Brassens par Maxime
Neuf ans après les premières reprises de Tonton Georges, Maxime Le Forestier, son meilleur disciple, retrouve ce répertoire qu’il aime tant. Seul sur scène, il s’apprête à remplir L'Européen, à Paris, pendant un mois et demi, avant de sillonner la France. Surprise lors du premier concert de la tournée à Saint-Germain-en-Laye, pas loin de la capitale : la nouvelle pioche, dans un cahier de 83 chansons, met à l’honneur les titres oubliés du poète.
Le Forestier ouvre le Deuxième Cahier
Neuf ans après les premières reprises de Tonton Georges, Maxime Le Forestier, son meilleur disciple, retrouve ce répertoire qu’il aime tant. Seul sur scène, il s’apprête à remplir L'Européen, à Paris, pendant un mois et demi, avant de sillonner la France. Surprise lors du premier concert de la tournée à Saint-Germain-en-Laye, pas loin de la capitale : la nouvelle pioche, dans un cahier de 83 chansons, met à l’honneur les titres oubliés du poète.
Le temps ne fait rien à l’affaire, Brassens est dans le cœur de tous. Dans la file d’attente du théâtre Alexandre-Dumas de Saint-Germain, certains sont nés avec lui, en 1921, d’autres ont vu le jour à sa mort, 60 ans plus tard. Mais de 7 à 77 ans, tout le monde est content. Deux heures durant, le poète à bacchantes et bouffarde sera à l’honneur, des premiers pétales de la Marguerite aux dernières feuilles du Grand chêne.
Vêtu de noir sur sa chaise haute, le meilleur ambassadeur de Brassens se veut simple messager. Seule différence avec son aîné : un jeu de guitare plus souple (arpèges caressants et basses pincées), une voix plus déliée, chaude dans les graves, sucrée dans les aigus. Pain béni pour les "brassensophiles" qui s’ignorent, rétifs à la voix rocailleuse et à la guitare faussement pépère du Sétois. Depuis les Douze nouvelles (disque d’inédits sorti en 1996) et les galettes live vendues dans la foulée (dont Le Cahier, quatre disques, 84 chansons, en 1998), des ribambelles d’oreilles sont venues à Georges grâce à Maxime, sans que ce dernier ait eu à brader l’héritage.
"Le temps ne fait rien à l’affaire" : Le Forestier ne choisit pas pour rien d’ouvrir le bal avec cet hymne contre la connerie. Même si la ritournelle le fait trébucher à trois reprises, l’hommage contenu dans le titre lui attire les premières salves d’applaudissements. Bouille ronde et guitare gironde, barbe de barde et yeux malicieux, le passeur présente le concert avec humour : "Vous n’allez pas assister à un spectacle mais à une soirée Brassens. A un spectacle, je joue entouré de musiciens une liste de chansons et je m’arrête quand la liste est finie. Là je suis seul, et je m’arrête quand je n’ai plus de voix ou quand j’ai mal aux doigts !" Puis il chausse ses lunettes et ouvre son "Cahier" : "Mais j’ai des munitions ! 83 chansons ! La chanson que je viens de faire était la 9. Quelqu’un peut-il me donner un numéro entre 1 et 83 qui ne soit pas 9 ?" Un "27" sort du public. "Vous tombez bien, c’est un texte de Lamartine !" Rire dans la salle. Puis le calme, Pensée des morts, ça ne prête pas vraiment à la gaudriole.
Ce petit jeu de Loto assure quelques moments cocasses. Ainsi lorsqu’une dame insistante exige la "12", qui se révèle être "Concurrence déloyale", une des chansons les plus misogynes de Brassens... Le chanteur lâche un "Oh !" gentiment désapprobateur, tandis qu’un voisin de siège fait remarquer que "les initiales de Maxime, c’est pourtant MLF !" Nouvelle rigolade lorsqu’une voix d’enfant demande la "52" et que son choix tombe sur Trompe la mort. Commentaire de "MLF" : "C’est pas pour toi ma puce, c’est une chanson de vieux !"
IRONIE DU SORT
Le Forestier présente aussi certaines chansons. Ainsi du Bulletin de santé, qui s’en prend à la presse de caniveau. "Un jour Brassens a lu à la Une d’un journal qu’il était mort. Sa réponse : "C’est un peu exagéré !" Du "Modeste", il se demande si "ce n’est pas un autoportrait déguisé". Ou encore, avant d’attaquer A l’ombre des maris : "Voici un sujet que Brassens connaissait très bien pour l’avoir beaucoup provoqué : les cocus !" Son refrain "Ne jetez pas la pierre / A la femme adultère / Je suis derrière !" fait rire la salle aux larmes.
Le public réagit au coup par coup. S’il reprend en chœur les couplets du "Roi", dans une ambiance conviviale de veillée, il dépasse rarement le stade des applaudissements. Car le "Deuxième Cahier" fait la part belle à des chansons de la maturité un peu oubliées, comme Trompe la mort et l’Epave, Bécassine ou Vénus Callipyge : des textes souvent plus complexes, mais que le bonheur de (re-)découvrir hisse aisément au niveau des Copains d’abord. Maxime Le Forestier venge ainsi Brassens qui se plaignait jadis : "A mes débuts, personne n’écoutait mes chansons et tout le monde applaudissait, aujourd’hui, tout le monde écoute et personne n’applaudit !"
Au bout de deux heures et quelque 35 chansons, la voix prend un peu la poudre d’escampette dans les aigus. Ce sont pourtant les doigts qui cèderont les premiers. Leur propriétaire s’amuse à souffler dessus comme un cow-boy sur son colt. Joli symbole. Le Forestier joue toutefois le jeu du rappel, les 300 spectateurs celui de la standing ovation. Le chanteur : "Une dernière mais alors c’est moi qui la choisis !" Un spectateur : "Dans l’eau de la claire fontaine" ! "Ah oui ? Pourquoi pas..." Plus besoin de regarder le pupitre, celle-là, il la connaît bien, et il la chante encore mieux !
Concerts : "Maxime Le Forestier chante Brassens : Deuxième cahier" à Paris, à l’Européen du 23 au 25 mai, puis du 13 juin à début juillet. En province, le 27 mai à Niort, le 28 à l’Île de Ré, le 8 juin à La-Roche-sur-Yon et le 10 à Rochefort. Il poursuivra sa tournée nationale à partir d’octobre.
A découvrir : La 3ème édition du Festival Génération(s) Brassens, du 27 au 29 mai à Crespières (78), où vécut le chanteur pendant 10 ans, avec des artistes comme les Blérots de Ravel, Oldelaf et Monsieur D... Rens. sur le site http://www.festival-brassens.com/
Sortie en novembre 2005 : Intégrale du Cahier Brassens et 2 coffrets de 3 CD chacun du spectacle Maxime Le Forestier chante Brassens : Deuxième cahier.