Afia Mala à Cuba
Elle en rêvait, elle l’a fait : après cinq ans d’absence, la Togolaise Afia Mala revient de Cuba où elle a enregistré un album 100 % salsa, escortée par le mythique Orquesta Aragon. Savoureux compte-rendu de cette expérience cubaine, Afia à Cuba, est pourtant bien plus qu’un disque pour la pétulante Togolaise : c’est un aboutissement.
¡ Cuba si !
Elle en rêvait, elle l’a fait : après cinq ans d’absence, la Togolaise Afia Mala revient de Cuba où elle a enregistré un album 100 % salsa, escortée par le mythique Orquesta Aragon. Savoureux compte-rendu de cette expérience cubaine, Afia à Cuba, est pourtant bien plus qu’un disque pour la pétulante Togolaise : c’est un aboutissement.
La Togolaise Afia Mala est en transit à Paris. Dans quelques jours, elle repartira à Dhâkâ, capitale du Bangladesh pour organiser son déménagement vers Islamabad, au Pakistan, pour suivre son époux. Côté vie publique, elle présente Afia à Cuba son huitième album en vingt-cinq ans de carrière, mais le premier 100% salsa, enregistré aux studios Egrem, à La Havane avec le plus africain des groupes cubains, l’Orquesta Aragon. Une expérience inédite pour une chanteuse africaine et un rêve devenu réalité pour la Princesse des rives du Mono.
Au-delà du mythe
Prix Découvertes RFI en 1984 avec le tube Ten Homte, star de la chanson continentale avec notamment son album Es la manana (1988), chanté en mina, en espagnol et en français, Afia Mala a toujours chanté dans la langue de Cervantes et mis en avant les rythmes afro-cubains… Jusqu’à ce qu’elle décide d’enregistrer à Cuba, dans le studio Egrem, véritable temple de la musique cubaine.
"Au Togo et au Bénin, nous avons la salsa dans le sang. Dans presque tous mes albums, je mettais une touche d’afro-cubain, parce que c’est une musique dans laquelle j’ai baigné toute petite. Mais un album complètement salsa, c’est une folie ! Un rêve que j’avais depuis longtemps !" L’arrangeur et ami Boncana Maïga, qui y a vécu une dizaine d’années, est son meilleur conseil. Il l’encourage vivement à traverser l’Atlantique. Alors Afia se lance. Et rentre du même coup dans l’histoire de la longue tradition d’aller-retour de la musique afro-cubaine.
C’est évidemment l’Orquesta Aragon, premier groupe cubain à avoir tourné au Mali, au Sénégal, au Ghana, au Zaïre ou au Mozambique, dans les années 70 qui semble le plus approprié pour l'accompagner. Les musiciens avaient déjà accueilli Papa Wemba ou le Sénégambien Labah Sosseh ; et aussi accompagné sur scène la grande Myriam Makeba, mais ils n’avaient encore jamais enregistré d’album avec une chanteuse africaine. Une belle première.
Ainsi, pendant un mois, ils font découvrir à Afia Mala la richesse culturelle de l’île. Elle s’enthousiasme pour les fêtes de quartier, l’hospitalité cubaine, la musique qui rythme toutes les étapes de la vie à Cuba. "Franchement, la réalité dépassait le mythe. J’ai retrouvé une partie de moi à Cuba, dans cette omniprésence de rythmes. Cela dépassait tout ce que j’ai pu imaginer, être dans ce pays où tout le monde a la salsa sous les pieds, sous la langue et dans le cœur".
Elle apporte des compositions, l’Orquesta Aragon lui soumet quelques reprises qu’elle adapte en mina, la langue majoritaire du Togo. "J’ai repris par exemple, la chanson Tatalibaba de Celia Cruz, que j’entendais à la maison sur les vinyles de mon père. En mina, elle est devenue Tsite, et incite les gens à se mettre au travail, au lieu de critiquer les autres… J’ajoute que la surprise de cet album, c’est d’entendre l’Orchestra Aragon me donner la réplique en mina !" En hommage à Celia Cruz, Afia Mala propose de belles relectures de morceau de la célèbre icône : Me Voy a pinar el rio ou Caramelo qui deviennent respectivement Togo et Gamelilo.
Studio de légende
Mais cette expérience ne fut pas de tout repos. "Honnêtement, je ne peux pas dire que cela a été facile. C’était par exemple, la première fois que je chantais sur des violons et il fallait chanter juste… Et puis, même si j’avais déjà fait pas mal de studios avant d’enregistrer à la Havane, le studio Egrem est vraiment impressionnant. Quand tu rentres, tu vois les photos de tous les grands artistes qui y ont enregistré, et là tu te dis : 'Mais je suis où là' ? Par exemple, le piano qu’on a utilisé pour l’album était déjà là quand Joséphine Baker est venue enregistrer".
En plus d’Aragon, Afia s’entoure de musiciens d’exception comme le pianiste Gonzalo Rubalcaba, nominé aux Latin Grammy Awards 2006 ou le percussionniste Tata Guines, décédé entre temps au début de l’année. "Tous ces musiciens, le contexte, me font dire que j’ai vécu une expérience unique, très riche à tous points de vue. J’ai aussi pu rendre hommage à Benny Moré, que j’ai aussi beaucoup écouté (il est considéré comme un des plus grands chanteurs cubains : ndlr). Je me suis rendue sur sa tombe, j’ai prié et chanté a cappella pour qu’il repose en paix. A Cuba, je me suis sentie enrichie par la force de cette musique et j’ai donné le meilleur de moi-même", conclut-elle dans un immense sourire. Cela s’entend. La ravissante perfectionniste a réussi son ambitieux pari. Reste à savoir maintenant si l’expérience pourra se prolonger sur scène, avec les treize musiciens du fameux orchestre cubain…
Ecoutez un extrait de Lonlon vanvan
Afia à Cuba Afia Mala (Frochot Music /Cantos/Pias) 2008
Voir aussi : dans la boutique RFI Afia à Cuba, une coédition Rfi