Zap Mama
Depuis "Seven", l'album précédent, chacun sait que Zap Mama a changé de registre. Finis les jeux de voix a cappella qui avaient fait retenir ce nom. Zap Mama, c'est maintenant une autre histoire, un exercice solo bien accompagné, celui de Marie Daulne, initiatrice du groupe et désormais seule protagoniste restant du Zap Mama première manière.
Un nouvel album, "A ma zone", vient de sortir, occasion de faire un tour d'horizon avec la Miss.
Virage bien négocié
Depuis "Seven", l'album précédent, chacun sait que Zap Mama a changé de registre. Finis les jeux de voix a cappella qui avaient fait retenir ce nom. Zap Mama, c'est maintenant une autre histoire, un exercice solo bien accompagné, celui de Marie Daulne, initiatrice du groupe et désormais seule protagoniste restant du Zap Mama première manière.
Un nouvel album, "A ma zone", vient de sortir, occasion de faire un tour d'horizon avec la Miss.
Apparu au début des années 90, Zap Mama était un groupe vocal féminin remarqué pour la qualité de ses polyphonies débridées, sa fraîcheur, son humour. Après deux albums d'une singulière originalité et une ribambelle de concerts, les cinq Zap avaient disparu du paysage. Une éclipse quasiment totale. On a simplement vu plus tard l'une d'elles, la Camerounaise Sally Nyolo, réapparaître sous son propre nom et repéré également la Belgo-zaïroise Marie Daulne sur un album de Maria Bethânia, ou ceux de Wizards Of Oz et Spearhead, deux groupes dont elle débauchera les forces vives pour participer à son premier album, "Seven".
Car plus qu'une renaissance de Zap Mama, "Seven" sera avant tout l'œuvre de son ancien leader, Marie Daulne. Celle-ci choisit de conserver le nom du groupe, dont elle ne garde alors auprès d'elle que Sabine Kabongo dans les chœurs. Au risque d'abuser ceux qui pensent trouver là un nouvel album du quintette vocal. D'autant que la matière musicale n'a plus grand chose à voir avec ce que l'on connaissait. La chanteuse change complètement de registre. Elle prend un virage à 180 degrés, s'entoure de musiciens, invite le grand toaster jamaïcain U-Roy, use davantage de l'anglais que du français et reprend un titre d'Etta James.
Avec "A Ma Zone", sa nouvelle production, Marie Daulne prolonge le propos de "Seven". Elle concocte un éclectique et pertinent mélange de soul, funk, gospel, drum'n'bass et hip hop, traversé de réminiscences africaines, en invitant au passage d'autres compagnons (The Roots, Manu Dibango, Speech) avec qui elle se sent des affinités.
Née dans le Haut-Zaïre, Marie Daulne ne connaît que peu de choses de son pays natal. Lorsqu'elle l'a quitté, elle avait seulement quelques mois et elle n'y est retournée depuis que deux fois, à quatre et dix-huit ans. Mais ce sont sans doute ces racines qui lui donneront plus tard l'envie de s'intéresser aux chants pygmées d'Afrique centrale et aux musiques ethniques en général. Quand le goût du chant lui viendra. Un éveil qu'elle doit à la radio, à la télévision, aux concerts qu'elle fréquente. "Le pouvoir de la musique, du chant était vraiment grave sur moi, dès ma petite enfance, se souvient-elle. Une mélodie pouvait me faire pleurer ou au contraire me rendre follement joyeuse." Au moment où elle décide de se lancer dans la musique, elle s'inscrit dans une école de jazz à Anvers. Puis se lasse très vite : "J'ai compris que je n'en avais pas besoin, car c'était autre chose que du jazz que je voulais faire". Un métissage de voix, de chants d'Afrique, de fantaisie, d'airs inspirés par ceux du monde. Ainsi naît Zap Mama. "Mais je savais dès le départ que je ne ferai pas toujours un truc a cappella. D'ailleurs je l'avais écrit dans le contrat avec la maison de disques. Même si je suis passionnée par la voix humaine, je ne voulais pas m'enfermer dans ce registre là".
D'où le fameux virage... "Après deux albums a cappella, j'ai décidé de tout arrêter. Je suis devenu maman, puis j'ai commencé à rencontrer des musiciens". Aux Etats-Unis notamment, où elle envisage aujourd'hui de s'installer: "J'y ai plein de projets et plutôt que de faire sans arrêt des allers-retours entre là-bas et la Belgique, j'ai envie d'aller y vivre, d'y passer une période de ma vie". Les Etats-Unis, dit-elle, ce n'est pas seulement ces images véhiculées par les médias, ce pays où le business domine tout. Il existe aussi là-bas des rapports forts entre les gens, comme ailleurs. Même si ce pays est l'archétype de la société tehnologique qu'elle pointe ironiquement du doigt dans son nouvel album. "Je ne condamne pas a priori les machines, la technologie, mais il ne faut surtout pas oublier de faire passer des messages d'amour. Nous avons la richesse technologique, d'autres peuples ne l'ont pas, comme ils n'ont pas droit non plus d'être soignés, d'apprendre à lire, de quitter leur pays, alors que nous, Européens, pouvons aller évacuer chez eux nos stress". Autant d'injustices, de disfonctionnements qui la choquent, la rebellent, la motivent à réagir et faire réagir, la poussent à "chanter en donnant de l'espoir pour un futur positif" .
Zap Mama A ma Zone (Virgin) 2000