Jacno télescope les 80’s et les années 2000

Pour son septième album en solo, Tant de temps, l’ex-Stinky Toys Jacno, s’est concentré sur une écriture qui mêle le son des années 80, qui le rendit célèbre avec Rectangle, et celui d’aujourd’hui, autour de chansons matures et séduisantes, façonnées avec quelques complices de choix.

Un nouvel album solo et un livre

Pour son septième album en solo, Tant de temps, l’ex-Stinky Toys Jacno, s’est concentré sur une écriture qui mêle le son des années 80, qui le rendit célèbre avec Rectangle, et celui d’aujourd’hui, autour de chansons matures et séduisantes, façonnées avec quelques complices de choix.

Qui sont tes invités sur ce disque ?
Il y a un morceau avec les Stereo Total. Comme on en était très contents, ils m’ont proposé d’en faire l’adaptation allemande. À la fin, la version allemande me plaisait deux fois plus, et de fil en aiguille, j’ai eu envie que Françoise Cactus, la moitié de Stereo Total, duettise avec moi sur un autre titre. Je suis allé à Berlin, où ils ont leur studio. Je vais d’ailleurs retravailler avec eux, pour faire une version allemande du disque. Je ne parle pas un mot, mais avec des allumés de cette qualité, c’est un plaisir. Je chante en phonétique, et ils me coachent. Il paraît que j’ai un très bon accent ! Je vois à peu près ce que je chante, puisque c’est adapté de mes textes, mais en même temps, c’est flou. Du coup, c’est très croustillant. Je vais donc retourner à Berlin poser mes voix prussiennes sur les mêmes mixes. J’adore ce genre de truc, c’est marrant, et puis quand c’est nouveau pour toi, tu n’as pas les mêmes tics.

Qui sont tes autres acolytes ?
Il y a Tarik Benouarka, un mec extra ordinaire. Il m’a apporté un truc un peu oriental. Il est dans une espèce de mix de tout, d’arabe, de techno, voire de rap, ce qui est pourtant un mot vulgaire dans ma bouche. Un vrai talent. C’est lui qui m’a amené Yacine Mekaoui, qui fait des chœurs justement très arabisants. J’aime vachement ces couleurs, un peu différentes,. Tout cela est finalement très homogène. Ça fait longtemps que je n’ai pas fait un disque lié dans le temps. Je pense que ça s’entend. Le précédent, French Paradoxe, avait des qualités, mais c’était juste un puzzle de chansons, faites pour des films. Quand ça devenait un album, j’ajoutais un morceau avec Arthur H, ou une reprise de J’suis snob de mon idole Boris Vian.

C’est un album où tu fends parfois ton écorce de dilettante, il y a des moments d’émotion non feinte, parmi les gaudrioles comme Le sport…
J’en suis conscient : quand je fais un truc fort, émotionnel, je le sais, ça me fait un effet curieux, un truc bizarre. J’avais déjà fait ça un petit peu sur un disque qui s’appelait Faux Témoin, que j’avais réalisé avec Etienne Daho. C’était mon premier album bien de chanteur, mais là, c’est une marche en plus.


Etienne dont, je crois, avoir décelé la voix dans des chœurs…

C’est bien lui, on s’est fait gauler ! C’est mon frangin. Parmi les autres invités, il y a Thomas Dutronc qui est venu me faire des guitares de voleur de poule, magnifiques, comme il sait faire. Il y a Paul Personne aussi, venu poser une slide guitar. C’est un virtuose, il vient comme d’habitude avec un camion de guitares. Et il trouve le truc immédiatement. Je trouve ça marrant d’aller sur les disques des autres, tu n’as aucune responsabilité. Ça démarre par une connerie, et puis on s’écrit des choses. Le Bourdon, que j’avais écrit pour Paul, c’était suite à un disque (mauvais) de moi dans lequel il était venu jouer.

Toi qui en fût une icône, que penses-tu de ce retour des 80’s dans l’actualité ?
Je ne m’en rends pas compte. Tout ce truc des années 80, c’est un fourbi. Ce qui est sûr, c’est que Rectangle, c’était un truc bizarre, une invention, sans doute. Et comme toutes les inventions, elle était faite par hasard, par accident. Une carrière, c’est un amoncellement : ce qui est bien, tu le gardes, même inconsciemment. Comme la plus belle fille du monde, on ne peut donner que ce qu’on a. Par contre, je ne comprends pas les gens qui veulent rester bloqués sur telle ou telle période de leur création. Moi, j’amoncelle, et je "bordélise" avec les nouvelles techniques.

Es-tu parfois surpris par ta longévité ?
Dès que tu es un peu martien, tu travailles dans la marge en permanence, donc tu ne te poses pas la question. Sinon tu acceptes des choses que moi je n’ai jamais acceptées. Je fais mes trucs, mais pas en calculant quoi que ce soit. J’ose espérer que c’est un gage de qualité. Du reste je n’aime pas tellement entendre ça. Dans le cadre de ma biographie, le mec m’a ressorti toute une discographie, y compris ce que j’ai écrit ou produit pour d’autres… Ça me fait peur ! Il y a des périodes où tu sors plein de disques. Ce qui fait qu’en moyenne, j’ai calculé que j’avais sorti presque deux albums par an ! C’est aberrant.

Cette biographie, écrite avec Albert Algoud, va arriver en même temps que l’album ?
À la fin mai. C’était très intéressant, dans le sens où ça a dépassé le livre d’entretien habituel. Je raconte pas mal de truc, mais pas tout (rires) parce qu’il y a des choses que je ne peux pas raconter ! Ma limite, c’est quand ça met en cause d’autres gens, vivants, ou même morts ! Quand tu n’engages que toi, tu peux tout dire. Mais je ne veux faire de tort à personne. Je n’irais pas balancer avec qui j’ai couché, comme l’a fait Doc Gynéco. Ce n’est pas très cool pour les gens qui n’avaient pas forcément envie d’être cités dans ce type d’ouvrage. Moi, je serais vert si je tombais sur un bouquin d’une fille qui raconterait comment elle s’est tapé Jacno ! J’aurais envie d’aller lui coller une tarte.

Jacno Tant de temps (Warner) 2006