NANTES (Suite)

A Nantes, le festival bat son plein. Voilà trois jours que les groupes se succèdent sur scène sans aucune fausse note. Les artistes sont ponctuels et c'est appréciable. Le temps est au beau fixe, les festivaliers ont trouvé leurs marques et les stands du Village International ne désemplissent pas. Les décibels fusent, en live, percussions brésiliennes, qaqabous marocain, cornemuse écossaise, ou en haussant le volume de son lecteur CD portable (certains y excellent particulièrement). Aux sons se mêlent les odeurs de couscous, thé à la menthe, mafé, galettes, riz cantonnais, sans oublier les encens en tous genres.

La fête continue

A Nantes, le festival bat son plein. Voilà trois jours que les groupes se succèdent sur scène sans aucune fausse note. Les artistes sont ponctuels et c'est appréciable. Le temps est au beau fixe, les festivaliers ont trouvé leurs marques et les stands du Village International ne désemplissent pas. Les décibels fusent, en live, percussions brésiliennes, qaqabous marocain, cornemuse écossaise, ou en haussant le volume de son lecteur CD portable (certains y excellent particulièrement). Aux sons se mêlent les odeurs de couscous, thé à la menthe, mafé, galettes, riz cantonnais, sans oublier les encens en tous genres.

Les trois scènes du site accueillent trois groupes par soir, parfait pour faire connaissance avec certains.

K.E.K (Bretagne), ce sont trois chanteuses a capella, Karine, Euriell et Kristenn, passionnées par le chant traditionnel. De leurs voix énergiques elles nous font découvrir la richesse et la gaieté du répertoire 'gallo' composé de sons de table, de chants à danser, à répondre, de marches et de complaintes de Haute-Bretagne.
Di Naye Kapelye (Hongrie) qui signifie 'nouveau groupe' en yiddish, joue la musique juive klezmorin de l'Europe de l'Est dans sa forme la plus pure. Leur répertoire est constitué de mélodies populaires et de chansons récoltées au sein des communautés juives et des musiciens tziganes. Violon, mandoline, accordéon, clarinette, contrebasse, koboz, tous les instruments sont réunis pour un esprit de fête.

Le coup de cœur de ces soirées ira au trio marseillais Dupain. Réunis depuis moins d'un an, Samuel Karpièna dit Sam de Bouc (chant et tambourin), Pierre-Laurent Bertolino dit Pierlo (vielle à roue) et Samuel De Agostini dit Sam (percussions) livrent un son bien à eux, une 'tradinovation provençale'. Chantés en occitan (dialecte provençal maritime), leurs textes nous transportent dans le monde ouvrier du siècle dernier. Conditions de vie, travail, chômage, immigration, pain, famille, la Ciotat, Port-de-Bouc, les évocations sont nombreuses. Dupain mêle savamment les instruments traditionnels avec boîte à rythmes et séquenceurs pour produire un rythme obsessionnel, comme celui du travail en usine qu'évoque la voix rude et plaintive de Sam de Bouc. Pierlo accorde sa vielle à roue un court instant mais nos oreilles ne décrochent pas, avides de nouvelles histoires. Ce sera une chanson de métallurgistes. Au travers de textes originaux du 19ème siècle et de compositions originales, Dupain nous fait découvrir une partie du patrimoine culturel populaire occitan. Bien évidemment, tout le monde n'est pas censé comprendre la langue d'oc, cependant en prêtant bien l'oreille, des bribes de phrases deviennent familières, mais surtout Dupain crée parfaitement et simplement une ambiance à l'image de ses textes. Les trois musiciens abandonnent leurs instruments, quittent la scène comme ils l'ont investie, rapidement, sans artifices, sans sourires figés. Dommage, on en aurait bien entendu davantage. Après un CD quatre titres entièrement autoproduit, Dupain devrait livrer un album prometteur à l'automne. A ne surtout pas manquer.

" Bonjour, on est de Marseille ! ". Eh oui, restons-y avec Gacha Empega (du provençal gachar : préparer le mortier, et empegar : encoller. Au figuré, désigne celle ou celui qui travaille à la va-vite, qui semble se moquer complètement des règles de l'art, bref, qui tapisse en laissant les bulles ou qui peint les fenêtres sans le scotch). Voilà pour la définition du dictionnaire.
A capella ou accompagnés d'un bendir et d'un tambourin, les trois compères font pourtant bien leur travail et nous embarquent dans des histoires drôles et à la fois pathétiques. Tout comme Dupain, ils chantent en occitan et font revivre avec énergie un répertoire provençal de chants d'église ou de fête, de buveurs et de troubadours. De cet amoureux qui se noie pour récupérer la bague de sa bien-aimée à ce poème de la religion populaire qui devait apprendre aux enfants à compter, Gacha Empega enchaîne les petites histoires qui font le Sud. Les verres de vin rouge arrivent sur scène pour une chanson célébrant l'avènement du Christ. Allez, santé ! Les membres de Dupain les rejoindront pour un dernier morceau endiablé. Et puis " Aïoli !". Ce fut le mot de la fin.

Textes et photos : Frédérique Hall

Discographie
Karine Rouchy (du trio K.E.K) : " Grandes complaintes de Haute-Bretagne " chez ArMen/Chasse Marée/Dastum/GCBPV (1998)
Euriell Coatrieux (du trio K.E.K) : " Chansons amoureuses de Haute-Bretagne) chez Pixies/Déclic (1998)
Di Naye Kapelye : " Di Naye Kapelye " chez Oriente Musik (1998)
Gacha Empega : " Polyphonies marseillaises " chez l'Empreinte Digitale/Harmonia Mundi (1998)