j'aime pas". En matière de communication, on s'est positionné de la même manière : il y a ceux qui adhèrent et ceux qui n'adhèrent pas. On a toujours essayé d'être "politically incorrect". C'est notre marque de fabrique."

Internet et Pias

Dernier point sur lequel toute la profession semble se mobiliser cette année, à savoir le développement d'internet et du e-commerce en matière de musique. Rien n'a l'air d'affoler Jean-Luc Marre qui répond tranquillement "Je mets quiconque au défi de me dire ce qui se passera dans six mois ou un an. Nous sommes plutôt contents dans la mesure où ça élargit le nombre de moyens de diffusion. Plus la musique sera diffusée auprès des gens, plus ce sera intéressant pour l'artiste et pour la créativité. Mais il faut naviguer à vue. Quand arrive un nouveau système, il y a une dérégulation du marché. Puis finalement, il y a une régulation qui se fait d'une manière ou d'une autre. Restons vigilants mais n'essayons pas d'aller contre le progrès." Il est vrai que ce sont plutôt les majors qui voient dans le commerce électronique une menace pour leurs bénéfices alors que les plus petits labels n'ont pas les mêmes appréhensions.
Pias semble en effet être ouvert à toutes propositions (!) musicale et technologique. Qu'ils continuent.

Valérie Passelègue

Site de Pias