Banlieue Rythme, la banlieue, ses talents

La neuvième édition du festival Banlieue Rythme, s’est déroulée du 22 avril au 3 mai dernier à Guediawaye, dans la banlieue de Dakar. Au programme : ateliers, tables rondes, concours-découverte et deux soirées de concerts gratuites pour entrevoir les talents de demain.

Festival à Guediawaye

La neuvième édition du festival Banlieue Rythme, s’est déroulée du 22 avril au 3 mai dernier à Guediawaye, dans la banlieue de Dakar. Au programme : ateliers, tables rondes, concours-découverte et deux soirées de concerts gratuites pour entrevoir les talents de demain.

En quelques années, Banlieue Rythme s’est fait un nom, une identité à part. Rendez-vous incontournable de la capitale, c’est aussi et surtout le rendez-vous musical de la banlieue. Un grand bol de découvertes et de rencontres en plein désert culturel. Pendant près d’un mois, Guediawaye oublie le temps des soirées en plein air, les affres du chômage et des départs en pirogue vers les Canaries. D’autant que depuis ses débuts en 2001, le festival n’a pas changé de philosophie ni de maître. Aux manettes : Ousmane Faye, le manager de l’orchestre du Super Diamono. Et un même mot d’ordre : faire émerger les artistes de la banlieue tout en leur offrant la possibilité de côtoyer des artistes confirmés.

Samedi 2 mai. Il est un peu plus vingt-deux heures. Le long de la route qui mène à la Cité Enseignant, se dresse une grande scène et quelques petits chapiteaux rougeoyants, installés sur un parterre sablonneux. "Ici, c’est le village des artistes" prévient un vigile à l’entrée. Dans la pénombre, des dizaines de musiciens, badge autour du cou, font des va-et-vient, un gobelet de café à la main.

Le rappeur sénégalais K-Price vient de terminer son concert. C’est au tour de Naby, le reggaeman de Mbour. Une ligne de basse. La batterie. Le rythme et ces mots : "Suma réréé" … Depuis six mois, cette chanson d’amour tourne en boucle sur les radios locales. Les femmes en ont même fait leur berceuse. Suma réréé. La magie du live opère alors, et ce sont plus de vint mille personnes qui reprennent en cœur le refrain sous l’œil impassible des agents de la sécurité. Naby sourit, balaie la scène micro en main et donne la réplique aux envolées de la saxophoniste. Un, deux, trois, quatre morceaux. Premier coup de maître en banlieue pour Naby.

Il est bientôt minuit. Bidew Bou Bess ("une nouvelle étoile", en wolof) entre alors en scène sous un tonnerre d’applaudissements. Après six ans d’absence, les trois frères de Guediawaye, fondateurs du concept Orginal One font un retour dans le temps. "C’est ici qu’on a fait nos premiers pas, on est chez nous" confient-ils amusés. Ce soir-là, impossible de jouer avec les musiciens aux complets mais déjà, quelques mois avant la sortie de leur troisième album, leurs compositions font un tabac. Un rap puissant, un rap de fusion, qui flirte parfois avec l’électro et où le flow énergique de Baïdy, alias Master B met le public en transe.

Le croissant de lune est sorti, mais les concerts se poursuivent. Pendant près d’une heure, Sidy Samb et ses quatre percussionnistes chahutent le public au son du mbalax. Succès garanti. Puis c’est au tour de la jeune Njaaya. Après un passage chez les PBS, Alif et Farafina, cette "enfant du quartier de la Médina" a fait le grand saut et se produit dorénavant en solo. Sur scène, la miss de 25 ans, guitare en bandoulière offre une musique folk où les sonorités jazz et reggae côtoient la flûte et les percussions. Un savoureux et audacieux mélange des genres qui, une fois passée la surprise, fini par conquérir le public...

Trois questions à … Naby Condé alias Naby

RFI musique : Les Sénégalais connaissent bien  Suma réréé, mais qui est Naby qui se cache derrière ce morceau ?
Un sénégalais de 33 ans (rire). Je suis né à Dakar, d’une mère malienne et d’un père guinéen, mais j’ai grandi à Mbour (80 km au sud de Dakar, ndlr). Je suis devenu chanteur un peu par hasard. Je crois que c’était en moi. Depuis tout petit, je chantais des trucs à ma mère pour qu’elle me pardonne. Et puis j’écris, ça vient comme ça, un peu comme quand la pluie tombe, c’est imprévisible. Il y’a des faits qui me font cogiter. J’en fais une mélodie et ensuite, je compose la musique.

Justement, cette musique comment la décririez-vous ?
Disons qu’elle m’est propre. Il y a des accents reggae mais c’est aussi un mélange de tout ce que j’ai écouté étant jeune. Ça va du reggae bien sûr, du jazz, du hip hop à la soul en passant par le funk. Des artistes comme Tracy Chapman, Stevie Wonder, Youssou N'Dour, Omar Pene. Et puis il y a l’inspiration des musiciens, des collaborations au hasard des rencontres, avec un trompettiste, une saxophoniste et d’autres.

Vous chantez parfois en français et en anglais, mais beaucoup de vos textes sont en wolof. De quoi parlent-ils ?
De tout ! Du social, de Dieu, d’amour. Je suis un rêveur, mais j’avance à pas de caméléon. Regardez, mon premier album Dem Naa ("je suis parti", en wolof) est sorti en octobre 2008 sur notre propre label Dem Rek. On joue dans différents endroits de Dakar et j’ai fait quelques dates en France, au festival Galsen, à la Goutte d’Or et au New Morning. Ça avance...