Yann Tiersen en Chine

Yann Tiersen 'China tour', la tournée en Chine du musicien breton, connu essentiellement à travers le monde pour la bande originale du film Le Fabuleux destin d'Amélie Poulain, a remporté un franc succès les 2 et 3 décembre à Pékin, et le 4 à Shanghai devant un public ébahi.

Rock'n'roll en Extrême-Orient

Yann Tiersen 'China tour', la tournée en Chine du musicien breton, connu essentiellement à travers le monde pour la bande originale du film Le Fabuleux destin d'Amélie Poulain, a remporté un franc succès les 2 et 3 décembre à Pékin, et le 4 à Shanghai devant un public ébahi.

La toute première apparition sur scène de Yann Tiersen en Chine s'est déroulée à merveille, dans la capitale chinoise et à Shanghai la bouillonnante. Deux concerts à Pékin, et un à Shanghai, pour cette tournée-éclair qui laissera des traces. A peine débarqués de l'avion d'Indonésie où ils s'étaient produits la veille, la dizaine de membres de la tournée (cinq musiciens et tous les techniciens), est arrivée dans le froid pékinois sous un beau ciel bleu. Trente cinq degrés de différence, mais un accueil chaleureux. La salle Yugongyishan où s'est produit le groupe de Yann Tiersen est la seule de Pékin à offrir de la musique live en centre-ville.

Comme souvent en Chine, quelques imprévus de dernière minute ont retardé la préparation sonore, et la balance a été complètement faite quelques minutes seulement avant l'ouverture des portes. Les 400 billets avaient été tous achetés longtemps à l'avance, et le concert s'est déroulé à guichet fermé. Beaucoup de Français parmi le public, et aussi de nombreux fans chinois prêts à dépenser neuf euros par billet - le prix de dix repas d'étudiant - pour écouter le chanteur. Au marché noir, quelques rares billets se revendaient 400 yuans devant l'entrée, signe du succès.

Encore Amélie

Yann Tiersen est ici connu avant tout par un public de cinéphiles, Amélie Poulain ayant emporté un grand succès en Chine. "Je l'ai découvert par le film, et j'ai cherché tous ses albums sur internet" dit Feng Yu, 25 ans, fan inconditionnelle. "Il représente la vraie France pour moi, une france poétique et moderne à la fois, pas de clichés. Et il est très beau, comme tous ses musiciens!"

Ce public de cinéphiles en a drainé un autre, celui des amateurs de musique de qualité qui ont pu découvrir Yann Tiersen par le biais des CDs piratés qui circulent largement dans les grandes villes chinoises, et qui sont le seul moyen d'avoir accès à des albums qui ne sont pas vendus dans le pays. Internet est encore peu utilisé pour acheter de la musique dans ce pays.

Les deux concerts pékinois ont duré plus d'une heure quarante-cinq, devant un public médusé. A Shanghai, le concert avait lieu dans le Concert hall de la ville, une salle qui n'avait jusqu'ici présenté que des opéras et de la musique classique. Les billets de cette salle de 1300 places atteignaient les 500 yuans, mais la salle était comble aussi, d'un public moitié chinois et moitié étranger, dont une majorité de Français.

A chaque concert, Yann Tiersen a alterné guitare, accordéon, violon, toy-pianos, glockenspiel, accompagné de Marc Spens aux guitares électriques, qui a dynamisé la scène par des rythmiques fluides et emportées, Stéphane Bouvier à la basse dansant ses lignes souples et profondes pour faire bouger le public, Ludovic Morillon avec sa batterie sans un accroc et toujours pile poil, et l'envoûtante Anne-Gaëlle Bisquay au violon et violoncelle, donnant une touche de grâce aux accords même les plus rock.

Vraiment rock'n'roll

Reste l'image de cette fille chinoise de quatorze ans, au premier rang, qui est restée les yeux écarquillés et la bouche ouverte pendant tout le concert. Ou de ce vidéaste pékinois de trente-deux ans qui a dansé toute la soirée, alors qu'il ne connaissait pas Yann Tiersen. "Les spectateurs s'attendaient à entendre une musique assez minimaliste du type Amélie Poulain, avec une image romantique, et ils ont eu une grosse surprise rock n'roll, ils étaient ébahis", explique Pierre-Alexandre Blanc, du Bureau des musiques actuelles de Pékin (BMA), qui organisait cette tournée. "Le meilleur, c'est qu'ils ont aimé cette surprise, et sont complètement rentrés dans une musique à laquelle ils ne s'attendaient pas".

En effet la musique jouée durant ces trois dates, comme durant toute la tournée, est d'une beaucoup plus grande variété que celle d'Amélie Poulain, c'est "un patchwork de compositions des cinq dernières années revisité par nos expériences sur la route et nos impressions du moment" dit Yann Tiersen. "La musique est une évolution constante, on ne peut pas se figer à un seul style, il faut explorer sans cesse. La difficulté d'avoir connu un énorme succès avec un album, c'est que beaucoup de gens pensent qu'on ne fait que cela. Alors que ce n'est qu'une partie de mon travail. Aujourd'hui, je fais la même chose, mais avec un son différent, plus rock, mais au fond la démarche est la même" dit-il calmement, "la scène enrichit la musique, par le contact direct avec le public".

Yann Tiersen n'a rien d'une star. Posé, disponible, naturel, à l'écoute, il est le même sur scène que dans la vie ordinaire. "Ce qui est merveilleux avec lui c'est qu'on a une grande liberté et qu'il n'impose jamais ses choix. C'est sa musique et son nom, mais on fait un travail en commun, ce qui nous permet d'évoluer, d'enrichir la musique. Yann est un vrai musicien : il sait écouter avant de s'exprimer" dixit le bassiste Stéphane Bouvier. Leur tournée mondiale, qui dure depuis un an et demi et doit se poursuivre tout le printemps, a déjà donné lieu à un album-dvd, Yann Tiersen on tour, et déjà un autre album est en projet, issu de la deuxième moitié de cette tournée décidément très fertile.