Jean Leclerc

Jean Leloup est mort, vive Jean Leclerc ! Le chanteur québécois connu en France pour son 1990 sarcastique avait décidé de tuer son personnage, lassé des rituels de la musique professionnelle. Trois ans après cette disparition orchestrée, il revient sous son nom de baptême avec Mexico, un album urgent, allumé et hautement recommandable.

Mexico

Jean Leloup est mort, vive Jean Leclerc ! Le chanteur québécois connu en France pour son 1990 sarcastique avait décidé de tuer son personnage, lassé des rituels de la musique professionnelle. Trois ans après cette disparition orchestrée, il revient sous son nom de baptême avec Mexico, un album urgent, allumé et hautement recommandable.

Le message était fort et fou à la fois. Devant une caméra, Jean brûlait sa guitare, une Fender Jazzmaster 1969. Une hérésie pour beaucoup de musiciens, une libération pour l’artiste. Il en avait soupé du triptyque : composition, studio, concert. Exit Jean Leloup mais pas la musique. Jean Leclerc se fait tailler sur mesure une autre guitare, achète une batterie et du matériel informatique. Pendant trois ans, seul, avec son propre argent, il se rend de temps à autres dans un studio. Arrivé à dix-sept titres, l’évidence s’impose, un album est prêt.

Dix-sept pièces complètement azimutées qui abordent souvent le thème de la mort, mais à la mode mexicaine, comme une partie essentielle de la vie. Le titre Mexico naît d’ailleurs d’un fait divers : une femme tue son mari avant d’emmener ses enfants au Mexique. La plupart des chansons débutent de façon abrupte, comme lors d’une répétition. Cette patte "fait maison" sonne chaleureusement au tympan. Affranchi des règles du calibrage, Jean Leclerc lorgne vers le hip hop dans Ice-cream, le psychédélisme avec Everybody wants to leave voire le jam dub (tout seul !) en guise de final sur No money no home. L’univers du chanteur reste toujours aussi fantasque, entre clins d’œil à Lou Reed (Tangerine) ou déclamation de poèmes surréalistes.

Selon Jean Leclerc lui-même, Mexico est l’album le moins "têteux" de sa carrière. Le Québécois, dorénavant cinéaste, l’a conçu comme le compagnon idéal de la ménagère, qui entonnera ravie chaque jour le refrain imparable du Malheur. Mais l’artiste ne se contente pas de s’ébattre dans le délire, il se confie, certainement comme jamais encore, sur Les amours mortes, chanson aussi belle qu’intimiste. Bâti en marge du système, ce Mexico aussi sincère que revigorant n’est malheureusement disponible qu’au Québec. Les ressortissants des autres pays se rueront sur le site internet du Roi Ponpon, la compagnie de Jean Leclerc.

Jean Leclerc Mexico (Roi Ponpon) 2006