Katerine
Aussi nonchalant qu'une aventure imaginaire d'Amélie Poulain, 8ème ciel , le nouvel album de Katerine joue la mélodie d'un bonheur acidulé comme une imparable déferlante de joie de vivre.
L'épicurien
Aussi nonchalant qu'une aventure imaginaire d'Amélie Poulain, 8ème ciel , le nouvel album de Katerine joue la mélodie d'un bonheur acidulé comme une imparable déferlante de joie de vivre.
Réputé pour ses propres albums fantasques et ses compositions flamboyantes pour sa compagne Helena Noguera ou Anna Karina comme pour ses textes pour Bertrand Burgalat, Philippe Katerine est devenu un personnage incontournable de notre paysage musical hexagonal. Excentrique comme Annegarn, lunatique comme Dutronc, romantique comme Barouh, séducteur atypique comme Gainsbourg et authentique dandy électrique, il publie aujourd'hui son sixième opus à mi-chemin entre pop psyché, variété naïve, jazz nostalgique et électro tendance Pierre Henry.
RFI : On vit dans une société qui sacralise le travail et vous au contraire dans votre album n'hésitez pas justement à faire l'éloge de l'oisiveté !
Katerine : Qu'y puis-je ? C'est ma façon de vivre, mon way of life . Je ne suis pas un travailleur. J'aime faire des chansons de temps en temps, mais il ne faut pas exagérer ! Mon truc c'est plutôt d'être allongé , quoi !
RFI : N'est-ce pas justement là le rôle de l'artiste de se situer ainsi à contre-courant ?
Katerine : C'est vrai qu'il suffit d'allumer sa télé. On voit bien à la Star Academy que l'important c'est de travailler pour réussir ce métier. Moi cela me plaît d'entendre cela. Je ne le pratique pas, mais je trouve cela rigolo.
RFI : Gainsbourg aussi a fait des odes à la paresse, c'est aussi une manière de secouer le cocotier !
Katerine : C'est vrai que la France est un pays de travailleurs. Le grand problème c'est le chômage. Pourtant, moi j'ai été au chômage et c'était les meilleurs moments de ma vie.
RFI : Et cela on ne peut pas le dire ?
Katerine : Apparemment, on te fait les gros yeux. C'est terrible de ne pas travailler.
RFI : Deux personnages, Général Fifrelin et Boulette apparaissent en invités-vedette et en faux " live " sur l'album : c'est votre propre voix passée à la moulinette ?
Katerine : Non ce sont eux un général qui fait des chansons et une petite fille qui fait des chansons. Ils vivent réellement. Je les ai rencontré, ce sont des personnages singuliers.
RFI : C'est donc un tremplin offert à deux jeunes artistes…
Katerine : Voilà, c'est une porte ouverte, on pourrait presque dire " mes coups de cœur ". Le Général Fifrelin doit avoir, je ne sais pas moi, pas loin de 70 ans. Il fait des chansons depuis 1975. Il a amassé beaucoup de mélodies assez étonnantes. C'est un personnage très ambigu. Assez grotesque aussi, mais très émouvant. Quant à Boulette, c'est une petite fille, elle a 11 ans maintenant. Elle fait un groupe, disons punk, avec d'autres petites filles.
RFI : C'est un peu Katerine de 7 à 77 ans !
Katerine : Ah oui, j'ai visé large.
RFI : C'est rare de laisser ainsi des chansons à d'autres sur son propre album. Juvet l'avait fait jadis pour la toute première chanson de Balavoine Couleurs d'automne !
Katerine : Ah oui ? Moi j'ai voulu laisser libre cours à leur imagination, voilà pourquoi je leur ai proposé cette participation originale. Après Le jardin métallique , c'est comme si un concert s'y déroulait avec des invités spéciaux. Toutes leurs autres chansons, on peut les découvrir sur un site internet auquel on peut accéder via l'album. Quand on glisse le CD, en fait on a accès à toutes leurs chansons.
Katerine : Même dans la conversation , je lance une idée et un quart d'heure plus tard je vais dire le contraire. Mon histoire de la paresse et du travail, je pourrais te dire exactement le contraire à un autre moment. C'est comme ça que je suis et cela n'est pas toujours facile, crois-moi.
RFI : Après le droit à la paresse, vous revendiquez le droit d'être une girouette ?
Katerine : Voilà. Et il me semble que cela ne fait de mal à personne. Y'a que les cons qui changent pas d'avis comme on dit par chez nous.
RFI : Votre chanson A la lune se distingue par son côté soul .
Katerine : J'adore danser .
RFI : Vous fréquentez les discothèques ?
Katerine : Pas du tout, je danse chez moi. Je met un disque sur la platine et je danse. Et comme c'est un de mes hobby, la danse, je voulais dans cet album que pour une fois on puisse danser sur quelques unes de mes chansons.
RFI : Pourquoi pour une fois ?
Katerine : Je n'avais jamais osé finalement aller dans ce sens. Là, j'avais envie du corps qui remue, que l'on puisse onduler. C'est assez nouveau pour moi, même si ce sont des chansons plus à danser avec femme et enfants dans le salon qu'en discothèque. Mais si c'était le cas cela serait un rêve, cela me plairait beaucoup.
RFI : Cet album c'est un peu sous le grand chapiteau de Katerine ?
Katerine : Ah, s'il pouvait être ainsi perçu, cela serait fantastique ! C'est vrai que je voulais que cet album soit comme une fête. L'imaginer comme un cirque, car il draine aussi quelque chose d'un peu baroque et un peu boursouflé. Un peu dans l'excès. C'était comme cela que je le visualisais à la fin en le mixant. Et en recollant les morceaux, je me suis aperçu que c'était effectivement comme une sorte de grand spectacle. J'avais envie d'un tel disque très hétéroclite.
Katerine :Heureusement que je ne me pose pas ce genre de questions ; d'ailleurs, si j'étais un peu malin, je ne ferais pas cette musique évidemment. Si je voulais faire des tubes, je chercherais ailleurs. Moi, je me laisse aller, je m'abandonne à mes instincts, à mes rêves, à mes fantasmes en pensant que si je suis passionné par ce que je fais, alors les gens vont l'être aussi.
RFI : Votre premier album date de 1991. Plus de dix ans sont passés, vous en avez enchaîné cinq ou six, c'est tout de même très rassurant quelque part de sentir cette lente construction.
Katerine : En fait, j'ai toujours cette peur, cette impression que cela va être le dernier. Je ne sais jamais s'il y en aura un autre. Je n'ai aucun plan de carrière. En fait, je me suis aperçu d'un truc depuis dix ans. Au début je ne faisais pas beaucoup de chansons, désormais j'en fais de plus en plus, et plus j'en fais, plus j'ai envie d'en faire. C'est devenu un peu boulimique et désormais j'y ai pris goût.
RFI : Et ce côté Pygmalion à la Gainsbourg ?
Katerine :Je n'ai pas l'impression de manipuler qui que ce soit, ce n'est pas du tout la même optique si tant est qu'il manipulait les filles qu'il faisait chanter, ce dont je doute aussi. Mais dans Pygmalion il y a cette idée de manip, c'est un désir de pouvoir et je ne suis pas du tout attiré par cela. Je suis plutôt dans un rapport de séduction, de tendresse. C'est tout simple.
RFI : Si l'on comparait le Katerine 91 à celui d'aujourd'hui ?
Katerine :Je le trouverais beaucoup plus libre. Quand j'ai commencé, j'étais un peu vieux garçon, maintenant je me sens beaucoup plus jeune. A l'époque, j'avais pleins de traumatismes à gérer, j'avais du mal à m'en sortir, à parler aux gens. Je rougissais tout le temps. C'était affreux. A force de faire des chansons, je me sens plus libéré de tout cela.