LE LABEL COOP BREIZH

Paris, le 15 mars 2000 - Depuis 1957, la Coop Breizh tente de concilier les affaires et le militantisme culturel breton à travers ses activités de distributeur, d’éditeur et de producteur, littéraire et musical. L’idée est de faire du culturel breton, mais en générant ses propres moyens et sans vivre de subventions. La Coop Breizh y réussit plutôt bien comme l’explique Jean-Louis Levallegant, son directeur depuis mars 1999.

Comment défendre ses idées et faire des affaires

Paris, le 15 mars 2000 - Depuis 1957, la Coop Breizh tente de concilier les affaires et le militantisme culturel breton à travers ses activités de distributeur, d’éditeur et de producteur, littéraire et musical. L’idée est de faire du culturel breton, mais en générant ses propres moyens et sans vivre de subventions. La Coop Breizh y réussit plutôt bien comme l’explique Jean-Louis Levallegant, son directeur depuis mars 1999.

Quelles sont vos principales activités ?
Il y en a deux, la production-édition et le négoce, c’est-à-dire qu’on distribue des labels ou des maisons d’éditions qui ne possèdent pas de distributeur. Une de nos spécificités, c’est que la porte est ouverte à tous ceux qui s’intéressent à ce qui concerne la Bretagne, que ce soit écrit, édité en Bretagne ou ailleurs. Beaucoup de petits éditeurs et de petits labels ne trouvent pas de distributeur autre que Coop Breizh. Cela ne veut pas dire que c’est de mauvaise qualité, bien au contraire. Mais ce sont des productions davantage ancrées dans les terroirs ou qui n’ont pas de débouchés suffisamment porteurs pour être inscrites dans les catalogues des grosses entreprises.

Quand commencèrent vos activités musicales ?
Vers 1982 par la reprise du catalogue Ar Folk, une maison emblématique du renouveau des musiques bretonnes dans les années 70. Mais la production discographique s’est vraiment concrétisée à partir des années 86-87.

Avec quelle politique musicale ?
On a trois lignes directrices. La première c’est la tradition conventionnelle : le couple de chanteurs, le couple de sonneurs, le bagad. La seconde, c’est la tradition habillée d’arrangements. C’est, en gros, le fest noz tel qu’il s’exprime aujourd’hui à partir de la musique traditionnelle orchestrée avec guitare basse. La troisième ligne est davantage faite d’accompagnement et de recherche. On a la chance de compter dans notre catalogue des artistes qui n’en sont plus à leur deuxième ou troisième album et qui évoluent toujours. Ils assoient leur pratique sur une connaissance assez pointue du terreau musical breton et complètent cette connaissance avec des apports d’ici et d’ailleurs. Un peu à la manière de créateurs contemporains, ils ont trempé leur plume et leurs oreilles un peu partout et ils mettent sur le disque la synthèse de tout cela.

Ça se vend moins bien…
C’est ça le capital de Coop Breizh et on prend le risque d’accompagner ces artistes-là. C’est là aussi qu’on se différencie des autres labels, puisque cette année on va produire une quinzaine d’albums, alors que nos concurrents directs en produisent deux, voire trois. C’est une forme de militantisme, je pense, et c’est du militantisme au-delà du discours, dans les faits. Nous voulons conjuguer des métiers ou des opérations qui génèrent beaucoup de profits pour pouvoir développer des projets plus pointus qui demandent un suivi et un investissement plus important, sans avoir une rentabilité 100% au bout du compte.

Quelques noms ?
Dans la tribu porteuse de l’idée Coop Breizh, on a, par exemple, Ricardo del Fra et Annie Ebrel, dont l’album "Voulouz loar. Velluto di Luna" a été Diapason d’Or de l’année 1999 pour les musiques traditionnelles. On a aussi des gens comme le guitariste Soïg Sibéril, le flûtiste Jean-Michel Veillon, et pratiquement tous les bagadoù de Bretagne, sauf le Bagad Kemper. On mène aussi des opérations en relation avec d’autres musiciens hors de la musique traditionnelle, je pense à Pat O’May, un hard-rocker avec qui on a fait un disque. Le dernier-né de cette mouvance en dehors de la musique traditionnelle tout en y étant intégré, c’est Añgel I.K., un concept-album basé sur la rencontre d’un couple de sonneurs, d’un chanteur et d’une rythmique techno.

La concurrence est-elle rude ?
Aujourd’hui nos concurrents ont dépassé les frontières bretonnes. De gros groupes financiers se sont mis à scruter de près l’économie de la musique celte et de la musique bretonne en particulier. Jusqu’en 1997, en gros, 50 disques de musique bretonne ou apparentée étaient produits chaque année. En 1999, il y en a eu 175, ce qui met beaucoup d’entreprises en concurrence et elles arrivent sur le marché avec des moyens financiers, promotionnels, etc., diamétralement opposés.

Propos recueillis par Jérôme Samuel

Coop Breizh en ligne

La Coop Breizh en chiffres
Les ventes se font à 70% en Bretagne, 20% en région parisienne, 8% dans le reste de la France et 2% à l’export. L’entreprise a 38 salariés. Le catalogue compte 6.000 livres et 400 albums. La Coop Breizh distribue 600 éditeurs dont 300 vraiment actifs (Chasse Marée Armen …) et 36 labels, tous bretons (L’Oz Production, Ciré Jaune, etc.). Les meilleures ventes sont le Bagad de Lann Bihoué (bagad de la Marine Nationale, 40.000 ex.), Didier Squiban ("Molène", 30.000 ex.), Añjel I.K. ("Attitude trad et grooves explosifs", 10.000 ex.), mais les petits albums ne sont tirés qu’à 1.000 ou 1.500 exemplaires. La Coop Breizh sera présente au Salon du Livre à Paris, du 17 au 23 mars 2000.