Les voix du Cameroun à l'Unesco
Ce 9 septembre, de grands musiciens du Cameroun se retrouvent au siège de l’Unesco à Paris. Queen Etémé et Etienne Mbappé ont notamment répondu présents et accueilleront une dizaine de compatriotes artistes pour un spectacle à but caritatif.
Autour de Queen Etémé et Etienne Mbappé
Ce 9 septembre, de grands musiciens du Cameroun se retrouvent au siège de l’Unesco à Paris. Queen Etémé et Etienne Mbappé ont notamment répondu présents et accueilleront une dizaine de compatriotes artistes pour un spectacle à but caritatif.
Organisé dans le cadre des journées de rencontre sur les thèmes Enfance, Développement et Diversité Culturelle au Cameroun qui se tiennent actuellement au siège parisien de l’Unesco, le concert rassemblera Ruth Kotto, Jean-Pierre Essomé, Douleur, Racine Sagath, Nkodo Sitony, Pierre Diddy Tchakounté, Sally, Paul Balomog, ainsi que Queen Etémé et Etienne Mbappé.
Ces deux artistes nés au Cameroun partagent une même manie des allers-retours : entre Afrique et Europe, entre groupes et solo, entre générations. Ils arrivent tous les deux en France à l’âge de l’adolescence : quatorze ans pour Etienne Mbappé, seize pour Queen Etémé. Un changement de vie loin d’être anodin. “Je suis certain que ma soif d’apprendre vient de là”, soutient Etienne Mbappé. “Quand je suis arrivé, j’ignorais tout des Beatles, des Rolling Stones, de Led Zeppelin, de Miles Davis ... J’ai tout appris en accéléré. Depuis, je suis toujours en quête de connaissances.”
Dans l’ombre des grands
Autre point commun : ils commencent leurs carrières musicales dans l’ombre d’autres musiciens ou chanteurs prestigieux. Après avoir été soliste dans plusieurs chorales gospel, Queen Etémé est choriste dès 1996 pour Cheb Mami, Carole Fredericks, Geoffrey Oryema, Manu Dibango… Avant de sortir, en 2003, son premier album solo, Soki, un opus éclectique à l’ambiance très intimiste, composé essentiellement de ballades. Aujourd’hui, elle continue d’accompagner d’autres artistes. “Je me nourris de la musique des autres, affirme-t-elle. Pour moi, accompagner est donc un privilège. J’ai chanté trois ans avec Manu Dibango, une formation accélérée de trois ans.” Manu Dibango, le Camerounais, le talentueux grand frère, la référence : “Travailler avec lui m’a donné la maturité nécessaire pour me lancer en solo. Il m’a donné aussi l’opportunité de faire plusieurs fois le tour du monde. C’était éprouvant, mais aussi incroyable.”
Etienne aussi enchaîne les concerts et les pays. Il mène une carrière de bassiste de 1984 à 2004. Pendant vingt ans, il prend part aux albums et tournées de Jacques Higelin, Salif Keita, Michel Jonasz, Catherine Lara, Liane Foly, Claude Nougaro ... “Les années 1980 étaient fabuleuses, raconte-t-il. La France découvrait son héritage colonial, la musique africaine avait le vent en poupe et les influences de partout se mélangeaient pour créer la musique “world”, comme on a alors commencé à l’appeler.” Le bassiste a la chance d’être pris sous l’aile de Rido Bayonne, chef d’orchestre congolais, mélangeur des styles et instruments de tous horizons. Un magicien des notes. Pendant dix ans, également, il fait partie de l’aventure Ultramarine, un groupe de jazz qui devient vite une référence. Aujourd’hui encore, le nom d’Etienne reste souvent associé à cette aventure.
Chemins différents
Les deux artistes trouvent aujourd’hui la réponse à leur boulimie de découvertes par des chemins différents. Queen Etémé assouvit son appétit de nouveauté en s’investissant sans compter dans des associations : “Je me suis aperçu que j’étais marraine d’environ mille enfants. Au bout du compte, ça fait beaucoup, mais il est trop difficile de refuser. J’associe mon nom à la lutte contre la drépanocytose au Cameroun, à l’aide aux handicapés au Sénégal, à l’enfance au Bénin ...” Etienne Mbappé, lui, multiplie les rencontres et les voyages. Alors qu’il est sur le départ vers Hong-Kong et la Corée, il a le Brésil déjà en vue, puis le Burkina Faso où il dirigera une master-class. “Je me nourris de mes voyages, de mes rencontres. Lors d’une visite à l’Unesco, par exemple, j’ai admiré un ballet mongol en pleine répétition. C’était fabuleux ! J’ai couru à la boutique acheter un violoncelle mongol. Je ne sais pas l’utiliser, mais ce n’est pas grave. Ce sont ces découvertes qui m’inspirent.”
En 2001, il enregistre avec Ray Charles sur quelques chansons reprises d’Aznavour. Appelé la veille de l’enregistrement, Etienne saisit l’occasion de travailler avec le grand pianiste. En 2004, il présente enfin son premier album solo, Misiya, mélange de douces mélodies, de rythmes africains, parfois un peu jazzy voire hispanisants sur certains morceaux. Bref, un patchwork d’influences diverses. Le bassiste est catégorique : il n’aurait jamais pu se lancer sans ce long apprentissage : “Je devais me débarrasser d’une timidité maladive, accepter d’être critiqué et d’expliquer mes choix. Pendant ces années, j’ai vu sur scène des artistes excellents ou perdant les pédales, gérer un public plus ou moins nombreux. J’ai observé car je savais que je m’y retrouverais un jour.”
Concert à l’Unesco le 9 septembre 2005 à Paris
Queen Etémé Soki (Next Music) 2003
Etienne Mbappé Misiya (O+/Harmonia Mundi) 2004