Un Polar en français

Polar, alias Éric Linder, traîne sa guitare et sa gueule d’ange sur la scène folk-pop suisse depuis le milieu des années 1990. Jour blanc est son premier album en version française.

Jour Blanc

Polar, alias Éric Linder, traîne sa guitare et sa gueule d’ange sur la scène folk-pop suisse depuis le milieu des années 1990. Jour blanc est son premier album en version française.

Il aura fallu que Christophe Miossec lui écrive des textes pour que Polar troque la langue de Shakespeare pour celle de Molière. Car des trois albums que le chanteur - helvète d’adoption - a enfanté jusque-là (1 en 1996, Bi-polar en 1999 et Somatic en 2002), aucun ne parle français. Sans doute une façon, pour Polar, de souligner sa naissance irlandaise et les traces laissées par son écoute intensive de Neil Young, Johnny Cash ou Tim Buckley…

Jour Blanc, réalisé par Édith Fambuena (Alain Bashung, Étienne Daho) et Daniel Presley, marque donc une étape dans le parcours d’Éric Linder. Il le dit sur son site : “Pour chanter en français, il fallait que je me trouve de nouvelles marques, un autre phrasé…”. Celui du Cri, le titre d’ouverture, est superbement trouvé. Polar y murmure, à demi-essoufflé, une perte de contrôle : “Je ne sais pas ce qui m’a pris / Quand je me suis mis à hurler / (…) Je suis devenu un étranger / Moi-même je ne savais pas / Ce qui était en train de se passer”.

Ce ton à fleur de peau, porté par une voix mi-fragile, mi-assurée, hante la plupart des morceaux. Ils disent l’amour, la colère, la difficulté d’être et portent des noms comme Le chalet, Ciel, lac, orage etc…ou Tremblement. La nature a assurément inspiré Miossec, qui a passé quinze jours avec Polar dans une maison sise entre forêt et Lac Léman pour composer l’album. Il en résulte des paroles tissées d’étoiles qui prennent feu, de neiges éternelles, de lune qui vacille et “de nature figée comme à Pompéi” sur Le Brasier (seul titre dont Polar soit l’auteur). Au verso de ce monde est un emprunt à Jeanne Moreau, qui avait elle-même pioché les mots d’Elsa Triolet.

Les textes sont simples, efficaces. La musique - un peu téléphonée, c’est dommage - oscille entre folk sensuel et pop gentiment énervée par moment (Accroche-toi, Ciel, lac, orage etc…). Bref, Jour blanc épouse sans rougir les codes d’un rock-pop à la française façon Cali ou Raphaël.

Polar Jour Blanc (EMI/ Virgin Labels) 2006
En concert à Paris le 6 octobre au Point Ephémère et le 26 octobre à la Maroquinerie.