La mue d’Elsa Lunghini
Après deux albums de transition, Elsa, l’ex-enfant précoce de la variété française semble avoir définitivement tourné le dos au star-system. La rupture a pour nom Oser, nouvel album tout en discrétion et mélancolie feutrée, signé du très secret Da Silva et agrémenté de deux chansons de Dominique A. Loin de l’univers balisé des chanteuses à voix, Elsa Lunghini – au patronyme retrouvé comme pour symboliser ce renouveau – se montre à son aise dans les replis de ces douze titres intimistes. Rencontre.
Le virage "indé" de la chanteuse
Après deux albums de transition, Elsa, l’ex-enfant précoce de la variété française semble avoir définitivement tourné le dos au star-system. La rupture a pour nom Oser, nouvel album tout en discrétion et mélancolie feutrée, signé du très secret Da Silva et agrémenté de deux chansons de Dominique A. Loin de l’univers balisé des chanteuses à voix, Elsa Lunghini – au patronyme retrouvé comme pour symboliser ce renouveau – se montre à son aise dans les replis de ces douze titres intimistes. Rencontre.
RFI Musique : Quatre ans se sont écoulés entre De lave et de sève et ce nouvel album. A quels projets vous êtes-vous consacrée dans l’intervalle ? Elsa Lunghini : Il y a d’abord eu un album live, enregistré à l’Européen. Puis je me suis consacrée à l’écriture, j’ai composé de nouvelles chansons. Mais je n’étais pas satisfaite, et finalement, tout cela est resté dans mes tiroirs. Je me suis donc mise à la recherche de quelqu’un, et suis tombée par hasard sur Da Silva, grâce au web. Une chance, car il n’était pas encore connu, et venait d’un univers assez différent du mien. Je lui ai demandé deux chansons, on s’est rencontrés et il a immédiatement décidé d’écrire et de réaliser tout l’album, alors que je n’espérais pas plus de deux ou trois titres.
Pourquoi avoir choisi Da Silva pour réaliser votre album ?
Parce que c’est un artiste qui ne vient pas du sérail, mais de l’indé, avec une sensibilité proche de la mienne. Il y a chez lui une violence dans le propos, mais l’habillage est extrêmement doux. C’est ce mélange d’énergie et de douceur qui le caractérise. J’adore ce genre d’artistes, accessibles au grand public tout en prenant des chemins de traverse, loin de la variété.
Ces chemins de traverses, ce sont un peu les vôtres aussi…
C’est l’une des raisons pour lesquelles je me reconnais en lui. Je m’efforce depuis plus d’une dizaine d’années de ne faire que ce qui me plaît. J’ai conscience de dérouter une partie du public : Oser est un album aux contours parfois arides, les mots sont durs, acerbes, comme sur La Dernière des Canailles. Certains me le reprocheront peut-être, mais au fond, je me fous de ce que l’on va en penser.
Votre chant a gagné en maturité sur cet album…
C’est une question de tonalité. Manu [Da Silva] trouvait que je chantais très aigu. Je me suis mise à chanter plus grave, dans un registre proche de ma voix parlée. Ce parti pris va bien avec l’esprit et les paroles de l’album, et avec ce que je suis aujourd’hui.
L’album sonne rythmé, acoustique, comme taillé pour la scène…
Da Silva est sur la route toute l’année. Et on retrouve un peu de cette énergie scénique sur Oser. C’est aussi pour cela que l’album est assez dépouillé. Nous voulions nous laisser une marge de liberté pour adapter chaque chanson à la scène, y ajouter du rythme, de l’énergie, des couleurs différentes.
Comment s’est déroulée la rencontre avec Dominique A, signataire de deux chansons ?
Je ne le connaissais que de réputation. Da Silva, qui fait partie de son cercle d’amis, l’a appelé pour lui proposer d’écrire quelques chansons pour l’album. Ce que Dominique a fait, rapidement, sans que l’on ait à se rencontrer. Je n’ai rien eu à changer sur ses chansons : elles étaient faites pour moi. Dominique est un poète et un musicien d’une force rare, l’un des plus importants de la chanson française actuelle. Et il y a une volonté chez lui, comme chez Da Silva, de ne pas donner ses "fonds de tiroir" aux autres interprètes. Ce qui n’est pas le cas de tous…
Vous avez connu un très long conflit avec votre ancienne maison de disques. La page est-elle définitivement tournée ?
Je l’espère ! Je n’ai absolument pas d’aigreur à ce sujet. Je suis allée au bout d’un combat légitime, j’ai gagné mon procès. Mais ce fut long et douloureux. Pour des raisons qui n’ont rien d’artistiques, ma carrière a été mise entre parenthèses pendant huit années. Nous, artistes, sommes petits face à ces gens-là ! J’ai su rebondir depuis, c’est le principal.
Quels sont vos coups de cœur musicaux du moment ?
Pas mal de nouveautés : côté nouvelle scène française, j’ai un faible pour Joseph d’Anvers et Pauline Croze. J’écoute également beaucoup de groupes rock récents : Arcade Fire, The Do, les Kills… Sans oublier mes classiques, Brad Mehldau ou JJ Cale, l’un de mes artistes favoris. Je suis une vraie boulimique de musique !
Ecoutez un extrait de
Elsa Lunghini Oser (Mercury/Universal) 2008
En concert à Paris (Café de la Danse) les 27, 28, 29, 30 et 31 janvier 2009