Mick est tout seul
Sous l'alias Mick est tout seul, Mickael Furnon, s'offre une escapade en solitaire avec Les chansons perdues. Le leader de Mickey 3D, livre un album bricolé à la maison entre rock sombre ou distordu, ballades folks dépouillées et comptines enfantines faussement naïves. Un disque introspectif et intimiste, parfois inégal, mais porté par des textes touchants et un univers singulier. Rencontre.
Un tiers de Mickey 3D en solo
Sous l'alias Mick est tout seul, Mickael Furnon, s'offre une escapade en solitaire avec Les chansons perdues. Le leader de Mickey 3D, livre un album bricolé à la maison entre rock sombre ou distordu, ballades folks dépouillées et comptines enfantines faussement naïves. Un disque introspectif et intimiste, parfois inégal, mais porté par des textes touchants et un univers singulier. Rencontre.
Mick se sent bien tout seul ?
Oui et non. Parfois, dans la vie, tu as envie de solitude. Et là, j’en avais besoin. J’ai perdu mon père récemment, durant la dernière tournée de Mickey 3D. Je me suis plongé dans ce projet pour ne pas sombrer et retourner dans la vie. Et puis je voulais que ces chansons existent, je ne voulais pas qu’elles finissent au fond d’un tiroir, comme pas mal d’autres. La plupart s’était perdue dans la nature, dans le processus de création avec Mickey 3D durant l’enregistrement de notre précédent album Matador.
J’te jure évoque justement ce deuil. Ce fut une chanson difficile à écrire ?
Paradoxalement non. Je ne la voulais pas forcément triste et plombée, plutôt porteuse d’espoir. Il s’agit d’un dialogue, pour dire : "la vie est courte, on va se revoir très rapidement".
Dans l’ensemble, les textes sont souvent elliptiques, limites hermétiques…
Ils le sont également pour moi, parfois. J’avais besoin d’explorer d’autres univers. Avec cet album, je ne suis pas dans le Mickey 3D socialo-réaliste, plutôt dans la poésie sentimentale et amoureuse. Sauf dans une chanson, Encore, où je hausse un peu la voix pour dire : "il existe des terres où la vie n’est pas chère et comme on n’est un peu pervers on y fait des affaires." Mais c’est tout.
Commenter la campagne présidentielle en cours n’a pas démangé l’auteur de La France a peur ?
Si, je l’ai fait sur une chanson, Tout va bien, mise en ligne sur le Net. C’est ma petite contribution à la campagne. Mais je ne vais pas plus loin. Avec Mickey 3D, on a pu reverser les recettes d’un concert à une association de terrain, Basta. Mais on ne descend pas dans la rue poings levés. Je ne suis pas un artiste engagé, comme on a bien voulu le dire. Juste un citoyen qui parfois ouvre sa gueule en chansons.
L’album a été conçu et réalisé totalement en solitaire à la maison ?
J’ai joué tous les instruments. Pour la batterie, j’ai utilisé une boîte à rythmes et un sampler. J’adore piocher des rythmes et des riffs de guitares saturées pour les utiliser dans mes chansons. Mais je ne vous livrerai pas mes sources, je ne veux pas me faire engueuler…
Avec son côté brut et bricolé, on a souvent l’impression d’écouter une maquette de disque. Une démarche voulue ?
Oui et je la revendique. J’aurais pu passer par une longue phase de mixage en studio, jouer sur les effets pour offrir un son léché, mais cela ne m’aurait pas ressemblé. J’adore écouter les vieux disques de bluesmen des années 40, comme Bukka White, enregistrés à la maison, avec le bruit ambiant, les enfants qui braillent derrière, la mère qui leur braillent dessus. Donc je me suis dit, pourquoi ne pas sortir mes chansons dans cet état, si les gens ont envie de rentrer chez moi, tant mieux. Sinon tant pis.
On sent dans votre travail une absence de prétention. Voire un refus de séduction. Même à l’état de maquette, vous considérez avoir livré un travail fini et abouti ?
Oui, moi je fais des chansonnettes. Je ne compose pas une œuvre symphonique. Je ne comprends pas les artistes qui dépensent deux millions d’euros pour un disque de chansons. Un jour, j’aurais peut être envie de rajouter des cordes sur une chanson. Je fais de la chanson française, un peu rock de temps en temps et puis basta. J’adore le format chanson, trois minutes, trois accords, ça m’éclate depuis mes quinze ans.
Vous avez déjà écrit pour des gens aussi différents qu’Indochine, Jane Birkin ou Dick Rivers…
Depuis J’ai demandé à la lune pour Indochine je reçois beaucoup de propositions et je ne fais aucune ségrégation. Des fois ça colle, des fois non. Indochine, je pourrais lui filer un album entier. On a du écouter les mêmes trucs, Cure, Joy Division, Dead Can Dance, Depeche Mode, The Smiths. Tous ces artistes qui m’ont donné envie de faire de la musique.
D’autres collaborations en vue ?
Je viens d’écrire une chanson pour le prochain album de Stéphane Eicher dont j’étais assez fan quand j’avais 16 ans. J’ai également composé pour Sandrine Kiberlain. Elle m’a envoyé un texte assez rigolo et plein d’ironie où elle se la joue chanteuse. Je trouvais ça rigolo. J’écris aussi des textes pour Ben Ricour. Idéalement, j’aimerais bien collaborer avec Olivia Ruiz. Pour le challenge, j’aurai adoré écrire pour Lorie. Mais de son côté y a pas eu d’ouverture au challenge. On aurait pu se taper un délire tous les deux. Je le dis sans ironie.
Mickey 3D, simple parenthèse ?
Je n’en sais franchement rien. Je suis dans le présent, je ne regarde pas plus loin. On est en stand by et ça a toujours été comme ça après chaque disque de Mickey 3D. Mais on se croise régulièrement, on habite toujours dans la même ville, à Ecotay-L’Olme, près de Saint-Etienne.
Sur scène, vous allez défendre cet album solo également en solitaire ?
Oui je pars tout seul avec ma guitare, mon harmonica et mes petits samples. Je vais partager la scène avec Chris Bailey et Cyrz dans le cadre de la tournée Chacun son tour. Je ne voulais pas jouer 1h30 tout seul, là on fait 40 minutes chacun à tour de rôle. Un truc un peu nu et nouveau, flippant et très excitant.
Eric Mandel
Mick est tout seul Les chansons perdues (Virgin) 2007